Bible de Saint-Hubert, fin du XIe siècle (Bruxelles).
En octobre-novembre et entre l’Epiphanie et le carême, l’hymne des matines du dimanche commence en célébrant le premier jour celui de la création du monde, qui est aussi celui de la Résurrection. Si chaque dimanche rappelle en effet le premier jour de la création, ce n’est jamais avec autant d’à-propos qu’en ce dimanche de la Septuagésime.
Aujourd’hui en effet est le premier jour liturgique de la Création. In principio creavit Deus caelum et terram. Aujourd’hui aux matines on commence à lire le livre de la Genèse.
Y fait aussitôt écho le premier répons :
℟. In princípio creávit Deus cælum, et terram, et fecit in ea hóminem, * Ad imáginem et similitúdinem suam.
℣. Formávit ígitur Deus hóminem de limo terræ, et inspirávit in fáciem ejus spiráculum.
℟. Ad imáginem et similitúdinem suam.
Le répons va au plus important : la création de l’homme à l’image de Dieu. Mais l’homme va vite se séparer du Principe. Et dès ce dimanche la liturgie commémore aussi la chute. Malheureusement, les matines du dimanche ayant été mutilées en 1960, on passe brutalement de la création au meurtre d’Abel par Caïn dans le dernier répons. Les matines d’avant (qui sont aussi celles du bréviaire monastique), parcouraient toute cette tragique histoire, la seule qui fut véritablement tragique pour l’humanité. Dans la lecture du deuxième nocturne, saint Augustin, par quelques phrases de son Enchiridion, donnait l’essentiel de l’enseignement de l’Eglise sur le péché originel et ses conséquences. Dans la lecture du troisième nocturne, saint Grégoire, commentant l’évangile du jour (l’homme qui envoie des ouvriers à sa vigne), remarquait que cette vigne, qui est l’Eglise, « a poussé autant de sarments qu’elle a produit de saints, depuis le juste Abel jusqu’au dernier élu qui doit naître à la fin du monde » (c’est encore la dernière phrase du très bref extrait qui reste aux matines romaines version 1960). Abel est déjà l’Eglise parce qu’il a offert à Dieu un agneau premier né en sacrifice, préfiguration du Sacrifice de l’Agneau, et c’est pourquoi il est tué, « dehors », par son frère.
Ce jour commémore déjà, aussi, la chute, parce qu’il marque les « 70 » jours avant Pâques. Ces 70 jours renvoient aux 70 années d’exil des Hébreux à Babylone. Ils sont les 70 jours pénitentiels au bout desquels nous pourrons retourner à Jérusalem pour célébrer la Pâque.
Début du premier livre des Antiquités judaïques de Flavius Josèphe (antiquités qui commencent comme il se doit par la Création), fin du XIe siècle à l’abbaye de Stavelot (Bruxelles).