Le langage des Anges pourrait seul célébrer dignement vos grandeurs, ô Epouse du Christ ! et nous n'avons pour vous louer que les accents incomplets et timides de l'homme mortel et pécheur. O Reine qui assistez à la droite du Roi. des siècles, revêtue de cette robe tout éclatante d'or qu'a chantée le Psalmiste, inclinez sur nous un regard favorable, et daignez accepter cette offrande de nos louanges que nous déposons sur le dernier degré de votre trône sublime.
Nous osons y joindre une prière pour la sainte Eglise dont vous fûtes l'humble fille, avant d'en devenir l'espérance et l'appui. Dans cette nuit profonde du siècle présent, l'Epoux tarde à paraître. Au sein de ce solennel et mystérieux silence, il permet à la Vierge de se laisser aller au sommeil jusqu'à ce que le cri de son avènement se fasse entendre. Nous honorons votre repos sur la pourpre de vos victoires, ô Cécile! mais nous savons que vous ne nous oubliez pas; car l'Epouse dit dans le sacré Cantique : « Je dors, mais mon cœur veille. »
L'heure approche où l'Epoux va paraître, appelant tous les siens sous l'étendard de sa Croix. Bientôt le cri va retentir : « Voici l'Epoux, marchez au-devant de lui. » O Cécile ! vous direz alors aux chrétiens, comme à cette troupe fidèle qui se pressait autour de vous à l'heure de la lutte : « Soldats du Christ, rejetez les œuvres de ténèbres, et revêtez les armes de la lumière. »
L'Eglise qui chaque jour prononce votre nom avec amour et confiance dans l'Action du plus sacré de ses Mystères, attend fermement votre secours, ô Cécile ! elle sait qu'il ne lui fera point défaut. Préparez sa victoire, en élevant les cœurs chrétiens vers les seules réalités que trop souvent ils oublient, pour courir à la poursuite de ces vaines apparences dont vous sûtes déprendre le cœur de Tiburce. Le jour où le sentiment de l'éternité de nos destinées dominera de nouveau la pensée des hommes, le salut et la paix des peuples seront assurés.
Soyez à jamais, ô Cécile ! les délices de l'Epoux. Aspirez éternellement le divin parfum de ses roses et de ses lis; enivrez-vous sans fin de l'harmonie suprême dont il est la source. Du sein de vos splendeurs vous veillerez sur nous, et quand notre dernière heure sera venue, nous vous en supplions par les mérites de votre héroïque trépas, assistez-nous sur notre couche funèbre; recevez notre âme dans vos bras, et portez-la jusque dans cet immortel séjour où il nous sera donné de comprendre, en voyant la félicité qui vous entoure, le prix de la Virginité, de l'Apostolat et du Martyre.
(Dom Guéranger, Histoire de sainte Cécile (1849), conclusion.)
[Sainte Cécile sur mon blog : le dialogue avec le préfet ; l’exhumation de son corps en 1699.]