L’apparition de la Vierge à saint Hyacinthe. Tableau peint par El Greco quelques années après la canonisation du dominicain polonais (1594). Cette apparition avait eu lieu en la vigile de l’Assomption au début de sa carrière apostolique (« Prends courage, Hyacinthe, mon fils, et sois joyeux, tout ce que tu demanderas en mon nom te sera accordé »), et saint Hyacinthe est mort le jour de l’Assomption (1257).
Dans l'église du couvent dominicain de Friesach (Carinthie), fondé par saint Hyacinthe qui passait par là parce que, venant de prononcer ses vœux à Rome, il avait été établi supérieur de la mission polonaise par saint Dominique.
Saint Hyacinthe porte le ciboire et la statue de la Vierge qu’il avait sauvés de Kiev incendiée par les Tatares, en 1240. Il avait pris le ciboire et il entendit : « Jacek, prends-tu le Fils et laisses-tu la Mère ? » La statue serait celle-ci, la « Mère de Dieu de Jacek », au couvent des dominicains de Cracovie :
Commentaires
Extravagant Greco ! Il est autant écrivain que Saint-Simon, Rimbaud ou Céline sont des peintres. On s'étonne qu'un peintre comme Francis Bacon lui ait préféré Vélasquez. Qu'on me corrige si je me trompe mais je ne crois pas que Bacon ait jamais parlé de Greco dans ses entretiens, alors que ses "portraits" d'Innocent X évoquent irrésistiblement non le sage Vélasquez mais le portrait halluciné (et hallucinant) du cardinal Fernando Niño de Guevara par Greco.
Dans le genre brindezingue, L’Apparition de la Vierge à saint Hyacinthe n'est pas mal non plus. Avec cet Enfant Jésus difforme, nu, écartelé, cette espèce de spectre sinistre à droite avec sa crosse et sa lanterne noire, enfin les mains du saint comme deux insectes vibratiles, on est presque chez Sade !
Je ne sais pas ce que ce tordu de Francis Bacon voulait montrer d'Innocent X, mais je suppose que c'est à peu près la même chose que ce que Greco voyait dans son glacial cardinal à lunettes noires, qui était inquisiteur général de l'Espagne à l'époque. L'Inquisition n'était sûrement pas aussi méchante qu'on l'a dit, mais cela fait un autre point commun entre Greco et Saint-Simon, gallican très convaincu et peu désireux de la voir (cette Inquisition) s'installer en France, qui fut ambassadeur en Espagne (départ de Paris le 23 octobre 1721, retour en France le 1er avril 1722) pour y superviser les mariages entre d'une part Louis XV et l'Infante Marie-Anne-Victoire (trois ans à l'époque, contre six pour Louis XV) et d'autre part Miss Montpensier, fille du Régent, et le prince des Asturies. La fille du Régent avait à peu près autant d'éducation que Zazie dans le métro.
L'ambassadeur fut parfait (son ambassade le ruina financièrement), mais l'avenir des mariages ne le fut pas, comme chacun le sait.
Pour être juste, rappelons que l'Innocent X de Vélasquez est très représentatif lui aussi de l'hostilité qu'un peintre peut avoir pour son modèle. On s'étonne que ce constructeur de prisons et pourfendeur d'hérésies supposées (le jansénisme) ait été assez respectueux de la liberté des artistes pour ne pas simplement brûler le tableau.
C'est tout à son honneur.