Soyons assurés que nous n'atteindrons les morts auxquels nous rendons des devoirs que par l'autel, la prière et l'aumône. Voilà les supplications solennelles et les sacrifices qui leur sont utiles. Sans doute ils ne profitent pas à tous, mais à ceux-là seulement qui ont mérité d'être ainsi secourus tandis qu'ils vivaient. Or, comme nous ne sommes pas à même de faire cette distinction, nous devons nous acquitter de ces devoirs envers tous ceux qui ont été régénérés, de peur d'omettre quelqu'un à qui ils peuvent et doivent être utiles. Il vaut mieux les rendre inutilement à ceux à qui ils ne peuvent ni nuire, ni profiter, que d'en laisser manquer ceux qui en profiteraient. Chacun doit s'en acquitter envers ses proches avec d'autant plus de soin qu'on agit de même à son égard. Quant aux soins de la sépulture du corps, quels qu'ils soient, ils ne sont d'aucun secours pour le salut; mais c'est un devoir d'humanité, fondé sur ce sentiment en vertu duquel personne ne hait sa propre chair. Aussi doit-on, autant qu'on le peut, prendre ce soin de la chair de nos semblables lorsqu'ils l'ont délaissée. Et si ceux qui ne croient pas à la résurrection de la chair ne manquent pas à ce devoir, à plus forte raison les fidèles doivent-ils le remplir à l'égard d'un corps, mort il est vrai, mais destiné à la résurrection et à une demeure éternelle : ils attestent ainsi en outre cette foi en la résurrection.
(Saint Augustin, Livre des devoirs envers les morts, conclusion)