Graduel d'Albi, XIe siècle.
L’antienne d’inroït de cette fête reprend une phrase des Actes des apôtres, mais avec deux modifications importantes.
Actes :
Viri Galilaei, quid statis aspiciéntes in caelum ? Hic Jesus qui assúmptus est a vobis in cælum, sic véniet quemádmodum vidístis eum eúntem in caelum.
Introït :
Viri Galilæi, quid admirámini aspiciéntes in cælum ? Alleluia ! Quemádmodum vidístis eum ascendéntem in cælum, ita véniet, alléluia, alléluia, alléluia !
On voit notamment que « statis » (pourquoi restez-vous là debout) est devenu « admiramini » (pourquoi vous étonnez-vous en admirant ce que vous voyez), « euntem », le Christ « qui va », est remplacé par « ascendentem », le Christ « qui monte » : ce qui est plus explicite et plus imagé et donne ainsi plus de corps au texte dans la perspective de son expression musicale. D’autre part cet ascendentem n’est pas à la même place que euntem. Je laisse la parole au moine qui commentait le texte et le chant sur le site de l’Homme nouveau :
La modification du texte la plus expressive est certainement la place faite à ita véniet, mis en rejet intentionnellement à la fin du texte, alors que l'expression est située au milieu de la phrase dans le récit des Actes. L'intention du compositeur, rendue explicite par le traitement mélodique de ce passage, était de mettre en valeur le second avènement du Christ à la fin des temps, et par là d'orienter le regard des disciples du Christ vers cette venue plénière du Messie qu'attend l'Église avec tout son amour. On a là, s'il ne s'agit pas d'une version plus ancienne du texte sacré, un exemple assez typique de la liberté et du bonheur avec lesquels les anciens citaient l'Écriture.
Retenons la note admirative de ce texte, qui colore toute cette célébration de l'Ascension ; et le thème de l'attente qui caractérise toute l'histoire de l'Humanité en face du Messie : il est vraiment Celui qui vient. Durant trois années seulement, le temps de sa vie publique, il a été présent aux hommes de son époque. Mais soit avant, soit après ces années privilégiées mais si courtes à l'échelle de la grande histoire, il demeure celui qu'on attend. Admiration et vigilance sont donc les maîtres-mots de cet introït, traduisant les deux attitudes du chrétien sevré de la présence visible du Sauveur.
Viri Galilǽi, quid admirámini aspiciéntes in cælum ? allelúia : quemádmodum vidístis eum ascendéntem in cælum, ita véniet, allelúia, allelúia, allelúia.
Omnes gentes, pláudite mánibus : iubiláte Deo in voce exsultatiónis.
Hommes de Galilée, pourquoi vous étonnez-vous en regardant le ciel ? Alléluia. De la même manière que vous l’avez vu monter au ciel, il reviendra, alléluia, alléluia, alléluia.
Nations, frappez toutes des mains ; célébrez Dieu par des cris d’allégresse.