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Saint Yves

Le plus connu des cantiques à saint Yves fut écrit par l’abbé Jean-François-Marie Le Pon, en 1883. Il était professeur au petit séminaire de Tréguier et devenait cette année-là vicaire à la cathédrale. Pour la mélodie il prit le chant des « fragments épiques » de l’histoire du roi Morvan dans le Barzaz Breiz d’Arthur de la Borderie, mélodie qui servira aussi pour « Reine de l’Arvor ». En fait ce cantique était d’abord un appel aux dons pour reconstruire le tombeau de saint Yves, détruit en 1794 : « Votre tombeau est bien mesquin et bien pauvre, hélas ! mais on vous en érigera un autre plus beau que jamais. C’est notre nouvel évêque qui l’a dit, et nous viendrons à son secours, nous, les vrais Bretons. Chacun, qu’il soit de Tréguier, de Goëllo ou de la Cornouaille, tiendra à avoir sa pierre dans ce monument. »

Le projet émanait semble-t-il d’Arthur de La Borderie, et l’évêque, Mgr Eugène Bouché, y fut très favorable (ce qui lui valut le surnom d’« évêque de saint Yves », de même que l’auteur du cantique devint le « roitelet de saint Yves », et La Borderie le « docteur de saint Yves »). Comme l’avait prophétisé le cantique, le tombeau fut reconstruit. Mais l’évêque mourut avant l’inauguration et il fallut attendre 1890 pour qu’elle eut lieu. Anatole Le Braz y était :

Soudain une voix isolée, une voix d’homme, large et pleine, entonna sur l’air d’une vieille complainte guerrière, un cantique en langue armoricaine composé par un prêtre de l’endroit :
       N’an n’eus ket en Breiz, nan n’eus ket unan
       N’an n’eus ket eur Sant evel sant Erwan
Cela fit l’effet d’une diane dans la cour d’une caserne endormie. Un grand frisson secoua la foule. Les plus engourdis sursautèrent. Un chœur formidable se mit à répéter chaque verset à la suite du chanteur. Ce fut une clameur folle, éperdue, dont toute la cathédrale vibra. Ce cantique de saint Yves, entonné à tue-tête par plus de cinq mille voix, montait en une clameur formidable et roulait au loin comme un hymne de guerre.

N'an eus ket e Breizh, na n'eus ket unan
N'an eus ket ur sant, evel sant Erwan
N'an eus ket ur sant, evel sant Erwan.

Il n’y a pas en Bretagne, Il n’y en a pas un
Il n’y a pas un Saint tel que Saint-Yves.
Il n’y a pas un Saint tel que Saint-Yves

N'eus ket en Argoad na mui en Arvor,
Koulz ha Sant Erwan 'vit an dud a vor. (bis)

Il n’y a pas en Argoat, ni davantage en Armor,
Aussi bien que Saint-Yves pour les gens de la mer

N'an eus ket er vro, dre-holl e larer,
Hag a vez ken mat 'vit al labourer.

Il n’y a pas dans le pays, comme on dit,
Qui soit aussi bon pour le paysan.

N'eus ket kaeroc'h skouer d'an dud a lezenn
Evit sant Erwan, skouer ar veleien.

Il n’y a pas de meilleur exemple pour les gens de Loi
Que Saint-Yves, exemple pour les prêtres.

Ha d'ar beorien gaezh ha d'an dud a boan
Na n'eus ket gwelloc'h eget Sant Erwan.

Et pour les malheureux pauvres et les gens en la peine,
Non, il n’y a pas meilleur que Saint-Yves.

Ma fell deoc'h an tu da gaout ho mennad
Pedit Sant Erwan, he pedit ervat.

Si tu veux réaliser ton désir,
Prie Saint-Yves, et prie bien!

E-pad e vuhez ur skouer 'vit an holl
Bevomp eveltañ, ne daimp ket da goll.

Rendant sa vie exemplaire pour tous,
Vivons comme lui, nous n’irons pas à notre perte.

Evel hon Tadoù, int, tud a gredenn,
Lavaromp d'ar Sant, 'n ur gaer a bedenn:

Comme nos pères, eux, hommes de foi,
Disons au Saint, dans une belle prière :

Aotrou Sant Erwan, Patron Breizh-Izel,
Bezañ treitour deoc'h, nann, kentoc'h mervel

Monsieur Saint-Yves, patron de la Basse-Bretagne,
Te trahir, non, plutôt mourir !

Ci-après la traduction par l’abbé Pierre France de l’intégralité du cantique de 1883 :

Il n’est point en Bretagne, il n’est point un saint, mais pas un qui soit comparable à saint Yves.

Il n’est point dans nos champs boisés, ni sur les bords de la mer, il n’en est pas un aussi bon pour les marins.

Il n’en est point un au pays, tout le monde le dit, qui soit aussi favorable aux laboureurs.

Il n’est point un plus beau modèle pour les hommes de lois, que saint Yves qui est en même temps le miroir des prêtres.

Et pour les pauvres si dignes de pitié et pour tous ceux qui souffrent où trouverait-on un meilleur patron que saint Yves !

Il n’est point une chapelle dans toute la Basse-Bretagne qui soit aussi élégante qne sa chapelle.

Si vous voulez prier, mais prier comme il faut, allez à Minihy-Tréguier, pour obtenir votre vœu.

Comme il est doux de prier, quand on est dans la peine, là où pria autrefois ce grand saint ! Comme on est heureux de visiter le manoir béni où est né le plus grand saint de la Basse-Bretagne.

Ce manoir de Kermartin, qui vit en outre cette âme sainte s’envoler vers le ciel !

Il n’est point non plus en Bretagne une église aussi belle que la cathédrale de Tréguier.

C’est pour saint Tugdual, notre père bien-aimé, que vous l’avez bâtie, ô grand saint Yves.

C’est là qu’est votre tombeau, et il n’en est pas un sur lequel se soient passés tant de miracles.

J’irai le visiter à partir de Kermartin, et quand il me faudrait faire le voyage à genoux.

Votre tombeau est bien mesquin et bien pauvre, hélas ! mais on vous en érigera un autre plus beau que jamais.

C’est notre nouvel Evêque qui l’a dit, et nous viendrons à son secours, nous, les vrais Bretons. Chacun, qu’il soit de Tréguier, de Goëllo ou de la Cornouaille, tiendra à avoir sa pierre dans ce monument.

Et quand il sera achevé, quelle belle fête à Tréguier ! Nous y verrons tous les Evêques de la Bretagne !

Tous ces Evèques viendront avec le nôtre prier sur la tombe de saint Yves.

Notre nouvel Evêque nous l’a dit, et c’est saint Yves qui se charge de l’en récompenser.

Commentaires

  • Belle fête de Saint Yves, cher Monsieur Daoudal, qu'il veille sur vous et intercède en votre faveur. Continuez ainsi votre blog si instructif et intéressant !

  • pourquoi ne pas dire que, par décision préfectorale, iln'y a pas de pardon de saint Yves en 2021 ?
    la persécution douce macronienne continue

  • Il est curieux de voir que par glissement, le refrain du cantique s'est muté :
    Au départ, c'était "N'en eus ket e Breizh, n'en n'eus ket unan, n'en n'eus ket ur sant evel sant Erwann"
    Il n'y a pas en Bretagne, il n'y en a pas un, il n'y a pas un saint comme saint Yves"
    Qui est devenu plus tard :

    "Nann, n'eus ket e Breizh, nann, n'eus ket unan, nann n'eus ket ur sant, evel sant Erwann."

    "Non, il n'y a pas en Bretagne, non il n'y a pas un seul, non il n'y a pas un saint comme saint Yves" Ce qui rtevient à peu près au même, mais avec un moidre niveau de langage.

    Pour en savoir plus,s, voir l'excellent article de Fa~nch Morvannou :

    https://books.openedition.org/pur/22421

    et celui de Uisant Er Rouz sur Ar Gedour :

    https://www.argedour.bzh/la-longue-histoire-du-cantique-nann-nest-ket-e-breizh-ou-plutot-nen-eus-ket-e-breizh/

  • Bonne fête à tous les Yves !

    Je le prie pour que les juristes sortent du kantisme, cette plaie mondiale qui nous asservit...

  • Un peu tardivement, bonne fête :) !

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