L’évangile de ce jour anticipe sur les Rameaux, mais il contient beaucoup d’autres choses, et qui sont amenées de façon mystérieuse. Voilà des païens qui viennent adorer à Jérusalem. Ils sont encore païens, mais ils savent que c’est à Jérusalem qu’on adore le vrai Dieu. Ils s’approchent de Philippe, pour parler en grec à un apôtre qui a un nom grec. Ils disent à Philippe qu’ils veulent voir Jésus. Ce Jésus à qui Philippe demandera bientôt de lui montrer le Père, et à qui Jésus répondra : « Celui qui m’a vu a vu le Père. » Philippe les conduit à André, l’autre apôtre qui a un nom grec. Puis tous deux vont voir Jésus. Jésus paraît ne rien leur répondre à propos des païens qui veulent le voir. Comme s’il ignorait purement et simplement la demande. Mais le discours qu’il tient alors est l’annonce du salut proposé à tous les païens, par la Croix.
« Jésus leur répondit : L’heure est venue où le Fils de l’homme doit être glorifié. » La gloire, c’est la croix, comme le souligne fortement saint Cyrille d’Alexandrie dans son commentaire de saint Jean.
Et l’on remarque alors que ce propos renvoie à un propos tenu juste avant la Transfiguration, selon les trois synoptiques : « Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup (…) et qu’il ressuscite le troisième jour. »
Ensuite c’est encore plus net : « Celui qui aime sa vie, la perdra ; et celui qui hait sa vie dans ce monde, la conserve pour la vie éternelle. Si quelqu’un me sert, qu’il me suive ; et là où je suis, mon serviteur sera aussi. Si quelqu’un me sert, mon Père l’honorera. » Dans les synoptiques, avant la Transfiguration : « Qui voudrait sauver son âme la perdra, mais qui perdra sa vie à cause de moi la sauvera. » Et : « Si quelqu’un veut venir à ma suite (…) qu’il prenne sa croix et vienne à moi. »
Dans son évangile, saint Jean ne parle pas de la Transfiguration. Il ne parle pas non plus de l’Agonie au jardin des oliviers. C’est l’essentiel, mystique, de ces deux épisodes, qui est ici évoqué, comme l'avait remarqué Xavier Léon-Dufour (Etudes d'Evangile, cité dans Bible chrétienne II*).
Voici l’évocation du jardin des oliviers : « Maintenant, mon âme est troublée (…) Père, sauve-moi de cette heure. Mais c'est pour cela que je suis arrivé à cette heure. Père, glorifie ton Nom. » (« Mon âme est triste jusqu'à la mort (...) Père, s'il est possible, que ce calice s'éloigne de moi; cependant, qu'il en soit non pas comme je veux, mais comme tu veux. »)
« Alors vint une voix du ciel… » Comme à la Transfiguration. Et aussi au baptême… chez les synoptiques.
La voix dit : « Je l’ai glorifié et je le glorifierai ».
Par la Croix, comme le dit ensuite Jésus : « Quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai tout à moi. » Notamment ces Grecs qui veulent me voir…