Pater imon o èn dis ouranis
hayiasthito to onoma sou
elthéto i vassilia sou
yénithito to thélima sou
os èn ourano kai épi tis yis
ton arton imon ton épioussion
dhos imin siméron
kai aphès imin ta ophilimata imon
os kai imis aphiémèn tis ophilétais imon
kai mi issénènguis imas is pirasmon
alla rhissai imas apo tou ponirou.
Ci-dessus, le Pater, en grec, dans sa prononciation liturgique, en transcription phonétique (donc toutes les lettres se prononcent, et comme il n’y a pas de voyelles nasales « on » se prononce « o-ne », et « in » se prononce « i-ne »).
« Notre Père, qui es dans les cieux (« le dans les cieux », dit le grec) / que soit sanctifié ton nom (« le nom de toi », dit le grec) / que vienne ton royaume / que soit faite ta volonté comme dans le ciel aussi sur la terre /Notre pain supersubstantiel (« le pain de nous le supersubstantiel ») donne-nous aujourd’hui / et remets-nous nos dettes comme aussi nous remettons les dettes à nos débiteurs / et ne nous introduis pas dans la tentation / mais délivre-nous du mal. »
Le Pater est composé de sept demandes. Trois concernent Dieu, quatre concernent l’homme, conformément au symbolisme des nombres : trois, c’est la Trinité, quatre c’est l’homme aux quatre membres qui vit dans un monde qui a quatre points cardinaux et quatre saisons. Et sept est donc le nombre total (créateur et création).
Mais on constate aussi que si les trois premières demandes sont très liées, les trois dernières demandes le sont également : on demande à être libéré du péché et de la tentation. Alors nous avons trois demandes vers Dieu et trois demandes pour l’homme, avec au milieu une demande centrale : celle du pain de chaque jour, et du pain supersubstantiel : la nourriture corporelle nécessaire à notre vie biologique, et la nourriture divine nécessaire à notre vie spirituelle. Le pain de la vie éternelle : le Christ, qui est au centre du Pater, pain descendu du ciel, qui est à la fois Dieu (les trois premières demandes) et homme – ayant revêtu la chair du péché (les trois dernières).
La « musique » du Pater en grec souligne tout cela.
Les trois premières demandes sont caractérisées par leur finale en « a-sou », et elles sont encadrées par deux propositions se terminant par « is (…) is ». (Ce qui répond à la question de savoir si « sur la terre comme au ciel » concerne la troisième demande, ou les trois : on voit clairement que ce sont les trois.)
Il y a ensuite la demande centrale du Pain, qui est une suite d’assonances en « on ». Elle a été discrètement annoncée par le Père dès le début de la prière, et elle va se retrouver en écho dans les deux demandes suivantes, car nous avons besoin de ce Pain pour pardonner et pour résister à la tentation. Les trois dernières demandes sont étroitement liées à la quatrième par le jeu des « imon, imin, imas ». Mais la dernière demande finit dans une sonorité étrangère au reste de la prière, qui donne l’impression de tomber à plat, sur un « ponirou » déconcertant : c’est le monde où nous vivons, le monde du mal, le monde de la dissonance, par contraste avec le monde divin des premières demandes, auquel renvoie néanmoins, faiblement, le son « ou ».
On dit que pour mieux comprendre le Pater on peut le lire et le méditer en commençant par la fin. C’est-à-dire par le pire de la condition humaine, pour arriver au Père. Les sonorités du Pater en grec soulignent aussi cette lecture : nous sommes dans le mal, la tentation, le péché, pour en sortir nous devons prendre le Pain, et par le Pain (le Christ) nous avons accès au Royaume. Et le « ou » mourant de « ponirou » est absorbé par le ferme triple « sou » de l’appartenance au Père. Lu ainsi, le Pater précise que nous devons pardonner à nos frères avant de participer au Saint Sacrifice, comme Jésus l’enseigne dans l’Evangile. S’étant incorporé au Christ, on peut alors dépasser « le ciel et la terre », la création sur laquelle on demandait que règne le Père, pour atteindre « les cieux » incréés qui sont le trône de la Trinité.
Commentaires
La version longue du Pater, en sept demandes, celle de Matthieu, a été composée par le diacre Philippe, auteur définitif de l'évangile dit selon Matthieu. Tout cet évangile est bâti sur des plans septénaires emboîtés les uns dans les autres.
La version courte, en cinq demandes, celle de Luc, a été traduite directement de l'évangile araméen primitif. Elle est donc plus proche de l''original christique. Par qui a-t-elle traduite, je vous le demande ? Par le diacre Philippe qui l'a fait à l'intention de Luc. Dans les deux versions on trouve des mots semblables (epiousion etc..) qui sont de Philippe.
Vous pouvez vous raconter les histoires que vous voulez, qui n'ont aucun fondement, avec le diacre Philippe. Quant à moi je vois dans cette musique du Pater la marque divine - un indice qu'il a pu être enseigné par Jésus en grec.
Il me semble presque blasphématoire de penser que lorsque l'Evangile nous dit: voici la prière que Jésus nous enseigne, il s'agisse d'une prière du "diacre Philippe"...
D'ailleurs aucun homme n'aurait pu imaginer une telle prière.
qu'est-ce qui permet de dire que l'Evangile selon saint Mathieu est l'œuvre du diacre Philippe ?
ça me semble une opinion bien aventurée; repose-t-elle sur un apocryphe ?
Les prières juives sont en hébreu.
C'est pourquoi, pour prendre un seul exemple, les prières d'Esther et de Mardochée, dans le livre d'Esther, n'existent qu'en grec...