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Vigile de saint Laurent

Il donne aux pauvres en abondance.

1. La Vigile. — L’Église s’apprête à fêter dignement l’entrée dans la gloire d’un de ses plus grands héros, vrai type du martyr du Christ. Tous ceux qui s’associent véritablement à la vie de l’Église romaine connaissent fort bien ce jeune diacre ; il est le patron des catéchumènes, et, à ce titre, il nous accompagne dans l’arène du carême : dès le début (station de la Septuagésime), nous le trouvons à nos côtés.

Nous pouvons considérer son martyre sur le gril comme le symbole de la lutte contre les passions ; aussi demandons-nous tous les jours, après la sainte messe, a que Dieu daigne éteindre en nous l’ardeur de nos vices, comme le bienheureux Laurent a surmonté le feu qui le tourmentait ».

Il nous est assez difficile désormais de bien comprendre ce qu’était une vigile dans la primitive Église. Vers le soir, la veille de la fête du saint, on s’assemblait dans le sanctuaire qui enfermait ses reliques en y amenant les malades. La vigile romaine consistait surtout en leçons, en répons et en oraisons récitées par l’évêque, comme cela se pratique encore à la cérémonie du Samedi-Saint. La vue de la châsse, la lecture des Actes des Martyrs, la grande ferveur de l’assistance, tout contribuait à ranimer les restes du saint dans l’esprit des fidèles.

Vers l’aurore, ils assistaient à la célébration de la messe et partageaient l’ « agape funéraire » eucharistique, s’unissant ainsi mystiquement au Christ et au saint martyr. Si la vigile n’est plus guère qu’un souvenir, essayons néanmoins de lui rendre sa signification primitive. C’est un jour de pénitence. Que les fidèles qui se confessent assez régulièrement le fassent de préférence aux vigiles et aux Quatre-Temps. C’est aussi un jour de jeûne dans le sens large du mot, un jour donc qu’il convient de sanctifier particulièrement par la pratique de la mortification et de l’aumône. C’est enfin un jour de prière. (Il est fait mention de la vigile de saint Laurent dès le IVe siècle, dans la « vie de sainte Mélanie »).

2. La Messe (Dispersit). — Elle est très ancienne et semble bien mettre en valeur ce qui nous impressionne le plus dans la vie de saint Laurent :
- a) la distribution des biens de l’Église aux pauvres (Intr. et Grad.) ;
- b) l’invitation à suivre l’exemple du Sauveur (Év. et Com.) ;
- c) l’ardeur dans la prière (Ép. et Off.).

L’Offertoire traduit les dispositions du saint au moment où il comparaît devant le souverain juge : « Ma prière est pure ; c’est pourquoi je demande que ma voix soit entendue dans le ciel ; que ma supplication s’élève vers Dieu ». La lente mélodie, avec les notes profondes du début est vraiment grave et implorante. Nous sommes aujourd’hui les « pauvres » auxquels le Seigneur distribue les trésors spirituels de l’Église par la main de saint Laurent ; c’est à nous aussi que s’adresse l’appel du Sauveur à le suivre en portant notre croix ; nous supplions Dieu de nous donner la force d’accomplir ce sacrifice où il sera notre témoin et notre aide, et déjà nous l’en remercions en nous appropriant les paroles de l’Épître : « Vous m’avez délivré de la flamme qui me pressait et m’entourait, et, au milieu du feu, je n’ai pas été brûlé ». Ce texte s’applique exactement à saint Laurent, mais à nous également dans chacune de nos épreuves. Ayons en profonde vénération ces antiques formulaires de messes dont la richesse a été l’aliment spirituel de tant de grandes âmes avant nous.

Dom Pius Parsch

Commentaires

  • Plusieurs fresques : celle de Fra Angelico, qui montre en effet un serviteur de Sixte II apportant au diacre un plateau rempli d'objets en argent (premier degré) :
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Saint_Laurent_re%C3%A7oit_les_tr%C3%A9sors_de_l%27%C3%89glise#/media/Fichier:San_Lorenzo_(Beato_Angelico).jpg
    Celle du Louvre, techniquement moins remarquable, montrant saint Laurent, sommé par Valérien de lui apporter les fameux trésors et se présentant devant l'empereur à la tête d'une cohorte de miséreux, une raillerie très concrète qui semble avoir été la cause de cet affreux supplice du gril à l'occasion et au cours duquel mon saint patron aurait encore fait de l'esprit. Si j'avais été le peintre, j'aurais forcé un peu le trait, tiré vers la caricature façon Astérix ou même Albert Dubout : culs-de-jatte en voitures à roulettes, manchots avec bandeau sur l'oeil, aveugles conduits par des borgnes, gueules cassées romaines, béquilles, bras en écharpe, tous attifés de guenilles, à moitié nus, avec un saint Laurent désopilé devant un empereur "genre" Brigitte Macron :
    https://collections.louvre.fr/ark:/53355/cl010053392

  • Etonnant que cette vigile ait survécu à l'élagage de 1955 et ait même été comme réhabilitée en 1960 par le transfert de la fête du Curé d'Ars du 9 au 8 août, alors que les vigiles d'apôtres, tout de même plus importants que le diacre romain, sont toutes (sauf le 28 juin) passées à la trappe...

  • C'est l'un des plus grands saints pour la même raison que Molière est l'un de nos plus grands écrivains : le génie comique ! Je trouve qu'il écrase saint Philippe Néri, patron des humoristes. Même si Néri pétille, il y a un petit quelque chose en plus à se foutre de l'autorité, ce qui dépeint aussi Molière. Et peut-être le saint Thomas de l'Evangile, même si je vais trop loin.

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