Vendredi dernier a été publiée une « note doctrinale » de la Congrégation pour la doctrine de la foi, sur l’évangélisation. Elle a été présentée au cours d’une conférence de presse tenue par trois cardinaux : William Joseph Levada, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, Francis Arinze, préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, Ivan Dias, préfet de la Congrégation pour l'évangélisation des peuples, et Mgr Angelo Amato, Secrétaire de la Congrégation pour la doctrine de la foi. (Et en l’absence remarquée du cardinal Walter Kasper, préfet du conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, alors que la note évoque l’œcuménisme.)
La solennité apportée à la publication de ce qui n’est officiellement qu’une « note » indique l’importance que lui donne le pape (qui en est à l’origine, non parce qu’il est le pape, mais parce qu’il l’avait mise sur le chantier lorsqu’il était encore préfet de la Congrégation).
Or il s’agit d’un autre coup, sévère, porté à « l’esprit du Concile » : l’Eglise réaffirme que son devoir est d’évangéliser, et réfute explicitement tout ce qui a été dit, au nom du respect ou de la liberté des consciences, pour nier en fait ce devoir.
Voici ce qui est au cœur de cette note, comme on peut le lire dans le compte rendu, réalisé par le site Eucharistie miséricordieuse, du résumé publié par le Vatican :
« Il existe aujourd'hui une "confusion croissante" quant au devoir missionnaire de l'Église. Certains considèrent que "toute intention de convaincre d'autres personnes sur des questions religieuses est une atteinte la liberté". Ils suggèrent qu'il suffit d'"inviter les personnes à agir selon leur conscience" et d'"aider les hommes à être plus hommes ou plus fidèles à leur religion, et qu'il suffit de construire des communautés capables de travailler pour la justice, la liberté, la paix, la solidarité", sans avoir pour but la conversion au Christ et à la foi catholique". "D'autres soutiennent que l'on ne doit pas promouvoir la conversion au Christ, car il est possible de se sauver "sans connaissance explicite du Christ et sans incorporation formelle à son Église".
« Dans le cadre des implications anthropologiques, on observe que "certaines formes d'agnosticisme et de relativisme nient la capacité de l'homme à connaître la vérité, alors que la liberté de l'homme ne peut être coupée de sa référence à la vérité".
« "Nous ne pouvons nous engager dans la recherche de la vérité en ne comptant que sur nos forces -poursuit le document- car cette recherche demande l'aide des autres et la confiance en la connaissance qu'ils ont reçue. L'enseignement et le dialogue grâce auxquels on invite une personne, en toute liberté, à connaître et à aimer le Christ, n'est donc pas une "intromission indue" dans la liberté humaine, mais une "proposition légitime et un service qui peut rendre plus fécondes les relations entre les personnes". »
Ceci est extrait du compte rendu plus détaillé que l’on trouvera sur Eucharistie miséricordieuse. Un autre compte rendu a été fait par Zenit.
Ce jour, le texte de la note (qui porte la date du 3 décembre, jour de la « mémoire liturgique » du grand missionnaire saint François Xavier) n’a pas encore été publié sur le site du Vatican.
Commentaires
Je suis étonne que personne n’ait réagit dans un sens ou dans l’autre à cet article.
« L’Eglise réaffirme que son devoir est d’évangéliser, et réfute explicitement tout ce qui a été dit, au nom du respect ou de la liberté des consciences, pour nier en fait ce devoir. » :
Voilà qui a au moins le mérite d’être clair.
« « Il existe aujourd'hui une "confusion croissante" quant au devoir missionnaire de l'Église. Certains considèrent que "toute intention de convaincre d'autres personnes sur des questions religieuses est une atteinte la liberté". » :
Absolument, c’est une atteinte à la liberté, aussi trivial que cela puisse paraître, personne n’a le droit de faire le « bonheur » des autres malgré eux, personne n’a le droit d’imposer aux autres sa conception du Vrai, du Juste et du Bien.
« Dans le cadre des implications anthropologiques, on observe que "certaines formes d'agnosticisme et de relativisme nient la capacité de l'homme à connaître la vérité, alors que la liberté de l'homme ne peut être coupée de sa référence à la vérité". » :
La vérité ? Quelle vérité ? Superbe sophisme destiné à imposer une opinion particulière à tous.
« "Nous ne pouvons nous engager dans la recherche de la vérité en ne comptant que sur nos forces -poursuit le document- car cette recherche demande l'aide des autres et la confiance en la connaissance qu'ils ont reçue. L'enseignement et le dialogue grâce auxquels on invite une personne, en toute liberté, à connaître et à aimer le Christ, n'est donc pas une "intromission indue" dans la liberté humaine, mais une "proposition légitime et un service qui peut rendre plus fécondes les relations entre les personnes". » :
A la rigueur, qu’on m’y invite, « en toute liberté », passe encore (quoi que…), bien que je sois opposé à toute forme de prosélytisme. Mais qu’on essaie de me l’imposer, je ferai valoir là mon droit de légitime défense.
[Dommage que vous ne sachiez pas lire. Il n'est question nulle part d'imposer quoi que ce soit à qui que ce soit.
Si vous intervenez si souvent sur mon blog, c'est bien parce que vous avez "l'intention de convaincre d'autres personnes" sur le sujet abordé. Donc, à chaque fois, vous "portez atteinte à la liberté" des autres lecteurs, si l'on suit votre raisonnement. Tirez-en les conséquences.
YD]
Hélas, c'est bien tout le problème de Robert, il ne lit que ce qu'il veut entendre...
Il n’a de foi que dans ces certitudes et il en est plein.
« L’Eglise réaffirme que son devoir est d’évangéliser, et réfute explicitement tout ce qui a été dit, au nom du respect ou de la liberté des consciences, pour nier en fait ce devoir. » :
Ce passage me semble pourtant assez clair. Donc, l'argument du "respect ou de la liberté de conscience" est nié ou insuffisant pour que l'Eglise renonce à ce devoir. Ainsi, l'Eglise est absolument convaincue de devoir évangéliser le monde, pour son bien, naturellement.
Et si l'Eglise fait fi du respect ou de la liberté de conscience, quel argument peut-on bien lui opposer ?
@ Lapinos
Ne confondez pas angélisme avec analphabétisme.
Il faudrait surtout qu'avant toute chose, les gens apprennent à lire et à connaître la définition des mots qu’ils lisent et utilisent.
L'inculture est le premier désastre. Il est évident que la baisse du niveau d’enseignement ne peut aboutir qu’à l’abrutissement du plus grand nombre et donc à sa domination.
Ici, Robert confond visiblement évangélisation et conversion.
Qu’il ouvre un dictionnaire avant d’écrire.
Ce sont deux choses bien différentes et si la conversion suit l’évangélisation dans la chronologie, la conversion (catholique, faut-il le préciser ?) n’est pas inéluctable !
Lapinos,
Ce parallèle que vous faites entre l’Eglise et les parents est assez révélateur et je vous en remercie.
Ainsi l’Eglise considère les hommes comme d’éternels enfants ou, en tout cas, les traite comme tels et doit agir pour leur bien, que cela leur plaise ou non.
Non, mes parents, lorsque j’avais 3 ans, ne m’ont pas demandé mon avis mais ont très bien choisi en me mettant dans une école laïque. Aujourd’hui, près de 30 ans plus tard, j’estime être en âge de choisir tout seul, comme un grand, ce qui est bon pour moi.
Roland,
Comme on se retrouve !
J’avais noté cette subtilité. L’évangélisation est en quelque sorte la première étape, un peu comme Alice qui lance sa campagne de pub (de « communication » comme on dit maintenant), et la conversation est la seconde étape, soit la signature d’un abonnement ADSL haut-débit.
On est libre de ne pas signer, bien sûr, on a tout de même une chance de ne pas devenir client : « la conversion (catholique, faut-il le préciser ?) n’est pas inéluctable ! »
Quelle chance !
Cela dit, L’Eglise dit en quelque sorte qu’on serait bien bête de ne pas devenir client, son produit étant bien meilleur que ceux de la concurrence ou que pas de produit du tout.
Tout cela me paraît bien loin de l’humilité et de la tolérance chrétiennes…
@ Robert (toujours ;-))
Puisque vous voulez faire un parallèle avec la pub, sachez que je me suis jamais laissé convaincre par elle. La preuve est donc que la conversion n’est pas une obligation ou une finalité !
Mais vu le peu de chose que j’achète, je suis mal placer pour commenter ce type de comportement consumériste.
Maintenant si à vos yeux la philosophie, la religion sont devenues des choses consommables au même titre que du champoing, je ne doute pas de ce que vous devez faire de la culture en général et de la qualité de vos relations humaines.
Toujours le tri sélectif ? Je consomme, je jette etc.
Pour la religion chrétienne, à la différence des autres grandes religions monothéistes, vous oubliez deux choses essentielles qui lui sont spécifiques. Le libre-arbitre et le renouvellement constant de la foi en laquelle nous croyons.
Être converti ne suffit pas pour faire de vous un Chrétien à la différence d’un juif ou d’un musulman. Il faut constamment renouveler sa foi par divers sacrements tout au long de sa vie.
Vous pouvez donc vous convertir un jour et « divorcer » le lendemain si vous le souhaitez personne ne vous dira rien, car c’est exclusivement un engagement entre vous et dieu.
Il n'y a pas de contrat d'abonnement.
« Evangélisation : action d’évangéliser ; son résultat. => christianisation : action de christianiser (« rendre chrétien ») ; état de ce qui est christianisé. » (Petit Robert (pas moi, l’autre)).
Ainsi, si la dimension « action » sans forcément de résultat est bien présente, la dimension « résultat » est également présente. Et c’est cela qui m’inquiète. En quoi consiste alors l’évangélisation ? En la proposition d’une doctrine ou en le résultat de sa proposition, soit en la conversion des gens à qui l’on a proposé cette doctrine ?
Lapinos,
Vous l’affirmez sans détour, vous détenez la vérité. Le problème c’est que d’autres pensent, tout aussi (il)légitimement, détenir la vérité mais une vérité différente de la vôtre. Ainsi il existe plusieurs vérités. Mais alors, il n’existe plus de vérité du tout.
Qui plus est, c’est par « charité » que vous voulez me faire profiter de cette vérité, qui semble ainsi toute relative.
L’Eglise à 2000 ans, elle a donc toujours raison. Superbe argument d’autorité que je réfute, naturellement. Ainsi, c’est un produit plus ancien, donc meilleur.
L’accusation de paternalisme est bénigne ? Si vous jugez mon accusation bénigne, tant mieux, je ne souhaite pas me fâcher avec vous. En revanche, ce paternalisme n’est pas bénin du tout. Au contraire, maintenir les être humains dans un état d’infantilisation permanent, de minorité intellectuelle à vie, de déni d’autonomie et d’émancipation est extrêmement grave.
Et je suis donc vaniteux car, âgé de moins de 2000 ans, je revendique le droit de penser différemment de l’Eglise qui sait ce qui est bon pour moi (sic).
Ce que je pense de la télévision, de la pub et de ce formatage de plus en plus carcéral ? A peu près la même chose.
Soyons clairs, je ne doute pas de votre bonne foi, ni de vous bonnes intentions en tant qu’individu. Et cela s’applique (à quelques exceptions près) à tout le monde.
Et, contrairement à vous, je ne suis pas convaincu que certains commerciaux ne soient pas eux-mêmes convaincus pas leurs discours ineptes, ce qui les rend d’autant plus insupportables.
Roland,
Si le fais un parallèle avec la pub, c’est que j’ai parfois le sentiment, qu’à l’instar d’une multinationale, l’Eglise veut (re)gagner des parts de marché par de vastes campagnes de com.
Mais restons-en là pour la métaphore.
Ainsi pour vous, la philosophie et la religion, la culture et les relations humaines vont de pair. Et si l’on critique ou ironise sur la religion, l’on méprise le reste. Ainsi, pour être quelqu’un de bien, l’on ne peut faire sans. Et c’est moi le totalitaire ?
La philosophie s’est, depuis ses débuts, opposé à la religion. Les présocratiques sont d’ailleurs plus anciens que le premier des monothéismes. Il y a eu naturellement de grands philosophes chrétiens comme Saint-Thomas, Pascal (que je conspue) ou Kierkegaard. Mais songez à Bruno, Nietzsche (dont je raffole) ou à certains philosophe des Lumières. Donc, l’on peut fort bien tenir en haute estime la philosophie tout en comparant la religion à une société cherchant à augmenter ses parts de marché. De même, la culture générale peut fort bien se passer de la religion, même si cette dernière en fait partie, d’un point de vue athée. Mes métaphores scabreuses ne m’empêchent pas de lire, de parler et d’étudier des langues étrangères, bref de me muscler l’intellect. Quant aux relations humaines, la comparaison tient encore moins, inutile de développer.
Comme je l’ai dit à Lapinos, je ne doute pas de votre bonne foi.
Cependant, je ne vous suis pas lorsque vous dites que seul le christianisme inclut le renouvellement constant de la foi. Regardez l’Islam et ses 5 piliers, quel parcours du combattant ! Le ramadan, l’aumône, le pèlerinage à La Mecque (où l’on risque sa vie) demandent une foi profonde, une réelle volonté, des efforts quotidiens. Quant au Judaïsme, les sacrements, coutumes et cérémonies sont très nombreux, ce qui indique bien également un renouvellement quotidien.
Et pour ce qui est du libre arbitre, absent dans l’Islam, du moins dans les conditions politiques dans lesquelles il est pratiqué, il est loin d’être absent du Judaïsme, c’est d’ailleurs, la première qualité qu’il attribue à l’homme.
Je ne cherche donc pas à convaincre qui que ce soit, si ce n’est de pas (chercher à) convaincre les autres, encore moins par « charité », «au nom du respect ou de la liberté des consciences », nié par l’Eglise.
@ Robert
Je pense que notre conversation n’est hélas pas possible.
En l’absence de connaissance sur ce qu’est le christianisme ou même de sentiments religieux, je doute fort que vous soyez capable d’en comprendre le début d’un commencement et je ne suis certainement pas là pour vous évangéliser...
Les définitions du Petit Robert sont justes mais très réductrices de la réalité. Il serait bon que vous étendiez vos connaissances sur ce que signifient réellement ces mots.
Lorsque vous écrivez que la philosophie n’est pas la religion, c’est faux. La religion contient sa dimension philosophique et la religion chrétienne ne s’oppose pas à la philosophie.
N’ayant pas de sentiment religieux (visiblement et compte tenu de vos discours), vous ne pouvez pas comprendre ce que sont les sacrements catholiques.
Bien des Catholiques pratiquants d’ailleurs en ignorent leurs sens réels. Ils les pratiquent par tradition sans en comprendre la portée intrinsèque ! Comment pourriez-vous alors être plus Catholique qu’un Catholique !
Donc inutile pour moi de perdre mon temps à vouloir vous expliquer ce qu’est un sacrement dans l’église catholique et encore moins la différence avec les sacrements des autres religions.
Une fois encore, je reprends l’image commerciale que vous aviez donnée. Les sacrements ne sont pas une sorte d’abonnement qui vous « crédite » d’une appartenance à un groupe ou un autre ce que sont le Judaïsme et l’Islam
Vous prêtez à la religion catholique, par ses apparences formelles sans tenir compte du sens, les mêmes principes que les autres religions monothéistes ou polythéistes. C’est une immense erreur et méconnaissance hélas pour vous.
Je ne doute pas que vous viviez bien avec vos certitudes, pour ma part ma « bonne » foi n’est pas aussi sûre que vous me la prêtez. C’est justement un des mystères de la religion chrétienne, l’absence de certitudes.
La liberté de conscience est justement l’apanage de religion catholique contrairement à ce que vous concluez, vous en déplaise !
Maintenant si vous ne cherchez pas à prêcher, expliquez-moi ce que vous faites sur ce blog ???
Qui croyez-vous tromper, sinon peut-être vous-même ?
Vous seriez bien mieux ailleurs.
@ lapinos
Merci de voir en moi de l’angélisme.
Je ne dis cependant rien de tel. Je relativise la notion d’évangélisation de Robert qui la compare à la publicité. À travers mon cas, je souhaitais simplement souligner qu’aucune étude n’a jamais démontré que la publicité faisait vendre.
Je ne vois donc pas en quoi et sur quels principes Robert peut décider d’éliminer ou interdire l’évangélisation… Rien de plus.
Pour le libre-arbitre, Dieu nous laisse libres de nos actes et de notre foi. Je ne vois là aucun rapport avec le libéralisme.
Pouvez-vous me préciser sur quoi je serais d’accord avec Robert pour l’Islam ?
Pour moi l’Islam est la soumission et la conversion forcée. Une fois que vous êtes musulman, vous le restez et ne pouvez plus en sortir. Le Catholicisme n’a aucune approche de la sorte et ne demande pas d’autre acte de foi qu’un acte personnel.
Pour le reste, je ne vous accuse de rien. J’ai certainement des côtés jansénistes mais pas pour tout. En insistant sur le libre-arbitre (ou la liberté personnelle si vous préférez ce qui n'est toujours pas le liberalisme) je suis un jésuite. Serais-je un janséno-jésuiste ou bien un jésuito-janséniste ? Dilemme
Et après, c’est grave docteur ?
Je cite:
«Quel est le sens d'une concertation entre chrétiens protestants et catholiques alors que le christianisme ne représente plus que 2 ou 3 % de la population en Europe et que la réalité religieuse contemporaine est celle d'un paganisme triomphant et du retour des vieilles idoles barbares?»
Lisez Doïstoïevski et vous comprendrez.
Le christianisme est une religion prosélyte. Nous sommes des prosélytes, et au moment où nous cesserons d'être des prosélytes, nous cesserons d'être de vrais chrétiens. Admetons-le. Pour évangéliser, tous les évangélisateurs ont fait du prosélytisme.
Toutefois, tous ces papes et évêques avec leur prétendue "nouvelle évangélisation" (est-ce que ça a à voir avec un "nouvel évangile" dont parlent les apôtres?) n'y connsaissent rien. Ils veulent évangéliser en restant dans des bureaux et en se baladant dans des caisses de luxe?
Aucun d'entre eux ne ve sur le terrain. Aucun d'eux n'est entré dans un bar, pour y ouvrir une discussion sur la foi. Aucun n'est allé souper dans un squat de punks. Alors pourquoi ils parlent?