« Prose » chantée après l’Alleluia de la messe, dans l’« Office du Sacré Cœur de Jésus, latin-français, imprimé par ordre de Monseigneur l’Archevêque de Paris [Christophe de Beaumont], pour être célébré chaque année dans son Diocèse le Dimanche après l’Octave du S. Sacrement », 1767. Cette séquence parut d'abord semble-t-il en 1737 dans le missel de Séez, puis on la trouvera dans les missels de Poitiers, de Lyon, de Lodève, de Soissons...
Commentaires
Merci pour cette belle "prose" baroque, délirante d'amour (on y apprend que la couleur rouge de la pourpre comme la couleur blanche des lys viennent du Coeur de Jésus). Ça nous change agréablement des couplets un peu ratiocinants du Lauda Sion).
La traduction elle-même délire un peu à la fin.
Les deux derniers vers disent en effet : "(O Coeur) Don du ciel (Caelitum), amour continuel (jugis,e), enivre-nous de ton amour". Il n'y est pas question de "nectar délicieux".
Notez : hîc = hinc ; fluentum,i (classique pour : fleuve) ; frangant me semble une coquille (ou une nasalisation tardive ?) pour fragant (d'où : fragance)
"Frangrant" est en effet une coquille, car dans les autres missels visibles sur internet c'est "fragrant". (En revanche il y aurait pu y avoir "flagrant", qui est une variante fréquente dans les anciens textes, notamment dans les manuscrits de la Vulgate.)
Il y a de très belles choses dans le Lauda Sion, mais on devrait supprimer les strophes 11 à 20 qui ne sont pas de la liturgie mais du catéchisme, comme vous dites ratiocinant.
Le Missel Romano-Lyonnais en vigueur au moment de la réforme liturgique contenait la prose suivante, traduite par Dom Gaspar Lefebvre (Prières et Offices propres au Diocèse de Lyon, Vitte, Lyon et Saint-André, Bruges, 1957, p. 123-124) :
Veníte, cuncti cúrrite
Ad Cor Jesu mitíssimum :
Cunctos vocat : accédite
Ad Cor amóre sáucium.
Venez, tous ; vous tous, accourez
Vers le très doux Cœur de Jésus !
Tous, il vous appelle : approchez
De son cœur percé par l’amour.
Hic puræ mentes háuriunt
Ætérnæ fontes grátiæ ;
Abscónditos repériunt
Thesáuros sapiéntiæ.
C’est ici que les cœurs purs boivent
La grâce à jamais jaillissante :
C’est ici que de la sagesse
Ils trouvent les trésors secrets.
Qui sitítis justítiam,
Rebus spretis fallácibus,
Plenam hauríte grátiam
De Cordis Christi fóntibus.
Vous, les assoiffés de justice,
Qui dédaignez les biens trompeurs,
Buvez donc la grâce plénière
A sa source, le Cœur du Christ.
Hic floret innocéntia :
Hic inflammátur cáritas :
Hic reis datur vénia :
Hic sanátur infírmitas.
Ici l’innocence fleurit,
Ici l’amour flambe en brasier,
Ici le pécheur est lavé,
Ici le malade est guéri.
Hic casta spirant lília,
Quibus nitéscunt vírgines :
Hic ungúntur ad prǽlia
Mox coronándi púgiles.
Ici le lis immaculé,
Parure des vierges, embaume ;
Ici, pour remporter la palme,
Les lutteurs s’imprègnent de force.
Terræ cedant divítiæ ;
Mundi cedant inánia :
Nostræ Christus divítiæ,
Nobis Christus est ómnia.
Fuyez, richesses de la terre !
Fuyez, bagatelles du monde !
Le Christ, voilà notre richesse ;
Le Christ seul : pour nous tout est là.
Castis amícum méntibus,
Jesu Cor amantíssimum,
Puris amándum córdibus,
In corde regnet ómnium.
Il est l’ami des âmes pures,
Le cœur très aimant de Jésus ;
Des cœurs purs, ah, qu’il ait l’amour,
De tous les cœurs qu’il soit le Roi !
Jesu qui lux de lúmine
Plenus es sapiéntia,
Cordis plenitúdine
Da fluat in nos grátia.
Jésus, lumière de lumière,
Plénitude de la sagesse,
De votre Cœur puisse la grâce
Déborder et couler en nous.
Qui candor es, in méntibus
Lux una nostris fúlgeas ;
Qui cáritas es, córdibus
Ignis consúmens árdeas. Amen.
Vous êtes la clarté suprême ;
Brillez en nous, lumière unique ;
Vous êtes l’amour : feu ardent,
Brûlez et consumez nos cœurs ! Amen.
Pendant que j'y suis, voici le texte de la bénédiction pontificale lyonnaise (Ibidem, p. 124) :
BÉNÉDICTION PONTIFICALE
Benedícat vos omnípotens Deus,
cujus Fílius sese mundo prǽbuit
mitem et húmilem corde ;
concedátque
ut tantum imitántes exémplum
mentes vestras
suávi jugo fídei subjiciátis.
R/. Amen.
Que le Dieu tout-puissant vous bénisse,
lui dont le Fils s’est montré au monde
doux et humble de cœur,
et qu’il vous donne la force,
sur les traces d’un tel exemple,
de soumettre vos âmes au joug bénin de la foi.
R/. Amen.
Quæ fluxérunt e sacráto Corde
sanguis et aqua
mundent vos ab omni peccáto,
ut inter hujus vitæ tempestátes
ad ætérnæ felicitátis portum
secúri téndere valeátis.
R/. Amen.
Que le sang de l’eau jaillis du Sacré-Cœur
vous purifient de tout péché,
pour qu’au sein des tempêtes de cette vie
vous puissiez cingler en toute sûreté
vers le port de l’éternel bonheur.
R/. Amen.
Et dum refrigéscit cáritas multórum,
in vobis magis ac magis árdeat ignis
quem Jesus venit míttere in terram,
et quo urénte corda vestra
templum Spíritus Sancti efficiéntur.
R/. Amen.
Tandis que se refroidit
la charité d’un grand nombre,
qu’en vous flambe de plus en plus
le feu que Jésus est venu apporter sur la terre,
et que, plongés en ce brasier,
vos cœurs deviennent le temple du Saint-Esprit.
R/. Amen.
Quod ipse vobis præstáre dignétur,
cujus regnum et impérium
sine fine pérmanet in sǽcula sæculórum.
R/. Amen.
Qu’il daigne faire cela pour vous,
Celui dont le règne et le pouvoir suprême
demeurent à jamais,
dans les siècles des siècles.
R/. Amen.
Benedíctio Dei omnipoténtis
† Patris, et † Fílii, et Spíritus † Sancti
descéndat super vos et máneat semper.
R/. Amen.
Que la bénédiction du Dieu tout-puissant,
† Père, † Fils et † Saint-Esprit,
descende sur vous et y demeure à jamais.
R/. Amen.
Merci. Cette bénédiction fait penser à des litanies mozarabes...
Merci pour la "prose" lyonnaise.
Chrétiens, ne dites plus "morituri", ceux qui vont mourir, mais "coronandi", ceux qui cherchent la couronne (et non la palme comme dit la traduc)