L’hymne des vêpres et des matines est formé de quatre strophes tirées du grand poème A solis ortus cardine, de Sedulius, poème alphabétique qui retrace en 23 strophes la vie du Christ, dont le début est chanté à Noël. Ce sont ici les strophes commençant par H, I, L et N. Le premier vers était Hostis Herodes impie, il a été malencontreusement « corrigé » par Urbain VIII qui se croyait meilleur poète que les grands anciens. Or l’enjambement Deum-Regem n’est pas dans le style du poème.
Le voici chanté par les moines de Solesmes (bizarrement dans la version du bréviaire romain alors que le bréviaire monastique a gardé la version authentique), avec la belle traduction d’Isaac Lemaistre de Sacy (sous le pseudonyme de J. Dumont), dans son orthographe originelle. (La doxologie – la strophe de louange à la Trinité ajoutée pour la liturgie – n’est pas la même dans le bréviaire et chez Sacy.)
Crudélis Heródes, Deum
Regem veníre quid times ?
Non éripit mortália,
Qui regna dat cæléstia.
Ibant Magi, quam víderant,
Stellam sequéntes prǽviam :
Lumen requírunt lúmine :
Deum faténtur múnere.
Lavácra puri gúrgitis
Cæléstis Agnus áttigit :
Peccáta, quæ non détulit,
Nos abluéndo sústulit.
Novum genus poténtiæ :
Aquæ rubéscunt hýdriæ,
Vinúmque jussa fúndere,
Mutávit unda oríginem.
Jesu tibi sit glória,
Qui apparuísti Géntibus,
Cum Patre, et almo Spíritu,
In sempitérna sǽcula. Amen.
Pourquoy crains-tu d’un Roy la naissance nouvelle,
Herode, tyran furieux ?
Celuy qui donne aux siens la couronne des cieux,
Ne ravit point aux Rois leur couronne mortelle.
Les mages appellez du climat de l’aurore,
Suivent l’étoille qui leur luit :
Pour trouver la clarté, la clarté les conduit :
Leur foy marque en leurs dons que c’est Dieu qu’elle adore.
L’Agneau saint en ce jour dans l’onde consacrée
Plonge sa céleste blancheur ;
Et portant sans peché l’humble éclat de pecheur,
Rend par ce Sacrement l’ame impure épurée.
O puissance inouïe ! ô nouvelle avanture !
L’eau se change dans les vaisseaux ;
Et perd devenant vin, la nature des eaux,
Pour suivre les arrests du Dieu de la nature.
Qu’on adore le Pere, & l’Esprit ineffable,
Et toy IESVS Sauveur naissant,
Qui faisant craindre aux Rois ton sceptre tout-puissant
Parois Dieu dans l’enfance, & Roy dans une étable.