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Dimanche in albis

Hier c’était le samedi « in albis deponendis », le jour où l’on doit rendre à l’Eglise le vêtement blanc. Aujourd’hui c’est le dimanche « in albis depositis » : le vêtement blanc a été rendu.

Ce dimanche se dit aussi, ou se disait encore récemment, dimanche de « Quasimodo », vestige du temps où l’on désignait les dimanches par les premiers mots de l’introït.

« Quasi modo géniti infántes, allelúia : rationabiles, sine dolo lac concupíscite, allelúia, allelúia allelúia. »

Il s’agit bien de deux mots : « quasi » et « modo ». Cet introït est en fait un extrait de l’épître de la messe d’hier. Donc de la première épître de saint Pierre, qui parle des chrétiens comme de nouveaux-nés, ce que sont particulièrement les baptisés de Pâques.

Le texte de l’introït n’est pas exactement celui de la Vulgate. Il s’agit d’une version plus ancienne, qui est restée telle quelle, comme on le voit très souvent dans la liturgie, parce que c’était devenu, précisément, la version liturgique (donc immuable) et parce qu’elle était indissolublement liée à la mélodie de plain chant.

On a ici un bon exemple de la révision de la traduction par saint Jérôme.

D’une part, le texte liturgique dit : « Quasi modo geniti infantes ». En français nous disons : « Comme des enfants nouveaux-nés » ("modo" étant à prendre dans son sens temporel : "à l’instant", qui n’est pas le plus courant). Mais, dans "quasi", il y a "si" : quasi veut dire essentiellement "comme si" (et c’est toujours le sens du mot en français). Or ici "quasi" a le sens de "comme". Un sens bien attesté, mais pourquoi ne pas traduire le grec "hos" par son équivalent latin immédiat, qui est "sicut" ? Saint Jérôme a donc remplacé "quasi" par "sicut", et c’est plus clair.

D’autre part, le texte liturgique parle de ces enfants « rationabiles » : doués de raison, et dans l’Ecriture et la liturgie (des oraisons de l’époque de saint Léon ou de saint Grégoire) ce mot indique une faculté spirituelle, c’est la raison éclairée par l’Esprit, devenue spirituelle.

Mais, même s’il s’agit d’une image pour désigner les nouveaux chrétiens, les nouveaux-nés ne sont pas dotés de raison. Or il s’agit d’une faute. Tous les manuscrits grecs font de "raisonnable" un épithète de "lait", et non des nouveaux-nés. Ce n’est pas « infantes rationabiles », mais « rationabile lac ».

Saint Pierre dit que nous devons être comme des nouveaux-nés, désirant le lait "rationnel" et "sans tromperie", afin de croître par ce lait dans le salut.

L’introït dit que nous devons être comme des nouveaux-nés "rationnels", désirant le lait "sans tromperie".

Or cela est vrai aussi : nous devons être comme des nouveaux-nés nourris de lait, mais avec la sagesse de l’adulte nourri des aliments solides de l’Eglise.

Commentaires

  • Merci d'avoir rappelé la séparation en deux mots. C'est seulement ces derniers jours en répétant l'antienne grégorienne dans le Graduale que je me suis rendu compte que c'étaient deux mots distincts ! Au contraire du nom du héros du roman Notre-Dame de Paris.

  • Merci pour cette belle explication car je ne connaissais pas du tout l'"histoire" du vêtement blanc. C'est la première fois que j'en entends parler.

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