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Saints Prote et Hyacinthe

Le tombeau de ces martyrs fut découvert le Vendredi Saint 1845, et « la découverte des ossements calcinés d'Hyacinthe en sa tombe primitive vint faire époque dans l'histoire des cimetières souterrains et de l'archéologie chrétienne », comme dit L’Année liturgique. Les reliques de saint Prote avaient été portées à Rome au VIIIe ou au IXe siècle, mais on découvrit aussi sa pierre tombale, et la raison pour laquelle les reliques de saint Hyacinthe étaient restées sur place. Voir ici.

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Les oraisons propres de la messe viennent du Missel de Braga, ce qui n’est pas banal.

Ci-dessous l’histoire rocambolesque de Prote et Hyacinthe dans La Légende dorée. On remarquera que le récit est curieusement presque entièrement consacré à Eugénie et non aux deux frères. Le bréviaire est beaucoup plus sobre :

Les deux frères Prote et Hyacinthe, eunuques de la bienheureuse Vierge Eugénie furent baptisés en même temps qu’elle par l’Évêque Hélénus. S’étant adonnés à l’étude des saintes lettres, ils menèrent durant quelque temps, dans un monastère d’Egypte, une vie merveilleusement humble et sainte. Dans la suite, sous le règne de Gallien, ayant accompagné la pieuse vierge Eugénie à Rome, ils furent arrêtés parce qu’ils faisaient profession de la foi chrétienne. Comme on ne put obtenir d’eux, par aucun moyen, qu’ils abandonnassent la religion chrétienne et qu’ils adorassent les faux dieux, ils furent cruellement flagellés et tombèrent sous les coups de la hache, le trois des ides de septembre.

 

*

Prote et Hyacinthe furent, en raison de leur illustre noblesse chez les Romains, attachés à la maison de la fille de Philippe, nommée Eugénie, et ses émules dans l’étude de la philosophie. Le sénat avait confié à ce Philippe la préfecture d'Alexandrie où il conduisit avec lui Claudia, sa femme, Avitus et Sergius, ses fils, et Eugénie, sa fille. Or, Eugénie avait atteint la perfection dans la science des lettres et des arts libéraux ; Prote et Hyacinthe, qui avaient étudié avec elle, possédaient aussi toutes les sciences dans le plus haut degré. Parvenue à l’âge de quinze ans Eugénie fut demandée en mariage par Aquilin, fils du consul Aquilin. Eugénie lui dit : « Quand on doit faire choix d'un mari, il faut moins s'attacher à la naissance qu'à la bonne conduite. » Les livres qui renferment la doctrine de saint Paul lui étant tombés entre les mains, elle commença à devenir chrétienne au fond du cœur.

II était à cette époque permis aux chrétiens d'habiter dans les environs d'Alexandrie, et il arriva que Eugénie, allant à une maison de campagne comme pour se délasser, entendit les chrétiens qui chantaient : « Omnes dii gentium daemonia, Dominus autem caelos fecit (Ps. XCV). Tous les dieux des nations sont des démons, mais le Seigneur est le créateur des cieux. » Alors elle dit aux jeunes Prote et Hyacinthe qui avaient étudié avec elle : « Nous nous sommes livrés à une étude scrupuleuse des syllogismes des philosophes, mais les arguments d'Aristote, les idées de Platon, les avis de Socrate, en un mot, les chants des poètes, les maximes des orateurs et des philosophes sont effacés par cette sentence ; je ne dois qu'à une puissance usurpée le titre de votre maîtresse, mais la science m’a faite votre sœur, soyons donc frères et suivons J.-C. »

Cette résolution leur plaît ; elle prend alors des habits d'homme, et vient au monastère dont le chef Hélénus ne permettait l’entrée à aucune femme. Cet Hélénus, dans une discussion avec un hérétique, n'ayant pu détruire la force des arguments qu'on lui opposait, fit allumer un grand feu afin que celui qui ne serait pas brûlé fût reconnu comme ayant la croyance véritable. Ce qui fut fait ; Hélénus entra le premier dans le feu d'où il sortit sain et entier ; mais l’hérétique ne voulant pas y entrer fut chassé par tous. Or, Eugénie s'étant présentée à Hélénus et ayant dit qu'elle était un homme : « Tu as raison, lui répondit Hélénus, de te dire homme, car bien que tu sois une femme, tu te comportes comme un homme. »

Dieu en effet lui avait révélé son sexe. Elle reçut donc de ses mains, avec Prote et Hyacinthe, l’habit monastique et se fit appeler frère Eugène. Quand le père et la mère d'Eugénie virent son char revenir vide à la maison, ils en furent contristés et firent partout chercher leur fille, sans pouvoir la trouver. Ils interrogent des devins pour savoir ce qu'elle était devenue ; ceux-ci leur répondent qu'elle est transportée par les dieux parmi les astres. En conséquence son père fit élever une statue à sa fille qu'il commanda à tous d'adorer. Quant à Eugénie, elle persévéra avec ses compagnons dans la crainte de Dieu, et fut choisie pour gouverner la communauté après la mort du supérieur.

Il se trouvait alors à Alexandrie une matrone riche et noble du nom de Mélancie que sainte Eugénie avait délivrée de la fièvre quarte en lui faisant des onctions avec de l’huile au nom de J.-C. Pour cette raison, Mélanie envoya beaucoup de présents à Eugénie qui ne les accepta point. Or, cette matrone, dans la conviction que frère Eugène était un homme, lui faisait de trop fréquentes visites. En voyant sa bonne grâce, sa jeunesse et la beauté de son extérieur, elle brûla d'amour pour lui et se tourmenta l’esprit pour trouver le moyen d'avoir commerce ensemble. Alors feignant une maladie, elle envoya le prier de venir chez elle pour la voir. Quand il fut arrivé, elle lui déclara comment elle était éprise d'amour pour lui, elle lui exposa ses désirs et le pria d'avoir commerce avec elle.

Aussitôt elle le saisit, l’embrasse, le baise et l’exhorte à commettre le crime. Frère Eugène, rempli d'horreur de ces avances, lui dit : « C'est à juste titre que tu portes le nom de Mélancie : tu es remplie de noirceur et de perfidie ; tu es une noire et obscure fille des ténèbres, une amie du diable, un foyer de débauche, une sœur d'angoisses sans fin et une fille de mort éternelle ». Mélancie se voyant déçue, dans la crainte qu'Eugène ne publiât le crime, voulut le découvrir la première et se mit à crier qu'Eugène a voulu la violer. Elle alla trouver le préfet Philippe et elle porta plainte en ces termes : « Un jeune homme perfide qui se dit chrétien est venu chez moi pour me guérir ; il entre, se jette sur moi et veut me faire violence : si je n'avais été délivrée par le moyen d'une servante qui était dans l’intérieur de ma chambre, il m’eût fait partager sa débauche. » Le préfet, à ce récit, fut enflammé de colère, et avait envoyé une multitude d'appariteurs, il fit prendre Eugène et les autres serviteurs de J.-C., qu'on avait chargés de chaînes : il fixa un jour où ils devaient tous être livrés aux morsures des bêtes. Puis les ayant fait venir devant lui, il dit à Eugénie : « Dis-moi, infâme scélérat, si votre Christ vous a enseigné, pour doctrine, de vous livrer à la corruption et d'oser attenter avec une impudente rage à la vertu des matrones? » Eugénie, qui conservait la tête baissée pour ne pas être reconnue, répondit : « Notre Seigneur a enseigné la chasteté et a promis la vie éternelle à ceux qui gardent la virginité. Nous pouvons montrer que cette Mélancie commet un faux témoignage ; mais il vaut mieux que nous souffrions, plutôt qu'elle soit punie après avoir été convaincue ; nous perdrions alors le fruit de notre patience. Toutefois qu'elle amène la servante qu'elle dit avoir été témoin de notre crime afin que par ses aveux les mensonges puissent être réfutés. » Cette femme fut amenée, et comme elle avait été endoctrinée par sa maîtresse, elle ne cessait de prétendre contre Eugène qu'il avait voulu violer sa dame. Tous les gens de la maison, qui avaient été également corrompus, attestaient qu'il en était ainsi ; alors Eugénie dit : « Le temps de se taire est passé et le temps de parler est arrivé : je ne veux pas qu'une impudique charge d'un crime les serviteurs de J.-C. et que la fausseté soit glorifiée. Or, afin que la vérité l’emporte et que la sagesse triomphe de la malice, je démontrerai la vérité sans être mue par la vanité mais par la gloire de Dieu. » En disant ces mots, elle déchira sa tunique depuis sa tête jusqu'à la ceinture, et alors on vit qu'elle était une femme, puis elle dit au préfet : « Tu es mon père, Claudia est ma mère; ces deux jeunes gens qui sont assis avec toi, Avitus et Sergius, ce sont mes frères ; je suis Eugénie ta fille ; ces deux-ci, c'est Prote et Hyacinthe. » A ces mots, le père qui commençait à reconnaître sa fille se jeta dans ses bras pour l’embrasser ainsi que la mère, en versant un torrent de larmes.

Eugénie est aussitôt revêtue de ses habits couverts d'or et portée aux nues. Le feu du ciel tomba sur Mélancie et la consuma avec les siens. Ce fut ainsi qu'Eugénie convertit à la foi de J.-C. son père, sa mère, ses frères et toute sa famille ; de telle sorte que le père, ayant été cassé de sa dignité, fut ordonné évêque par les chrétiens, et fut tué par les infidèles après avoir persévéré dans le bien.

Claudia retourna à Rome avec ses deux fils et Eugénie et ils y convertirent beaucoup de personnes à J.-C. Or, Eugénie, par l’ordre de l’empereur, fut attachée à une grosse pierre et précipitée dans le Tibre ; mais la pierre s'étant brisée, Eugénie marchait saine et sauve sur les eaux. Alors elle est jetée dans une fournaise ardente ; mais la fournaise s'éteignit et devenait pour la martyre un lieu de rafraîchissement. Ensuite elle est renfermée dans un cachot obscur, mais une lumière toute resplendissante rayonnait pour elle ; et après avoir été laissée dix jours sans nourriture, le Sauveur lui apparut et lui dit eu lui présentant un pain très blanc : « Reçois cette nourriture de ma main ; je suis ton Sauveur, que tu as aimé de toute l’étendue de ton esprit; le jour que je suis descendu sur la terre, je te prendrai moi-même. » En effet, au jour de la naissance du Seigneur, un bourreau est envoyé lui couper la tête. Elle apparut ensuite à sa mère et lui prédit qu'elle la suivrait le dimanche après. Quand arriva le dimanche, Claudia s'étant mise en prières rendit l’esprit.

Prote et Hyacinthe ayant été traînés au temple des idoles, brisèrent la statue en faisant une prière, et comme ils ne voulaient pas sacrifier, ils accomplirent dans la suite leur martyre en ayant la tête coupée. Or, ils pâtirent sous Valérien et Gallien, vers l’an du Seigneur 256.

Commentaires

  • En effet, Eugénie est le personnage le plus intéressant du trio : convertie par la lecture de saint Paul, et l'audition des Psaumes !
    Toutes sortes de légendes se sont greffées sur elle, et le déshabillage d'Eugénie est l'objet d'un chapiteau roman à Vézelay. Mais en France seules Nîmes, et Corseul en Bretagne, lui ont conservé une chapelle, semble-t-il.

  • Et aussi à Biarritz, Plouha (XVe s Côtes d'Armor), Montbrison (Loire) et probablement d'autres.
    Les 2 premières ayant bénéficié de largesses de l'impératrice Eugenia de Montijo, épouse de Napoléon III

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