Depuis quelques jours les commentateurs politiques sont en proie à un curieux fantasme : le rapprochement entre Le Pen et Sarkozy.
Il suffit pourtant d’écouter ce que dit Le Pen (et aussi ce que dit Sarkozy) pour comprendre que ce n’est (évidemment) que du vent médiatique.
A l’origine du fantasme sont certains propos de Le Pen comme celui qui a été mis en exergue hier par Le Figaro : « Je n’ai pas de contentieux personnel avec Sarkozy comme j’en avais avec Chirac. »
Ce n’est pas un scoop. Le Pen répète que Chirac le détestait sans qu’il sache pourquoi, alors que Sarkozy l’a reçu courtoisement au ministère de l’Intérieur pour discuter de questions techniques en matière électorale.
Quand Le Pen dit que sur certains sujets il peut y avoir des convergences avec Sarkozy, c’est également une évidence. Mais il ajoute qu’il est « en rupture nette » avec ceux qui sont européistes et immigrationnistes. Et tout éventuel « rapprochement » serait conditionné par « l’intérêt de notre pays et l’intérêt de notre mouvement ».
« Nous n’avons pas d’a priori, ni contre lui, ni contre personne », dit aussi Le Pen. On fait semblant de n’entendre que le début, et l’on oublie : « ni contre personne ». C’est pourtant un leitmotiv de Le Pen.
Ainsi hier soir nous annonce-t-on que « Le Pen ne s’interdit pas de contacter Sarkozy entre les deux tours ». Mais il ajoutait : « Je ne m’interdis pas de rencontrer qui que ce soit dans la politique française. Je dirais même que c’est l’essence de la vie publique. S’il veut entrer en communication avec moi, bien sûr. Ou lui, ou Mme Royal, ou M. Bayrou ou quiconque d’autre. »
Le fantasme a été relancé hier par la question que se pose à haute voix Brice Hortefeux, le bras droit de Sarkozy, sur la possibilité d’introduire une (petite) dose de proportionnelle dans les élections, alors que Sarkozy était le seul jusqu’ici à ne pas proposer une réforme de ce type. Voilà un signe en direction du Front national...
Mais Le Pen a fait remarquer que « ce sont les miettes qu’on donne en fin de campagne pour faire croire qu’on n’est pas ce qu’on est ». D’ailleurs on ne sait plus qui cherche à faire croire quoi à qui, puisque les porte-parole de Sarkozy ont fait savoir, depuis lors, qu’il s’agissait d’une réflexion personnelle de Brice Hortefeux qui n’engage absolument pas le candidat...
En prenant les thèmes du Front national, a de nouveau souligné Le Pen ce matin, Sarkozy n’envoie pas des signes de rapprochement avec le Front national, il « rend à celui-ci un grand service : il le dédiabolise. Les gens se disent : après tout, Le Pen dit cela depuis longtemps, c’est donc lui qui avait raison. Les électeurs préféreront le modèle à la copie. »
Et il a ajouté que lors de son meeting de Paris, dimanche après-midi au Palais des Sports, porte de Versailles, il allait exprimer de « sévères critiques » envers les autres candidats, notamment Sarkozy : « Les choses seront claires. »