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L’affaire Nativel

Le vice-procureur de Nancy, Philippe Nativel, qui avait refusé de requérir la peine plancher pour un récidiviste parce ce que « les magistrats ne sont pas les instruments du pouvoir » (voir ma note CQFD et le communiqué de Jean-Marie Le Pen) a été convoqué à la chancellerie, où il a été reçu hier après-midi par le directeur des services judiciaires et le directeur adjoint du cabinet de Rachida Dati.

« Il lui a été demandé de venir pour savoir s’il a tenu oui ou non les propos rapportés par la presse », a déclaré le porte-parole du ministère.

« M. Nativel a affirmé n’avoir jamais tenu de tels propos, comme peuvent l’attester les notes d’audience prises par le greffier », a affirmé le secrétaire général de l’USM, Laurent Bedouet, qui a dénoncé « une très grave remise au pas du parquet », car selon lui l’article 33 du code de procédure pénale stipule que « la parole est libre à l’audience ».

Les magistrats de Nancy, réunis en intersyndicale (USM-Syndicat de la magistrature) ont dénoncé « un processus d’intimidation inacceptable » portant « gravement atteinte à l’indépendance de la justice ». Et le Syndicat de la magistrature a envoyé une lettre à Rachida Dati pour lui réclamer « un entretien rapide » à propos de cette convocation qui, s'effectuant « en dehors de tout cadre procédural précis, constitue une atteinte inacceptable au principe de la liberté de parole à l'audience du ministère public ».

Il est difficile de croire que les journalistes locaux aient inventé les propos attribués au vice-procureur : « Je ne requerrai pas cette peine plancher de quatre ans car les magistrats ne sont pas les instruments du pouvoir. Ce n’est pas parce qu’un texte sort qu’il doit être appliqué sans discernement. »

Ce qui est en cause ici est d’abord le fait qu’un représentant du parquet, qui est, comme le rappelle Rachida Dati, sous l'autorité du garde des Sceaux, demande à un tribunal de ne pas appliquer la loi pour un motif politique.

On ne voit pas en quoi la convocation de Philippe Nativel porterait atteinte à l’indépendance de la justice et à la liberté de parole à l’audience, surtout si l’on affirme par ailleurs qu’il n’a pas tenu les propos qu’on lui impute. Et s’il ne les a pas tenus à quoi sert l’argument du code de procédure pénale ? Précisons du reste que la citation que fait Laurent Bedouet de l’article 33 est inexacte. Le texte dit que le ministère public « développe librement les observations orales qu’il croit convenables au bien de la justice ». Ces observations ne peuvent pas être des commentaires de la loi, et peuvent encore moins concerner une demande de non-application de la loi, comme le souligne l’article 31 : « Le ministère public requiert l’application de la loi. »

Reste enfin le fait que les juges de Nancy sont allés encore plus loin que le vice-procureur, en condamnant à huit mois de prison le dealer qu’il voulait voir condamner à un an, et qui aurait dû être condamné à quatre ans si la loi Sarkozy-Dati n’était pas déjà vidée de sa substance, comme cela était prévisible.

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