Generátio hæc prava et pervérsa signum quærit : et signum non dábitur ei, nisi signum Jonæ prophétæ.
Cette génération dépravée et perverse demande un signe : et il ne lui sera pas donné de signe, sinon celui de Jonas.
Sicut fuit Jonas in ventre ceti tribus diébus et tribus nóctibus, ita erit Fílius hóminis in corde terræ.
De même que Jonas a été trois jours et trois nuits dans le ventre du gros poisson, de même le Fils de l’Homme sera dans le cœur de la terre.
La liturgie de ce jour est particulièrement riche, puisque la messe nous montre Moïse d’une part, Elie d’autre part, jeûnant « 40 jours et 40 nuits » comme le Christ dans l’évangile de dimanche dernier, en attendant dimanche prochain la Transfiguration où Jésus sera entre Moïse et Elie. Quant à l’évangile, il est composé de trois péricopes distinctes. Et pourtant les antiennes du Benedictus, aux laudes, et du Magnificat, aux vêpres, se concentrent uniquement sur la parole du Christ concernant le « signe de Jonas ».
Ces deux chants sont très anciens, car ils ne correspondent pas exactement à la Vulgate, ni à aucune autre version latine des évangiles. Ils sont propres à la liturgie. (Les différences sont « prava et perversa » au lieu de « mala et adultera » dans la première, et « ita » au lieu de « sic » dans la deuxième.)
L’insistance est donc sur l’annonce de la Passion et de la Résurrection. Non pas sur les 40 jours et 40 nuits (que nous sommes en train de vivre) mais sur les 3 jours et 3 nuits à venir, qui en sont le point d’orgue. Et uniquement sur ce « signe », sans allusion à ce que dit Jésus ensuite sur les Ninivites qui ont fait pénitence.
Les matines byzantines évoquent souvent Jonas, parce que la 6e ode fait écho à son cantique dans le ventre du gros poisson. On remarquera ce que chante la 6e ode de la fête de la Nativité de la Mère de Dieu (qui est la première fête de l’année liturgique, le 8 septembre) :
« Dans les entrailles du monstre marin Jonas, étendant les mains en forme de croix à l'image de ta Passion, après trois jours en sortit, ébauchant l'universelle Résurrection du Seigneur notre Dieu crucifié dans sa chair, le Christ illuminant le monde par sa Résurrection le troisième jour. »
Commentaires
Merci d'avoir mis en ligne cette image. Peut-être les lecteurs du blog aimeraient-ils savoir où se trouve l'œuvre d'art ici représentée. Elle appartient aux fresques du couvent de Saint-Nicolas aux Météores (Grèce, région de Thessalie). Celles-ci ont été peintes par le moine Théophane Strélitzas (appelé aussi Théophane le Crétois), qui a achevé l'ensemble en 1527. Les légendes disent (en traduction française du grec) :
- au-dessus de la baleine : « Jonas dans la baleine » ;
- au-dessus de Jonas : « Le prophète Jonas » ;
- sur le rouleau tenu par Jonas : « Des entrailles de l'Enfer il (=
Dieu) m'a tiré/sauvé ».
Si Théophane est à juste titre considéré comme un artiste de renom, son orthographe laisse fort à désirer. Les fautes sont multiples, dues souvent à l'iotacisme, qui a entraîné le passage au timbre /i/ d'une série de voyelles grecques. À titre d'exemple, sur le rouleau ἐρήσατο est en fait pour ἐρρύσατο (aoriste de ῥύομαι).
Bien cordialement vôtre,
François Trouillet
Merci pour ces références, que je n'avais pas trouvées.
Merci surtout pour l'inscription. Je n'arrivais pas à comprendre ερησατομι... dont le son m'était pourtant familier... Mais aussi pourquoi mettre un êta au lieu de tout bonnement un iota qui m'aurait peut-être mis la puce à l'oreille ?