Extrait d’une chronique de Jean-Marie Rouart, de l'Académie française, dans Nice-Matin :
Un couscoussier, une machine à coudre, un fer à repasser, des valises en carton, des théières marocaines, et des scoubidoubidous : c'est ce dépotoir dont aucun marché au puces ne voudrait qu'on ose nommer musée. Eh oui, les Musées de France lui ont donné ce label. L'Etat est-il devenu fou ? Je manque de mots pour exprimer mon indignation au sortir de la visite de la Cité nationale de l'histoire de l'immigration qui a ouvert ses portes aujourd'hui, en lieu et place de l'ancien Musée des colonies de la Porte Dorée à Paris. Ce merveilleux monument de l'architecte Albert Laprade contient des chefs-d’œuvre de l'Art déco : des meubles de Rulhmann, des sculptures de Janniot, vient d'être colonisé à son tour par le politiquement correct. Ce musée que Sarkozy et Hortefeux ont refusé d'inaugurer a-t-il d'autre but que de participer sournoisement à cet « empoisonnement » dont parlait Jack Lang ? Faire de la France un pays xénophobe et tordant le cou à la plus élémentaire vérité. Voilà le beau travail de l'Etat. Avons-nous tant d'argent à gaspiller à nous flageller ? (...)
Le résultat est ce qu'il devait être : nul. Un gâchis. On a abîmé un beau monument et on lui a donné la vocation débile de gratter nos plaies en matière d'immigration et de réveiller nos culpabilités. On aura rarement mêlé sans aucune pudeur le népotisme présidentiel, l'instrumentalisation de la culture à des fins politiques et la gabegie financière. Car cela va vous (nous) coûter cher d'avoir, sous un vague alibi historique, l'insigne bonheur de contempler une paire de ciseaux et un fer à repasser qui se battent en duel : la modique somme de vingt-trois millions pour les travaux, plus sept millions pour le budget annuel de fonctionnement. C'est onéreux pour ce dépotoir de nos vieilles repentances.
(via fdesouche)