La lecture évangélique était, à l’origine, celle où saint Jean narre le lavement des pieds (XIII, 1-15) et qui fut, par la suite, réservée au jeudi saint. Comme aux thermes, celui qui sort du bain — Jésus aimait à se servir d’images tirées de la vie quotidienne de son temps afin de se faire mieux comprendre par les simples — n’a besoin que de se laver les pieds ; ainsi, celui qui veut célébrer dignement la Pâque éternelle avec Jésus, celui qui veut être avec lui, doit se purifier auparavant même des plus légères imperfections, dans le sang de l’Agneau et dans les ardeurs de son amour.
Plus tard on introduisit dans la liturgie stationnale de ce jour, la lecture de la Passion du Seigneur selon saint Marc (XIV-XV). Comme l’observent les exégètes, ce jeune homme dont il est parlé, éveillé brusquement par le tumulte et par l’annonce de l’arrestation de Jésus, était probablement l’auteur même de l’évangile, Marc, qui, sans se nommer directement, met ainsi toutefois une sorte de signature à son écrit évangélique. Tous les traits s’accordent en faveur de Marc, et rendent le récit très naturel. Marc demeurait en effet avec sa mère à Jérusalem, peut-être un peu en dehors des quartiers habités, en sorte que les premiers fidèles firent de sa maison leur lieu de réunion. Quand Jésus passa devant son habitation, le jeune homme reposait déjà, et, selon l’usage palestinien, ayant déposé ses vêtements du jour, il s’était enveloppé dans un large drap, qui est indiqué dans le texte comme étant de la toile la plus fine, car il s’agissait en effet de personnes riches. Au bruit de la troupe, le dormeur s’éveille et, ayant appris que Jésus, capturé, passait, il s’élance comme il était, hors de la maison et commence à se compromettre avec les soldats, exprimant peut-être même quelque menace à leur égard. L’un de ces hommes qui, à Gethsémani, avait expérimenté que les disciples du Nazaréen savaient encore manier l’épée, veut s’emparer de l’audacieux, mais le jeune homme, agile, lui laisse en main le drap et s’enfuit.
Comme l’observe saint Grégoire, celui qui veut échapper aux violences du démon doit d’abord procéder à un parfait dépouillement intérieur, comme font les athlètes dans l’arène ; il est nécessaire que le diable n’ait aucune prise sur nous et il faut donc lui abandonner de bon cœur les choses matérielles, afin d’arracher l’âme à ses griffes.
Bienheureux cardinal Schuster
Commentaires
"Il est nécessaire que le diable n’ait aucune prise sur nous et il faut donc lui abandonner de bon cœur les choses matérielles, afin d’arracher l’âme à ses griffes."
Le "lui" est de trop !
Un mot français étrange, trop, tant par son orthographe que par son étymologie. Le Français, il est trop ! Ça le définirait presque !
Le "trop" français, c'est le contraire de l'understatement, mais ça le maîtrise, ça le domine, ça l'enveloppe, comme Molière qui est si prodigieusement drôle parce qu'il maîtrise le trop et l'understatement. Il y a du trop dans l'understatement qui refuse le trop, tandis que le trop s'accommode fort bien de l'understatement.