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Le bienheureux Charles de Blois

Nous allons voir un prince saint ; bien plus, un héros saint, qui vécut dans sa condition d’une manière aussi détachée du monde que les plus austères religieux. Un vrai brave, qui conserva la paix de sa conscience au milieu des alarmes domestiques et étrangères, et qui eut plus de soin de se surmonter lui-même, que de vaincre ses ennemis. Aussi trouva-t-il son salut en sa propre défaite, et en une mort qui valait bien une victoire, puisqu’il ne quitta la souveraineté qu’on lui disputait que pour aller triompher dans le Ciel.

Ainsi commence la notice sur « saint Charles de Blois duc de Bretagne » dans l’Histoire de Blois de « J. Bernier, conseiller et médecin ordinaire de feue Madame, douairière d’Orléans », 1682.

En voici la fin :

Je m’attache donc simplement à ce qui fut glorieux à Charles après sa mort, rien ne lui ayant réussi pendant sa vie. Car les miracles qui se firent à son tombeau, et les autres témoignages de sa sainteté, obligèrent les papes Urbain V et Grégoire XI à lui faire rendre sur la terre les honneurs qu’on ne rend qu’aux saints. Honneurs certes qu’il avait bien mérités : car pour ne point parler des qualités qui sont nécessaires pour former un grand prince, puisque je rends ici témoignage des vertus d’un saint personnage : il est certain qu’il possédait toutes celles qui peuvent perfectionner un chrétien.

En effet, on remarque que dès sa plus tendre jeunesse il récitait tous les jours le psautier, les Heures de Notre Dame et celles de la Croix, qu’il servait toutes les messes qui se disaient en l’hôtel de son père ; jeûnait certains jours de la semaine, outre ceux qui étaient ordonnés de l’Eglise ; secourait les pauvres et recevait leurs requêtes. Depuis qu’il fut marié, il ne fit pas moins d’exercices de piété, car il s’adonna à l’humilité, à la patience, à l’austérité, à la charité et même à la continence. Il se levait la nuit pour faire l’oraison, et ne se couchait jamais sans se confesser. Il portait tant d’honneur aux prêtres qu’il descendait de cheval au milieu des boues par respect, quand il en rencontrait quelqu’un à la campagne. Il se mortifiait souvent de disciplines, portait la haire, s’abstenait de viandes délicieuses, couchait sur la dure, et eût encore poussé plus loin ces austérités si Georges l’Esnen et Geoffroy de Plodidi ses médecins ne l’en eussent empêché. Il commettait toujours des hommes savants et de bonnes mœurs à l’administration de la justice. Il empêchait les duels, et ne donnait jamais de grâces aux criminels sans réserver le droit des parties. Pour sa patience elle alla jusques où cette vertu peut aller ; car il vit la perte de ses biens et de ses amis, de même œil que le saint homme Job avait vu celle des siens. La première nuit de sa prison Thomas Dagorne capitaine anglais lui fit arracher son lit de dessous lui, de manière qu’il demeura nu sur la paille sans se plaindre, navré qu’il était de dix-sept plaies, comme nous l’avons remarqué ci-devant. Peu de temps après, la soldatesque le fit éveiller, ou pour mieux dire railler avec un concert de vielles, parce qu’il aimait la musique, le forçant d’y tenir sa partie, indignité de laquelle il ne fit pas paraître le moindre ressentiment. Son unique divertissement était la musique et les belles lettres, mais l’étude des saintes Lettres fut celle qui l’emportait sur toutes les autres. Enfin il avait l’esprit si détaché du monde au milieu du monde et de la Cour, qu’il aurait renoncé au siècle s’il eût pu, et si la Providence ne l’y eût retenu pour l’exercer.

Au reste, je ne doute point que tout ce que je viens d’écrire de saint Charles de Blois ne semble grand à ceux qui le liront, et cependant je puis assurer qu’il ne paraîtra qu’un abrégé de ses vertus, s’ils se donnent la peine de voir les originaux et les actes de sa canonisation.

A propos de la canonisation de Charles de Blois, voir l’article de Noële Denis-Boulet. On y verra que J. Bernier n’avait pas tort et même qu’il était un excellent historien.

Sur la vie de celui qui n’est néanmoins officiellement que bienheureux, voir notamment ici.

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