Séquence du bienheureux Notker (840-912), abbaye de Saint-Gall. Traduction de dom Guéranger.
Eia, recolamus
Laudibus piis digna
Hujus diei carmina,
In qua nobis lux oritur
Gratissima.
Oui, reprenons nos cantiques pieux, et qu’ils soient dignes de ce jour où sur nous se lève la plus chère lumière.
Noctis inter nebulosa,
Pereunt nostri criminis
Umbracula.
Au milieu des ténèbres de la nuit, s’effacent les ombres de nos péchés.
Hodie saeculo Maris Stella
Est enixa
Novae salutis gaudia.
Aujourd’hui, l’Étoile de la mer enfante au monde les joies d’un salut nouveau :
Quem tremunt barathra,
Mors cruenta pavet ipsa,
A quo peribit mortua.
Celui qui fait frémir l’enfer qui frappe de terreur l’affreuse mort ; car elle doit périr sous ses coups.
Gemit capta
Pestis antiqua
Coluber lividus perdit spolia.
L’antique peste gémit captive ; le dragon livide a perdu ses dépouilles.
Homo lapsus,
Ovis abducta,
Revocatur ad aeterna
Gaudia.
L’homme tombé, brebis égarée, est ramené aux joies éternelles.
Gaudent in hoc die agmina
Angelorum caelestia,
Quia erat drachma décima
Perdita,
Et est inventa.
Jour d’allégresse pour les célestes bataillons des Anges ; Car elle était perdue, la dixième drachme, et la voilà retrouvée.
O proles Nimium beata,
Qua redempta
Est natura.
Deus, qui creavit omnia,
Nascitur ex femina.
O heureux Enfant ! qui rachètes la nature humaine ! Le Dieu qui a tout créé, prend naissance de la femme.
Mirabilis natura,
Mirifice induta,
Assumens quod non erat,
Manens quod erat.
Sa nature admirable se revêt de chair par un merveilleux prodige ; elle prend ce qu’elle n’était pas ; elle demeure ce qu’elle était.
Induitur natura
Divinitas humana :
Quis audivit talia,
Dic, rogo, facta ?
La divinité se couvre de la nature humaine ; dites-moi si jamais vous ouïtes un tel prodige.
Quaerere venerat
Pastor pius quod perierat
Induit galeam,
Certat ut miles armatura.
Le bon Pasteur venait chercher ce qui avait péri. Il prend le casque, il combat armé comme un soldat.
Prostratus
In sua propria
Ruit hostis spicula.
Terrassé, l’ennemi tombe sur son propre dard.
Auferuntur tela
In quibus fidebat,
Divisa sunt illius spolia,
Capta praeda sua.
On lui arrache ses armes dans lesquelles il se confiait ; ses dépouilles sont livrées en partage, sa proie lui est ravie.
Christi pugna
Fortissima
Salus nostra est vera,
C’est la forte bataille du Christ, c’est notre salut véritable,
Qui nos suam
Ad patriam
Duxit post victoriam.
Du Christ qui, après sa victoire, nous mène en sa patrie :
In qua sibi laus est
Aeterna. Amen.
Là soit à lui louange éternelle. Amen.