℟. Spléndida facta est fácies Móysi, dum respíceret in eum Dóminus: * Vidéntes senióres claritátem vultus ejus, admirántes timuérunt valde.
℣. Cumque descendísset de monte Sínai, portábat duas tábulas testimónii, ignórans quod cornúta esset fácies ejus ex consórtio sermónis Dei.
℟. Vidéntes senióres claritátem vultus ejus, admirántes timuérunt valde.
La face de Moïse était devenue rayonnante de lumière, depuis que le Seigneur l’avait regardé : Les anciens d’Israël voyant l’éclat de son visage, l’admirèrent et furent saisis de crainte.
Lorsque Moïse descendit de la montagne de Sinaï, il portait les deux tables du témoignage, et il ignorait que sa face était cornue depuis l’entretien du Seigneur avec lui.
Ce répons des matines reprend la fin du chapitre 34 de l’Exode, avec des expressions qui ne sont pas exactement celles de la Vulgate, sauf pour le mot « cornuta ».
C’est le fameux visage « cornu » de Moïse, qui a donné lieu en Occident à des images d’un Moïse portant réellement des cornes, le plus célèbre étant celui de Michel Ange.
Le texte du répons fait penser qu’il provient d’une vetus latina, mais les anciennes traductions latines sont faites sur la Septante. Or le Moïse de la Septante n’a pas de cornes :
Μωυσῆς οὐκ ᾔδει ὅτι δεδόξασται ἡ ὄψις τοῦ χρώματος τοῦ προσώπου αὐτοῦ ἐν τῷ λαλεῖν αὐτὸν αὐτῷ.
Moïse ne savait pas que l’aspect de la carnation de son visage était glorifié de par sa conversation avec lui (Dieu).
Les Septante avaient sans doute (correctement) interprété ainsi le texte hébreu qui avait le verbe qrn (qaran) : pousser des cornes, avoir des cornes. En tout cas c’est le texte qu’avait saint Jérôme, qui l’a traduit de façon littérale. Le verbe ne se trouve qu’une autre fois dans la Bible massorétique, dans le psaume 69, où il signifie bien « avoir des cornes ». D’autant que le même mot qrn, vocalisé qeren, veut dire… corne, et se trouve 76 fois dans la Bible, toujours avec ce sens, éventuellement au figuré (notamment dans les psaumes) dans le sens de « force ». Mais ici il ne s’agit pas de force, il s’agit de rayons de lumière, de la lumière divine qui avait transfiguré le visage de Moïse, obligé de porter un voile pour ne pas terrifier les Hébreux.
Ce cornuta est le seul emploi de l’adjectif cornutus dans la Vulgate (trois fois de suite pour parler du visage de Moïse) en dehors du livre de Daniel où il s’agit d’un bélier... cornu.