La Commission pour les relations avec le judaïsme a pondu une « réflexion théologique sur les rapports entre catholiques et juifs à l’occasion du 50e anniversaire de Nostra Ætate ».
Lors de la conférence de presse de présentation, il a été dit que « ce texte n’est pas un document du magistère, ni un enseignement doctrinal de l’Église catholique ». (Addendum: je vois que c'est écrit noir sur blanc dans la préface, que je n'avais pas lue.)
Ouf.
Néanmoins on souligne que c’est la « première réflexion théologique » de la Commission sur ce thème.
La « réflexion » est d’une extrême confusion, pour une raison simple, c’est qu’on veut laisser entendre que les juifs n’ont pas besoin du christianisme pour être sauvés (parce que les dons de Dieu sont sans repentance et il n’y a qu’une Alliance) mais qu’on n’ose pas le dire ouvertement.
Heureusement que le texte n’est pas un document du magistère, car, non content de rejeter implicitement une bonne partie des épîtres et des Actes des apôtres, il rejette explicitement les chapitres 8 et 9 de l’épître aux Hébreux…
Tout ce qu’on garde du Nouveau Testament sur le sujet, c’est (comme Nostra Æetate) certaines expressions du chapitre 11 de l’épître aux Romains.
Dans le raisonnement de la commission (et des dialoguistes de cette espèce depuis Vatican II), il y a deux erreurs, qui sont en amont de toute théologie : une erreur historique, et une erreur arboricole.
L’erreur historique est d’imaginer que le judaïsme d’aujourd’hui est celui de l’Ancien Testament. C’est complètement faux. Le judaïsme de l’Ancien Testament, de la Torah, des Rois, d’Esdras et de Néhémie, des Maccabées, est centré sur le Temple de Jérusalem et sur les sacrifices du Temple, sur le sacerdoce du Temple. Si le judaïsme d’aujourd’hui est le judaïsme authentique, alors il faut dire que le calvinisme est le christianisme authentique. C’est un fait historique avant d’être théologique qu’il y a eu une rupture du judaïsme, rupture opérée par le christianisme. Car le Temple a été remplacé par Jésus-Christ.
L’erreur arboricole est d’imaginer que lorsqu’on greffe un arbre on laisse subsister l’arbre franc. Si saint Paul a utilisé cette image de la greffe de l’olivier sauvage (les païens) sur l’olivier franc (le judaïsme), c’est pour souligner qu’il y a un nouvel arbre sur une souche ancienne. La souche est juive, l’arbre est chrétien. Magnifique image qui donne les éléments de continuité et de rupture. Mais l’arbre vivant est chrétien. Et pour que cet arbre existe, les branches de l’ancien arbre « ont été retranchées ». Une expression soigneusement censurée de toutes les citations de ce passage que font les dialoguistes…
Avant toute réflexion théologique, il est nécessaire d’en finir avec ces deux erreurs.
Commentaires
Bien vu !
En effet, le sacerdoce des souverains sacrificateurs, et les sacrifices du temple ont été remplacé par le sacerdoce et le sacrifice du Christ.
Relire et apprendre par cœur l'épître aux hébreux.
Commentaire utile.
Qu’avez-vous fait des juifs convertis ?
par Judith Cabaud
Il y a toujours eu des juifs convertis. Saint Paul, terrassé par la vision de ce Jésus qu’il persécutait, entreprit d’évangéliser les païens tout en expliquant aux juifs le grand dessein de Dieu depuis le péché originel : le Fils Rédempteur, l’accomplissement de la Loi, et enfin, que « ceux qui ont accueilli la foi, ce sont eux les fils d’Abraham ». Il n’est pas nécessaire de décrire le scandale provoqué en Israël par de tels propos, car, craignant la contagion de l’Apôtre zélé et la foi des premiers chrétiens, les Pharisiens répandirent des calomnies sur eux et sur leur divin Maître, calomnies qui restèrent sous-jacentes dans les écrits talmudiques tout au long du moyen âge.
À travers les siècles, cependant, l’Église accueillait les juifs, ces premiers invités au festin, sans réticences. Elle nous fit sentir que c’était un honneur de recevoir un juif en son sein et celui-ci rentrait tout de suite, avec facilité, dans l’intimité de la vie chrétienne. C’était normal : dans l’esprit, on se connaissait — depuis le temps qu’on célébrait la Pâque. Il y eut un simple transfert : les symboles devinrent des réalités, le sacrifice de l’agneau devint le sacrifice de la croix.
Le XIXe siècle fut particulièrement riche en juifs convertis : le Père Alphonse Ratisbonne¹ ; le Père Hermann Cohen : l’élève de Liszt ; les frères Lémann : abbés lyonnais ; le Père Libermann : fondateur des pères spiritains. Ceux du XXe siècle sont moins connus mais non moins remarquables comme Édith Stein ou le Grand Rabbin Zolli ; et des conversions de juifs furent nombreuses aux États-Unis et en Angleterre jusqu’en 1960.
En effet, il est révélateur de noter que ces conversions au catholicisme ont brusquement diminué² à partir du concile Vatican II qui se voulait précisément « pastoral », donc évangélique et évangélisateur.
Depuis son aggiornamento, que sont devenus ces juifs convertis dans une Église qui, au nom de la « liberté religieuse », n’enseigne plus toutes les nations ? Qu’est-ce qui pouvait pousser les Pères du concile à abandonner la mission des apôtres, pourtant si clairement exprimée dans les Évangiles ?
Pour en trouver des raisons, on peut se reporter à l’histoire de notre XXe siècle sanglant : les néo-païens nazis firent l’holocauste des juifs d’Europe centrale. À leur tour, les juifs de la Diaspora blâmèrent non pas les païens, mais la chrétienté et surtout l’Église catholique pour des crimes qu’elle n’avait pas commis. Cette façon de liquider l’estime due aux chrétiens, quoique injuste, fut parfaitement efficace. La propagande anticatholique des médias, encouragée par les mouvements sionistes, marxistes et francs-maçons, était non seulement répandue mais elle avait atteint l’Église elle-même en profondeur lorsque les prélats, au début du concile Vatican II, s’empressèrent de prononcer un mea culpa pour les péchés des autres, en y ajoutant, en prime, Galilée, l’Inquisition et diverses responsabilités dans les guerres de religion.
L’Église voulait seulement ouvrir ses portes mais on en profita pour lui dire qu’il fallait qu’elle change aussi ses papiers peints et ses meubles (pendant qu’elle y était). De là à retourner à ses origines (Luther y avait déjà pensé), il n’y avait qu’un pas, et le judaïsme prit tout naturellement l’allure de la religion de référence puisqu’elle avait été celle des membres de la Sainte Famille.
Alors, de quoi avions-nous l’air, nous, juifs convertis (particulièrement nombreux aux U.S.A. et en Angleterre) des années préconciliaires ? La société moderne décréta que nous avions des « problèmes », et les hommes d’Église, désormais férus de psychologie, de sociologie et de psychanalyse, chantèrent en chœur avec elle.
Pour les nouveaux théologiens, quelle nécessité pouvait pousser un juif à se convertir puisque celui-ci était déjà de la religion à laquelle l’Église tendait à revenir ?
Aujourd’hui, après avoir lutté avec eux-mêmes, après avoir, dans beaucoup de cas, tout quitté pour rejoindre l’Église, après avoir été traités de fous ou de traîtres par les leurs, les juifs convertis s’interrogent. Bannis par la communauté juive, ils se retrouvent comme des aberrations chez des catholiques qui rêvent de devenir ce qu’ils ne sont plus. Ne savent-ils pas que nous sommes bannis par ceux qui prétendent que Jésus fut un imposteur et un blasphémateur ?
A l’heure actuelle, les seuls catholiques qui nous offrent de partager leur propre abri de fortune contre les intempéries de la persécution sont les prêtres traditionalistes, ceux qui savent, comme les brebis de l’Évangile, reconnaître la voix du Bon Pasteur, et non pas ces malheureux moutons de Panurge qui suivent les loups ravisseurs.
Source : Itinéraires n° 323, mai 1988.
(¹) En fait, comme les frères Lemann, deux frères Ratisbonne se sont convertis : Marie-Théodore, suivi d’Alphonse. Marie-Théodore devint le supérieur des prêtres de Notre-Dame de Sion : on lui doit notamment une Histoire de Saint Bernard et de son siècle (en vente aux éditions Saint-Remi).
(²) Guy Rouvrais, converti du protestantisme luthérien, fait la même remarque à propos des protestants dans son livre Du protestantisme au catholicisme dans la tourmente conciliaire, paru aux éditions Sainte-Madeleine.
@ Dupont
Très bonne synthèse, on voit que vous avez de bonnes lectures et des neurones en état de réfléchir. Pouvez-vous proposer aux membres de la dite commission "théologique" des cours de mise à niveau? Ce sera dur et long, car leur niveau est en dessous de zéro et leur orgueil proche de l'infini.
@ dupont
Merci de ce nécessaire et instructif rappel!
Effectivement vous avez de bonnes lectures.
http://www.vatican.va/roman_curia/pontifical_councils/chrstuni/relations-jews-docs/rc_pc_chrstuni_doc_20151210_ebraismo-nostra-aetate_fr.html
Voici le lien de ce fameux texte - j'attends vos commentaires avec impatience, pour ma part, il est tout sauf clair.
J'aimerai, par ailleurs, connaître la réflexion des Juifs sur le dialogue avec les chrétiens et notamment sur Jésus, qui est quand même la pierre angulaire qu’ont rejetée les bâtisseurs.
Mais bon, peut être une légère contradiction dans les termes, allez savoir !
Dans tous les cas, maintenant que c'est plus clair....
Bon dialogue, à tous !
« ce texte n’est pas un document du magistère, ni un enseignement doctrinal de l’Église catholique ».
Très juste, c'est juste de l'intox manipulatrice. C'est comme le bobard de Concile Vatican II , pastoral et non doctrinal et on n'arrête pas de nous imposer les faux dogmes de Vatican II.
A nos chers frères aînés: méditez ce petit rappel "Caïn était le frère aîné d'Abel" . Qu'a -t-il fait, ce Caïn? Que 'tentez-vous depuis presque 2000 ans? Continuer l'erreur de vos ancêtres? Attendre l'avènement du faux messie? Vous perdez votre temps.
Et petite précision, je ne suis pas anti-sémite puisque j'adore un Juif, je vénère des Juifs et même des Juïves. Les convertis Juifs auraient beaucoup à vous apprendre si vous preniez la peine de réfléchir à leur démarche.
Hélas pour nous, quelques hiérarques catholiques tendent à imiter vos ancêtres, à vous imiter et à renier le Christ.
Bonjour,
Merci pour votre réponse.
J'ai eu l'occasion de lire 2 ouvrages l'histoire de M. Eugénio Zolli Grand Rabbin de Rome qui a vu notre Seigneur Jésus Christ dans sa synagogue et s'est converti et " La tradition Hébraïque dans l'eucharistie " de Judith Cabaud
Je vous en recommande vivement la lecture !
Sincèrement dans le Seigneur
Dupont
« L’erreur historique est d’imaginer que le judaïsme d’aujourd’hui est celui de l’Ancien Testament. C’est complètement faux….. ,car il était centré sur le Temple de Jérusalem et sur les sacrifices du Temple, sur le sacerdoce du Temple. »
Ainsi la première alliance n’est plus c’est un fait incontestable par votre argumentation qui est aussi mon raisonnement sur ce sujet depuis longtemps. Par ailleurs si la première alliance était toujours active les 613 commandements le seraient tout autant, or beaucoup d’entre eux sont devenus depuis longtemps impraticables à commencer par les plus importants qui sont dans le sacerdoce du temple. Or en Dieu tout subsiste dans le temps à commencer par ses Lois, cette notion d’impraticabilité de certaines Lois de Dieu en fonction du temps rende donc les lois de Dieu « relatives » aux temps et partant remettent en question l’absolue « justice » de Dieu ainsi que sa « fidélité » en tout. Saint Paul donne la réponse pour enlever toute « relativité » à Dieu : Galate 3-23. « Avant la venue de la foi, nous étions enfermés sous la garde de la Loi, en vue de la foi qui devait être révélée. Ainsi la Loi a été notre pédagogue pour nous conduire au Christ, afin que nous soyons justifiés par la foi.
Mais la foi étant venue nous ne sommes plus sous un pédagogue. Car on est tous fils de Dieu par la foi dans le Christ Jésus. Baptisé dans le Christ c’est être revêtu du Christ. Donc il n’y a plus : ni Juif, ni Grec, ni esclave, ni homme libre, ni homme, ni femme, car on est un dans le Christ Jésus. Si on est au Christ on est donc “descendance” d’Abraham héritier de la promesse. » Comme il dit, on est libéré de ce pédagogue qu’est la Loi et il rajoute dans Romain 10-3 : « Les juifs ont du zèle pour Dieu, mais de zèle mal éclairé.
Ne connaissant pas la justice de Dieu, et cherchant à établir leur propre justice, ils ne se sont pas soumis à la justice de Dieu. C’est qu’en effet la fin de la Loi, c’est le Christ pour la justification de tout homme qui croit. »
@ Daoudal.
Belles démonstrations.
Mais comment voulez vous que porte celle de l'arboriculture chez des gens qui confondent sagesse et érudition, bref qui n'ont jamais vu un arbre hors d'un pot ni ne se sont jamais baissé pour arracher la mauvaise herbe?
Quant à celle historique ne rétorqueront ils pas que c'est la destruction du temple par les Romains qui les empêchent de vivre de manière identique la même religion, adoptant un point de vue critique bien sûr?
Merci encore pour le travail que vous faites ici.
Ce document est politique (et encore pas forcément de bonne politique), mais sûrement pas théologique. A qui cela profite? S'interroger, c'est déjà avoir une petite réponse!
très bien le rappel de l'arbre pour un pape vert !
@jpm: vous avez de l' humour!
L'Eglise Catholique , tout comme l'Allemagne , vit dans la repentance et n'aura de cesse que d'attendre de recevoir ,de ses conciliations ,une infime lueur de reconnaissance qui Jamais ne viendra , car ces gens n'oublient rien, ni jamais .