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Samedi de la deuxième semaine de carême

Suite du commentaire de la parabole du fils prodigue par Benoît XVI, dont j’avais reproduit le début l’an dernier.

« Comme il était encore loin, son père l'aperçut » et partit à sa rencontre. Il écoute la confession du fils et mesure le chemin intérieur qu'il a parcouru ; il voit qu'il a trouvé le chemin de la liberté réelle. Alors, il ne le laisse même pas terminer, il le prend dans ses bras, il l'embrasse et fait préparer un grand festin pour exprimer sa joie. La source de cette joie, c'est que le fils, qui « était mort » (15, 32) lorsqu'il était parti avec sa fortune, est maintenant revenu à la vie ; il est ressuscité. Il était perdu et il « est retrouvé ».

Les Pères ont mis tout leur amour dans l'interprétation de cette scène. Pour eux, le fils prodigue est l'image de l'homme par excellence, de l'« Adam » que nous sommes tous, cet Adam à la rencontre duquel Dieu est allé et qu'il a à nouveau accueilli dans sa maison. Dans la parabole, le père demande à ses domestiques de vite apporter « le plus beau vêtement ». Pour les Pères, ce « plus beau vêtement » se réfère à la grâce perdue dont l'homme était paré à l'origine et qu'il a perdue en péchant. À présent, on lui fait à nouveau don de ce « plus beau vêtement », le vêtement du fils. Dans la fête que l'on prépare, les Pères voient l'image de la fête de la foi, la célébration de l'Eucharistie qui anticipe le repas éternel. Si l'on s'en tient à la lettre du texte grec, le fils aîné, en rentrant chez lui, entend « une symphonie et des chœurs » : pour les Pères, c'est à nouveau une image de la symphonie de la foi, qui fait de l'existence chrétienne une joie et une fête.

Mais le point essentiel du texte ne se trouve bien sûr pas dans ces détails, l'essentiel est maintenant clairement la figure du père. Est-elle compréhensible ? Un père peut-il, doit-il agir ainsi ? Pierre Grelot a fait remarquer qu'ici, la parole de Jésus est entièrement fondée sur l'Ancien Testament : l'archétype de cette vision de Dieu, du Père, se trouve au Livre d'Osée (11, 1-9). Il y est d'abord question de l'élection d'Israël et de sa trahison : « Mais plus je les appelais, plus ils s'écartaient de moi ; aux Baals ils sacrifiaient, aux idoles ils brûlaient de l'encens » (Os 11, 2). Mais Dieu voit aussi dans quel état de désolation se trouve ce peuple, avec quelle violence l'épée sévit dans ses villes (cf. Os 11, 6). Et il se passe exactement ce qui est dépeint dans notre parabole : « Comment t'abandonnerais-je, Éphraïm, te livrerais-je, Israël [...] Mon cœur se retourne contre moi, et le regret me consume. Je n'agirai pas selon l'ardeur de ma colère, je ne détruirai plus Israël, car je suis Dieu, et non pas homme : au milieu de vous je suis le Dieu saint » (Os 11, 8-9). Parce que Dieu est Dieu, le Saint, il agit comme nul homme ne saurait agir. Dieu a un cœur, et ce cœur se retourne pour ainsi dire contre lui-même : chez le prophète comme dans l'Évangile, nous retrouvons ici le mot « compassion », qui renvoie à l'image du sein maternel. Le cœur de Dieu transforme sa colère ; au lieu de punir, il pardonne.

Addendum

Le père demande à ses serviteurs de donner au fils prodigue, littéralement (tant en latin qu’en grec) « la première robe », un anneau et des souliers. On interprète toujours : la plus belle robe. Peut-être. Mais peut-être aussi que la première robe n’est pas la seconde : celle-ci étant la « tunique de peau » que revêtent nos premiers parents après le péché originel, la « première robe » étant le vêtement de grâce qu’ils avaient à la création. L’anneau est celui qui est remis par le Pharaon à Joseph et par Assuérus à Mardochée : il porte le sceau royal, il est le signe de l’élection. Quant aux « sandales aux pieds », ce sont exactement les mots de l’Exode (12,11) dans les prescriptions de célébration de la première Pâque. « Comment ne pas voir que chaque détail vise un retour en grâce, transformant l’être même du fils repenti, pour une restauration de l’Alliance, que va sceller, comme toujours, le repas sacrificiel (tuez le veau gras, Genèse 18,7). » (Dom Claude-Jean-Nesmy – ou Mère Elisabeth de Solms ? - Bible chrétienne)

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