Le carême est d’abord un temps de jeûne, comme le rappelle la collecte de ce jour : « Seigneur, veuillez accompagner de votre bienveillance les jeûnes que nous avons commencés ; pour que cette observance pratiquée corporellement, nous puissions aussi l’accomplir avec des âmes sincères. »
Mais deux autres « exercices » ont également une importance particulière : la prière et l’aumône.
C’est ce que soulignent ce jour les antiennes de Benedictus (au laudes) et de Magnificat (à vêpres) :
Cum facis eleemósynam nésciat sinístra tua quid fáciat déxtera tua.
Quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite.
Tu autem cum oráveris, intra in cubículum tuum: et clauso óstio, ora Patrem tuum.
Mais toi quand tu vas prier, entre dans ta chambre, et, porte close, prie ton Père.
On reconnaît l’évangile de saint Matthieu. Le chapitre 6 commence par trois paragraphes parallèles sur l’aumône, la prière et le jeûne (avec, au centre, le Pater). Après la phrase sur l’aumône reprise dans l’antienne, il y a : « afin que ton aumône soit faite dans le secret, et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra. » Il en est de même pour la prière et pour le jeûne. « Et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra. »
On remarque que les deux antiennes ont la même mélodie. Le parallèle entre l’aumône et la prière est voulu, et en quelque sorte commandé par la phrase qui est sous-entendue, la phrase du « secret »… La mélodie est en deux parties qui se terminent par une cadence sur la tonique, et qui riment. Dans l’antienne de Benedictus l’accent est ainsi mis sur l’opposition entre la main gauche et la main droite. Dans l’antienne de Magnificat, les cadences sont sur « cubiculum » et « Patrem tuum », ce qui suggère fortement, sans avoir à le dire, que ton Père, qui est dans le secret de ta chambre, te le rendra…