Il faut attendre le mardi pour que la liturgie nous montre le Christ ressuscité apparaissant à ses apôtres. C’est le… troisième jour (encore un) après la Résurrection.
La liturgie pascale souligne en effet l’un des grands paradoxes du christianisme en omettant toute apparition du Ressuscité au cours de la veillée pascale et du dimanche de Pâques. Les seuls personnages sont « l’Ange du Seigneur » qui annonce la Résurrection, et les myrophores auxquelles l’ange fait cette annonce. Tous ces personnages sont en un même lieu : le tombeau vide. C’est ce tombeau vide qui est au centre du mystère pascal.
Curieusement, dans le déroulement de la liturgie, les premières personnes auxquelles le Ressuscité apparaît, ce sont les « pèlerins d’Emmaüs », le lundi de Pâques. Deux hommes qu’on n’avait jamais vus auparavant, et qu’on ne reverra plus, et dont seul saint Luc nous parle.
Il faut donc attendre le mardi pour que la liturgie, poursuivant le texte de saint Luc, évoque la première apparition aux apôtres, qui a pourtant eu lieu le soir de Pâques. C’est ainsi le troisième jour des célébrations pascales que la liturgie nous montre les apôtres effrayés et stupéfaits devant cette vision que nous avons eu quant à nous tout le temps de méditer. Mais l’évangile relance la méditation en insistant sur un point précis du Credo : « la résurrection de la chair ». Bien qu’il entre alors que les portes sont fermées à clef, le Ressuscité n’est pas un fantôme, il mange du poisson et du miel, il est ressuscité comme il le dit lui-même « en chair et en os ». Et voilà le mystère qui s’épaissit devant le corps sans épaisseur qui est pourtant un vrai corps.
Commentaires
La question de savoir si les disciples d'Emmaüs sont "deux hommes qu’on n’avait jamais vus auparavant, et qu’on ne reverra plus, et dont seul saint Luc nous parle" est ouverte. On connaît le nom de l'un des deux, Cléophas, qu'on peut identifier à l'époux de cette Marie dont saint Jean nous dit qu'elle se tenait au pied de la Croix avec les deux autres Marie et qui était peut-être le frère ou le demi-frère de saint Joseph.
Comme les deux disciples ne Le reconnaissent pas tout de suite, notre brave curé de saint Augustin, il y a vingt ans, soutenait la thèse selon laquelle le Ressuscité prenait peut-être des apparences diverses, comme s'Il s'incarnait, en quelque sorte, dans des individus quelconques. Ce bon Père avait pour lui l'apparition au bord du lac de Tibériade (Saint Jean, 21) où Jésus, sur le rivage, n'est pas reconnu tout de suite par les Apôtres. Mais bon, ils sont au large, à la pêche, et Lui porte peut-être un manteau avec une capuche, de même que s'approchant des témoins d'Emmaüs, marchant sur la route, pris par leur conversation et qui ne l'avaient peut-être jamais vu que de loin, il a pu ne pas être reconnu.
C'est le "cœur brûlant" qui est important ici et c'est pourquoi le premier témoignage s'adresse à ceux qui "croiront sans avoir vu" : "Notre cœur n'était-il pas tout brûlant au-dedans de nous, quand il nous parlait en chemin, quand il nous expliquait les Ecritures ?"
En somme, le cœur brûlant d'abord, mais sans récuser les preuves visuelles et tangibles pour autant, c'est la gageure : le très très bon restau, à prix défiant la concurrence...
"Tous ces personnages sont en un même lieu : le tombeau vide. C’est ce tombeau vide qui est au centre du mystère pascal."
A notre niveau, les tombeaux, pleins comme vides, ne sont pas un mystère mais notre ordinaire. Le centre du mystère pascal n'est donc pas un tombeau vide, mais Celui qui en est sorti tout seul comme un grand.