Dans cette messe du bon Samaritain, ce qui attire le plus l’attention, en dehors de l’évangile, c’est l’offertoire. Déjà par sa longueur, et par le fait qu’il ne s’agit pas d’un verset de psaume, comme c’est le plus souvent le cas. En outre la première phrase est répétée presque à l’identique. Il y a quelques autres offertoires dans ce cas, et il y en avait davantage avant que la commission de réforme du missel, après le concile de Trente, ne supprime les répétitions dont on ne comprenait pas la signification. Celle-ci est peut-être restée parce qu’on y a vu un bégaiement de Moïse…
Ce long offertoire n’en est pas moins, comme les autres, une antienne. C’est-à-dire en théorie une introduction à un psaume. Mais ici, comme dans le fameux offertoire de Job, les deux « versets » que l’on trouve dans les anciens antiphonaires sont une adaptation d’autres versets de l’Exode. Avec une longue plainte dans l’aigu sur « peccata » (les péchés) et une nouvelle répétition, un nouveau bégaiement de Moïse. Mais sur le plan musical c’est une grande diversité : le premier verset est dans l’aigu, le second dans le grave, et tous deux multiplient les doux si bémol alors que l’antienne multiplie les durs tritons.
Il serait bon de chanter l’ensemble, car c’est un grand chef-d’œuvre de l’art grégorien. Hélas cela dépasserait de loin le temps de l’offertoire, qui comprenait autrefois une longue procession. Mais à vrai dire l’antienne seule est déjà un morceau de choix, avec cette supplication de Moïse qui est longuement annoncée, puis qui s’affirme dans une apostrophe à Dieu, puis qui devient véhémente, et se détend dans l’apaisement apporté par Dieu.
Voici le texte de l’offertoire complet, dans son texte latin, en traduction, avec sa partition (on trouvera la partition des versets ici) et chanté par les moines de Triors (enregistrement trouvé sur Gregorian Books).
Precatus est Moyses in conspectu Domini Dei sui et dixit, precatus est Moyses in conspectu Domini Dei sui et dixit : Quare, Domine, irasceris in populo tuo ? Parce irae animae tuae : memento Abraham, Isaac et Jacob, quibus jurasti dare terram fluentem lac et mel.
Et placatus factus est Dominus de malignitate quam dixit facere populo suo.
V1. Dixit Dominus ad Moysen : invenisti gratiam in conspectu meo, et scio te prae omnibus : et festinans Moyses inclinavit se in terram et adoravit dicens : Scio quia misericors es in millibus, auferens iniquitatem et peccata.
Et placatus factus est Dominus de malignitate quam dixit facere populo suo.
V2. Dixit Moyses et Aaron, Dixit Moyses et Aaron ad omnem synagogam filiorum Israel : Accedite ante Deum : majestas Domini apparuit in nube : et exaudivit murmurationem vestram in tempore.
Et placatus factus est Dominus de malignitate quam dixit facere populo suo.
Moïse pria devant la face du Seigneur son Dieu et dit, Moïse pria devant la face du Seigneur son Dieu et dit : Pourquoi, Seigneur, t’irrites-tu contre ton peuple ? Ménage la colère de ton âme. Souviens-toi d’Abraham, d’Isaac et de Jacob auxquels tu as promis de donner la terre où coulent le lait et le miel.
Et le Seigneur se laissa apaiser et détourner de faire le mal dont il avait menacé son peuple.
Le Seigneur dit à Moïse : Tu as trouvé grâce devant mes yeux. Je te connais avant tous. Et Moise se baissa rapidement vers la terre et dit : Je sais que tu es miséricordieux entre mille et que tu enlèves l’injustice et les péchés.
Et le Seigneur se laissa apaiser et détourner de faire le mal dont il avait menacé son peuple.
Et Moïse et Aaron dirent, et Moïse et Aaron dirent à toute l’Assemblée des enfants d’Israël : Présentez-vous devant Dieu. La Majesté du Seigneur est apparue dans les nuées et a entendu vos murmures en temps voulu.
Et le Seigneur se laissa apaiser et détourner de faire le mal dont il avait menacé son peuple.
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Sur la parabole du bon Samaritain, voir l’essentiel du commentaire de saint Ambroise, celui de Benoît XVI (ou plutôt Joseph Ratzinger), et une sorte de note préalable.