Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Dimanche après l’Ascension

Jésus venait d'achever son dernier repas, sa passion était proche, il allait quitter ses disciples et les priver de sa présence sensible ; car, par sa présence spirituelle , il devait rester avec eux tous jusqu'à la consommation des siècles : en ce moment suprême, il leur adressa donc un discours où il les exhortait à supporter les persécutions des impies, qu'il désignait sous le nom de monde ; il les avait, dit-il, tirés de ce monde pour en faire ses disciples, et ils devaient le savoir, c'était par la grâce de Dieu qu'ils étaient ce qu'ils étaient aujourd'hui; tandis que leurs propres vices les avaient faits ce qu'ils étaient auparavant. Ensuite il leur annonça clairement que les Juifs devaient être leurs persécuteurs et les siens, et par là il devait paraître avec évidence qu'ils faisaient partie de ce monde damnable, qui persécute les saints.

Quand il leur eut dit que les Juifs ne connaissaient pas Celui qui l'avait envoyé et que cependant ils haïssaient et le Fils et le Père, c'est-à-dire Celui qui avait été envoyé et Celui qui l'avait envoyé, il en vint à ce qui suit : « C'est afin que soit accomplie la parole qui est écrite dans leur loi : Ils m'ont haï sans sujet ». Ensuite il ajoute comme conséquence ces paroles que nous entreprenons d'expliquer aujourd'hui : « Mais quand sera venu le Paraclet que je vous enverrai de la part du Père, cet Esprit de vérité qui procède du Père rendra témoignage de moi ; et vous aussi vous en rendrez témoignage, parce que depuis le commencement vous êtes avec moi ».

Quel rapport ces paroles ont-elles avec ce qu'il vient de dire : « Or, maintenant ils ont vu, et ils me haïssent moi et mon Père ; mais c'est afin que soit accomplie la parole qui est écrite dans leur loi : Ils m'ont haï sans sujet » ? Quand le Paraclet est venu, cet Esprit de vérité a-t-il convaincu par un témoignage plus évident ceux qui avaient vu et qui le haïssaient ? Il a fait plus, en se manifestant à eux il a converti à la foi qui opère par la charité plusieurs de ceux qui avaient vu et qui le haïssaient encore.

Saint Augustin, traité 92 sur saint Jean (leçons des matines).

Ci-après le reste du traité (qui est un des plus brefs).

Pour le bien comprendre, rappelons-nous ce qui s'est passé. Au jour de la Pentecôte, le Saint-Esprit est descendu sur cent-vingt hommes réunis ensemble, et au nombre desquels se trouvaient tous les Apôtres : dès qu'ils furent remplis de cet Esprit, ils se mirent à parler toutes sortes de langues. Plusieurs de ceux qui avalent haï Notre Seigneur furent frappés d'un si grand miracle , surtout quand ils virent que Pierre prenait la parole et rendait à Jésus-Christ un si grand et si divin témoignage, qu'ils durent reconnaître comme ressuscité et vivant celui qu'ils avaient tué et qu'ils croyaient relégué pour toujours parmi les morts; le cœur touché de componction, ils se convertirent et ils reçurent le pardon du crime qu'ils avaient commis, en versant avec tant d'impiété et de cruauté un sang si précieux ; car le sang même qu'ils avaient répandu les avait rachetés. De fait, le sang de Jésus-Christ a été de telle manière répandu pour la rémission de tous les péchés, qu'il a pu effacer même le péché de ceux qui l'avaient répandu. C'est ce que Notre Seigneur avait en vue lorsqu'il disait : « Ils m'ont haï sans sujet ; mais quand sera venu le Paraclet, il rendra témoignage de moi ». C'est comme s'il eût dit : Ils m'ont haï et ils m'ont mis à mort, pendant qu'ils me voyaient parmi eux ; mais le Paraclet rendra de moi un tel témoignage, qu'il les obligera à croire en moi, même quand ils ne me verront plus.

« Et vous, ajoute Notre-Seigneur, vous rendrez aussi témoignage, parce que depuis le commencement vous êtes avec moi ». L'Esprit-Saint rendra témoignage, et vous aussi. Comme vous êtes avec moi depuis le commencement, vous pouvez annoncer ce que vous avez appris ; et si vous ne le faites pas dès à présent, c'est que la plénitude de l'Esprit-Saint n'est pas encore descendue en vous. « Il rendra donc témoignage de moi, et vous aussi vous rendrez témoignage ». Car la charité répandue dans vos cœurs par l'Esprit-Saint, qui vous sera donné, vous inspirera la confiance de rendre ce témoignage. Elle manquait à Pierre, celte confiance, lorsque, effrayé par la question d'une simple servante, il ne put rendre témoignage à la vérité ; sa terreur fut si grande qu'elle le poussa à renier trois fois son Maître, en dépit de la promesse qu'il lui avait faite. Or, cette crainte n'existe pas dans la charité ; au contraire, la charité parfaite met dehors la crainte.

Enfin, avant la passion de Notre-Seigneur , la crainte servile de Pierre fut interrogée par une servante : mais après la résurrection du Seigneur, son libre amour fut interrogé par le prince de la liberté. Aussi dans le premier cas fut-il troublé, tandis que, dans le second, il fut plein de calme ; c'est qu'alors il avait renié celui qu'il aimait et qu'en ce moment il aimait celui qu'il avait renié. Cependant cet amour lui-même resta encore faible et étroit, jusqu'à ce que le Saint-Esprit l’eut fortifié et dilaté. Mais quand, par une grâce plus abondante, cet Esprit eut été répandu en lui, son cœur si froid fut enflammé pour rendre témoignage à Jésus-Christ, et sa bouche qui , dans sa frayeur, avait trahi la vérité, fut ouverte, et bien que tous ceux sur lesquels le Saint-Esprit était descendu parlassent toutes sortes de langues, Pierre fut le plus prompt et le seul de tous à rendre, devant la foule des Juifs assemblés, un témoignage éclatant de Jésus-Christ, et à confondre ses meurtriers par la preuve de sa résurrection.

Si quelqu'un veut se donner la joie de voir un si doux et si saint spectacle, qu'il lise les Actes des Apôtres. Il y verra avec admiration Pierre prêchant Celui qu'il a eu la douleur de lui voir renier ; il y verra cette langue, après avoir passé de la crainte à la confiance, et de la servitude à la liberté, décider à confesser le Christ une foule immense de langues, dont une seule avait suffi à pousser la sienne à le renier. Que dire de plus ? En cet Apôtre apparaissait un tel éclat de la grâce, une plénitude si complète de l'Esprit-Saint ; de sa bouche sortaient des vérités si précieuses et d'un si grand poids, qu'il mit en la disposition de mourir pour Jésus-Christ cette multitude immense des ennemis et des meurtriers du Sauveur, dont il craignait d'être victime avec son Maître.

Voilà les effets que produisit l'Esprit-Saint envoyé alors, mais promis à l'avance. Voilà les grands et admirables bienfaits que Notre-Seigneur prévoyait lorsqu'il disait : « Et ils ont vu, et ils m'ont haï moi et mon Père, afin que s'accomplisse la parole qui a été écrite dans leur loi : Ils m'ont haï sans sujet ; mais quand sera venu le Paraclet, que je vous enverrai de la part de mon Père, cet Esprit de vérité, qui procède du Père, rendra témoignage de moi, et vous aussi vous en rendrez témoignage ». Car cet Esprit, en rendant témoignage et en faisant des Apôtres des témoins inébranlables, a enlevé toute crainte aux amis de Jésus-Christ et a changé en amour la haine de ses ennemis.

Commentaires

  • Saint Augustin commentant saint Jean a des fulgurances johanniques.
    Dans la suite à laquelle vous donnez accès en surbrillance, la traduction Clerus part en sucette (avant-dernier paragraphe) :
    "Si quelqu'un veut se donner la joie de voir un si doux et si saint spectacle, qu'il lise les Actes des Apôtres. Il y verra avec admiration Pierre prêchant Celui qu'il a eu la douleur de lui voir renier ; il y verra cette langue, après avoir passé de la crainte à la confiance, et de la servitude à la liberté, décider à confesser le Christ une foule immense de langues, dont une seule avait suffi à pousser la sienne à le renier."
    Dans la deuxième phrase, avant le point-virgule, "de le voir renier" serait plus clair si la douleur est celle du lecteur ; "de se voir renier", si c'est celle de saint Pierre.
    Surtout, on ne comprend pas, syntaxiquement, "décider à confesser le Christ une foule immense de langues". Il faut écrire "décidé à", ou à la rigueur "décider de confesser le Christ À une foule immenses de langues" pour que le texte ait du sens.

  • "décidée à", d'ailleurs, si saint Pierre est identifié à une langue.

  • Ce que je comprends de ce texte : le péché contre l'Esprit-Saint ne sera pas pardonné (parce qu'il rend aveugles ceux qui le commettent), mais il peut sans doute être guéri (par l'Esprit Saint Lui-même).

  • C’est la traduction Poujoulat et Raulx, Bar-le-Duc 1864-1872. « Lui » comme complément d’objet direct ne se dit plus, mais c’était assez courant autrefois. Ça m’est familier, sans que je puisse dire où, sans doute chez dom Guéranger.

    Pour le reste je ne vois pas le problème. Saint Augustin dit que dans les Actes des apôtres on voit la langue de saint Pierre décider une foule immense à confesser le Christ. La traduction de l’Institut des études augustiniennes (Berrouard) est plus littérale : qu’il voie cette langue… « convertir tant de langues ennemies à la confession du Christ ».

    Si quem delectat tam suaviter sanctum tale spectaculum intueri, Actus Apostolorum legat : ibi beatum Petrum quem negantem doluerat, stupeat praedicantem; ibi linguam illam videat ad fiduciam a diffidentia, et ad libertatem a servitute translatam, tot linguas inimicorum convertere ad Christi confessionem, quarum non valendo unam ferre, versa fuerat in negationem.

  • Oui, vous avez raison, je n'avais pas compris : saint Pierre décide la foule à confesser le Christ. La tournure de la phrase est un peu alambiquée.

Les commentaires sont fermés.