Accéssi, inquit, ad prophetíssam, et in útero accépit et péperit fílium. Quod María prophetíssa fúerit, ad quam próxime accéssit Isaías per prænotiónem spíritus, nemo contradíxerit, qui sit memor verbórum Maríæ, quæ prophético affláta spíritu elocúta est. Quid enim ait ? Magníficat ánima mea Dóminum: et exsultávit spíritus meus in Deo, salutári meo. Quia respéxit humilitátem ancíllæ suæ: ecce enim ex hoc beátam me dicent omnes generatiónes. Quod si ánimum accommodáveris univérsis ejus verbis; non útique per dissídium negáveris eam fuísse prophetíssam, quod Dómini Spíritus in eam supervénerit, et virtus Altíssimi obumbráverit ei.
« Je m’approchai de la prophétesse, dit-il. Elle conçut et enfanta un fils. » Que Marie soit cette prophétesse dont Isaïe s’approche par une prescience spirituelle, nul ne le niera s’il a présentes à la mémoire les paroles que Marie prononça sous une inspiration prophétique. Que dit-elle en effet ? « Mon âme exalte le Seigneur et mon esprit exulte en Dieu mon Sauveur : il s’est penché sur son humble servante, et désormais tous les âges me diront bienheureuse. » Si vous accordez votre âme à toutes ses paroles, vous ne nierez assurément point, par discorde, qu’elle ait été prophétesse, celle sur qui « l’Esprit du Seigneur est venu et que la puissance du Très-Haut a prise sous son ombre ».
Exposé de saint Basile sur le prophète Isaïe, 8.
La phrase commentée par saint Basile se trouve au début du chapitre 8 d’Isaïe :
Et le Seigneur me dit : Prends-toi un grand livre, et écris dedans avec un stylet d’homme : Enlève promptement les dépouilles, Pille vite. Et je pris des témoins fidèles, le prêtre Urie, et Zacharie fils de Barachie ; et je m’approchai de la prophétesse, et elle conçut et enfanta un fils. Alors le Seigneur me dit : Donne-lui pour nom : Hâte-toi de saisir les dépouilles, Pille promptement ; car avant que l’enfant sache nommer son père et sa mère, la puissance de Damas et les dépouilles de Samarie seront emportées devant le roi des Assyriens.
L’interprétation de saint Basile me rappelle que dans l’évangile de saint Matthieu Jésus dit : « depuis le sang d’Abel le juste jusqu'au sang de Zacharie fils de Barachie, que vous avez assassiné entre le sanctuaire et l'autel ». Cette mention du « fils de Barachie » a toujours mis les exégètes dans l’embarras. A priori il s’agit du prêtre Zacharie tué par le roi Joas à la fin du livre des Chroniques, donc le dernier juste assassiné dans la Bible hébraïque, faisant pendant à Abel qui avait été le premier. Mais ce Zacharie est fils de Joïada, pas de Barachie. Comme le parallèle en saint Luc ne spécifie pas « fils de Barachie », certains modernes ont pensé que c’était une erreur, d’un copiste qui voulait faire le malin en précisant de quel Zacharie il s’agissait, et qui s’est planté. Origène quant à lui faisait écho à une tradition selon laquelle il s’agissait de Zacharie le père de saint Jean Baptiste, tué – donc récemment – (d’Abel à Zacharie : du commencement du monde à maintenant) pour avoir prédit la venue du Sauveur.
Et si Jésus avait parlé de « Zacharie fils de Barachie » pour attirer l’attention sur les mots qui suivent immédiatement dans Isaïe ? Car c’est tout le paragraphe qui prophétise le Christ. C’est lui l’auteur du Grand Livre, c’est lui aussi le stylet d’homme, c’est lui qui par sa seule Incarnation, avant de pouvoir parler, avait déjà saisi promptement les dépouilles du diable pour les apporter triomphalement devant le Roi du Ciel.
« Et commençant par Moïse et par tous les prophètes, il leur expliquait, dans toutes les Ecritures, ce qui le concernait » (Luc 24,27).
(On remarque aussi que la plupart des traducteurs ont buté sur l’expression « en stylet d’homme ». Alors que c’est bien ce que dit le texte, tant hébreu que grec ou latin, ils disent : « en caractères lisibles », ou « d’une manière intelligible ». De façon à ce qu’on ne comprenne pas…)
Commentaires
Du très bon Daoudal ce matin, merci!
Pour les interprétations de Mt 23,35, ce ne sont en fait pas "certains modernes" qui ont proposé la solution de l'erreur: je me permets de renvoyer à Calmet (p 503 fin ss), qui commente, avec sa concision habituelle, en ... 3 pages pleines! Les noms des exégètes sont en abrégé dans les notes de bas de pages: préparez la loupe...
j'ai oublié le lien:
http://jesusmarie.free.fr/bible_calmet_matthieu.pdf
En vous relisant, je me rends compte que l'invention des modernes est la suppression de tout complément du nom à Zac
harie. C'est donc différent des solutions des Pères.
Voici quelques citations prouvant qu'il s'agit de Zacharie, père de Jean-Baptiste.
GAUME (Biographies évangéliques) : Notre Seigneur dit aux juifs qu’ils feront tomber sur eux tout le sang innocent qui a été versé depuis celui d’Abel le Juste, jusqu’à celui de Zacharie fils de Barachie, mis à mort entre le vestibule et l’autel. On voit que Notre Seigneur a voulu indiquer le premier et le dernier juste massacré. Or si, comme le prétend[ent certains, il avait parlé du prophète Zacharie, ou bien du Zacharie mis à mort par Joas], il en résulterait que tout le sang versé depuis cette époque ne serait pas retombé sur les juifs. D’où viendrait cette exception, et où en est la preuve ?
De plus, la manière dont s’exprime Notre Seigneur semble indiquer clairement qu’il s’agit de Zacharie père de saint Jean-Baptiste. Il ne dit pas : Le sang de Zacharie que vos pères ont tué ; ce qu’il aurait fait, s’il avait voulu parler d’un meurtre accompli depuis plusieurs siècles. Mais il dit : « Le sang de Zacharie que vous avez tué », ce qui désigne un fait récent, un fait actuel dont ses auditeurs avaient été les auteurs, les complices et les témoins.
Ce qui paraît avoir induit [certains exégètes] en erreur, c’est l’ignorance d’un détail très précis, qui nous a été conservé par un des plus anciens Pères, saint Hippolyte, martyrisé sous Alexandre Sévère. Cet évêque, d’une grande autorité, nous apprend que le père de saint Zacharie, père de saint Jean-Baptiste, s’appelait Barachie (Nicéphore Callixte : Histoire ecclésiastique, II, 3). Au témoignage de saint Hippolyte se joint celui non moins explicite de saint Épiphane (De la vie et de la mort des prophètes, chap. 21), fort instruit de l’histoire de la Judée, son pays natal.
SCHNEIDER : « Zacharie fils de Barachie » était le père de saint Jean-Baptiste, selon Origène (chaînon suivant du corps du texte de la Chaîne d’or sur Matthieu XXIII, 35) et d’autres auteurs patristiques (corps du texte de la Chaîne d’or sur Luc XI, 51). De plus, un apocryphe de la deuxième moitié du IIe siècle (Protévangile de Jacques, XXIII, 1 - 3) décrit l’assassinat, dans le temple, du père de Jean-Baptiste. En outre, le calendrier liturgique copte donne à Zacharie le titre de « fils du prêtre Barachie ».
MAISTRE (Hommes illustres, t. I, p. 43) : Ce sentiment était commun dans l’Église orientale et a été suivi notamment par saint Basile, par saint Grégoire de Nysse, par saint Cyrille d’Alexandrie, par Théodoret, etc. […].
Les Grecs honorent la mémoire de Zacharie le 5 septembre et les Latins le 5 novembre.
GAUME (Biographies évangéliques) : [Le père de Jean-Baptiste] est inscrit au nombre des saints. Le martyrologe romain fixe sa fête au 5 novembre, conformément au témoignage d’Origèneì, de saint Grégoire de Nysse, de saint Pierre d’Alexandrie et d’autres encore. Sa tête se conserve à Rome dans la basilique de Latran.
S. THOMAS D’AQUIN (Sur S. Matthieu, XXIII, 35 ) : Origène (Commentaires sur S. Matthieu, ancienne interprétation, § 25) dit qu’il fut tué à cause du Christ, car, dans le temple, il y avait un endroit pour les vierges et, alors que la Vierge Marie était assise à l’endroit des vierges, les juifs voulurent l’expulser de cet endroit, ce à quoi s’opposa Zacharie en la défendant, et c’est pour cela qu’il fut tué.
GUÉRIN (t. VII, p. 272) : Quand Joseph et Marie se présentèrent à l’entrée du temple, 40 jours après la naissance de Jésus, afin de satisfaire aux prescriptions de la loi, le prêtre Zacharie était là pour les recevoir, les introduire et leur servir d’intermédiaire ; et Élisabeth les accompagnait, portant le saint précurseur. [Marie] se plaça dans le temple du côté assigné aux vierges. Les prêtres voulurent l’en éloigner ; mais Zacharie s’y opposa, en soutenant que son enfantement n’avait pas porté atteinte à sa virginité, et par là il s’attira leur haine et plus tard leur vengeance (saint Basile : Homélie sur la génération sainte du Christ, § 5).
GAUME (Biographies évangéliques) : Une autre preuve que c’est bien Zacharie, père de saint Jean-Baptiste, qui […] fut mis à mort entre le temple et l’autel, se trouve dans ce passage de Tertullien (Remède contre les scorpions, chap. 8) : « Zacharie fut immolé entre le temple et l’autel, comme en font foi les traces de son sang empreintes sur les murailles ». Il est de toute évidence qu’il s’agit ici, non du premier temple où Joas fit mettre à mort le grand prêtre Joiada, puisque ce temple avait été détruit par Nabuchodonosor, mais du second temple rebâti par Zorobabel, au retour de la captivité, et restauré par Hérode.
GUÉRIN (t. VII, p. 274) : Les prêtres, saisis de crainte, sortirent de l’enceinte et annoncèrent au peuple que Zacharie avait été mis à mort. À cette nouvelle, toutes les classes du peuple prirent le deuil et on pleura pendant trois jours et trois nuits. Après ces trois jours, les prêtres tinrent conseil pour lui donner un successeur. Le sort tomba sur Siméon.
Merci , c'est très convaincant. Et cela prouve une fois de plus que les "modernes " sont des insensés, imbus d'eux-mêmes et ne voulant surtout pas se conformer à l'opinion commune issue de la tradition des Pères. Les "modernes" sont en réalité des vieux gâteux.
Une chose est certaine, ce Zacharie n'est pas le fils de Barachie Obama, bien que celui-ci fût plutôt branché Ancien Testament revu par le Talmud que par Notre Seigneur.
"De plus, la manière dont s’exprime Notre Seigneur semble indiquer clairement qu’il s’agit de Zacharie père de saint Jean-Baptiste. Il ne dit pas : Le sang de Zacharie que vos pères ont tué ; ce qu’il aurait fait, s’il avait voulu parler d’un meurtre accompli depuis plusieurs siècles. Mais il dit : « Le sang de Zacharie que vous avez tué », ce qui désigne un fait récent, un fait actuel dont ses auditeurs avaient été les auteurs, les complices et les témoins."
Clairement ? Vous allez un peu loin... Dieu et la chronologie ! Je ne sais plus si c'est sainte Thérèse d'Avila qui disait : "Dieu est aveugle et ne sait pas compter."