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Opération Seewald

Je n’avais pas l’intention de lire le livre d’entretiens de Benoît XVI avec Peter Seewald, et ce que j’en lis me conforte dans ma décision tout en me glaçant d’effroi.

Ma décision venait d’un fait tout simple. Voyant à plusieurs reprises, au cours du pontificat de Benoît XVI, des références à un livre d’entretiens entre le cardinal Ratzinger et Peter Seewald intitulé Le sel de la terre, j’avais fini par me dire que je devrais me procurer ce livre. Et puis un jour j’ai découvert que j’avais ce livre, et même que je l’avais lu. Et je n’en avais aucun souvenir… Donc c’était un livre inutile, de la faute de Seewald, et le nouveau livre d’entretiens ne serait pas meilleur.

En outre je m’étonnais d’apprendre que Benoît XVI parlait de son successeur, et je n’avais aucune envie d'apprécier la pieuse langue de bois que devrait forcément manier Benoît XVI parlant de François. Mais forcément je l’ai quand même vu, puisqu’on se délecte de le reproduire partout, et aussi on a en prime un nouvel épisode de langue de bois sur la renonciation. Aussi crédible que celui de la soutane blanche qu’il a gardée parce qu’il n’avait rien d’autre à mettre… Cette fois on est censé gober qu’il a renoncé parce que le pape devait aller à Rio et que lui ne pouvait pas y aller à cause des fuseaux horaires qui le fatigueraient trop…

Mais il y a pire que cela. Pire que ce qui n’était hélas que trop prévisible.

D’une part ceci :

« C'est moi qui ai écrit le texte de la renonciation. (...) Je l'ai écrit en latin. Un texte aussi important devait être écrit en latin. En outre, c'est une langue que je connais suffisamment bien pour l'écrire d'une manière digne du sujet. Naturellement, j'aurais tout aussi bien pu l'écrire en italien, mais je risquais de faire des fautes. »

Or on se souvient qu’il y avait dans ce texte une énorme faute de grammaire. Une faute dans la phrase cruciale, qui était de ce fait incompréhensible :

declaro me ministerio Episcopi Romae, Successoris Sancti Petri, mihi per manus Cardinalium die 19 aprilis MMV commissum renuntiare

Or Benoît XVI a réellement prononcé cette phrase ainsi, et elle n’a été corrigée que tardivement sur le site du Vatican : « commisso » à la place de « commissum », ce qui permet de traduire :

je déclare renoncer au ministère d’Évêque de Rome, Successeur de saint Pierre, qui m’a été confié par les mains des cardinaux le 19 avril 2005

La seule certitude que l’on puisse avoir dans cette histoire, c’est que Joseph Ratzinger a plusieurs fois prouvé qu’il avait une parfaite maîtrise de la langue latine… La façon de souligner qu’en italien (langue qu’il maîtrise tout aussi bien) il « risquait de faire des fautes » (alors qu’il en a fait une en latin et que tout le monde le sait) est aussi insolite - voire davantage - que le coup de la soutane blanche.

D’autre part il y a cette hallucinante affirmation que Peter Seewald met dans la bouche de Benoît XVI, que c’était la décision de celui-ci de virer Ettore Gotti Tedeschi de la direction de la banque du Vatican pour mettre à sa place Ernst von Freyberg. Or l’état de la question est que Gotti Tedeschi fut viré sans même que Benoît XVI fût au courant et qu’il n’eut pas d’autre choix que d’entériner une décision prise par d’autres. C’est ce que racontait alors avec force détails (et le témoignage d’un Mgr Gänswein tourneboulé) Andrea Tornielli qui affirme aujourd’hui exactement le contraire en rendant compte du livre de Peter Seewald…

Voir ici et .

Commentaires

  • Merci pour ces rappels; à force de lire des choses tout aussi mornes qu'ahurissantes, on finirait par douter aussi de Benoît XVI...

  • Très intéressant. Pardon cependant de devoir vous demander d'essayer d'être moins allusif car j'ai hélas grand besoin que l'on me mette les points sur les i pour bien comprendre les tenants et les aboutissants de la question. Amitiés.

  • Il est en effet étrange que quelqu'un qui ait déclaré se retirer et ne plus parler se décide à sortir un livre d'entretiens.

    On voit bien qu'il a pour but de faire taire les rumeurs et d'appuyer le pontificat actuel.

    Il faut se souvenir qu'il a promis obéissance à son successeur. Il est bien possible qu'il soit en résidence surveillée et qu'il agisse sur commande.

  • Vous croyez vraiment à cette théorie ? Avez vous un début piste qui vous permettrai d'avancer des choses aussi graves ou dites vous cela au hasard ? Merci

  • Selon moi ce qui est certain c'est que Benoît XVI de par sa position à l'époque et devant le niveau hiérarchique de monsieur Ettore Gotti Tedeschi, il ne pouvait ignorer tout ce qui touchait à cette personnalité. L'acte final de destitution n'a pu être pris en toute conscience que par lui et lui seul, car il prétend ne jamais avoir été sous pression, car si j’analyse son agir quand il dit « il ne faut pas abandonner quand on est sous pression » et que je l’applique à Ettore Gotti Tedeschi « s’il avait été sous pression il ne l’aurait pas destitué tout simplement » et « le témoignage d’un Mgr Gänswein tourneboulé » : « Gotti Tedeschi fut viré sans même que Benoît XVI fût au courant et qu’il n’eut pas d’autre choix que d’entériner une décision prise par d’autres » est pour moi totalement suspect.
    En fait il me semble qu’au Vatican depuis quelques années tous les coups sont permis, sauf dire la vérité. Pourquoi n'a t'on pas aussi montré les écrits originaux De sœur Lucie:" ce n'est qu'en juin 1943, suite à une grave maladie, que sœur Lucie rédige sur papier le troisième secret. Mis sous enveloppe et cachetée". Pourquoi?

  • @Bertrand
    Vous avez raison, mes mots ont dépassé ma pensée.
    En me relisant, on a l'impression que je mets en accusation le Pape. Mais rien ne permet de conclure cela.

    En fait, tous ces éléments pris séparément sont des faits ou des hypothèses et des éléments troublants.
    Il faut dire que ces extraits sonnent faux comme le montre Yves.

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