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Saint Herménégilde

Dans ses Dialogues (livre III, chapitre 31), saint Grégoire le Grand raconte la vie et le martyre de saint Herménégilde :

Beaucoup de personnes venues d'Espagne m'ont appris que le roi Herménigilde, fils du roi Lévigilde, converti par les prédications du vénérable Léandre, évêque de Séville, auquel je suis uni par les liens d'une ancienne amitié (1), avait quitté l'hérésie arienne pour embrasser la foi catholique. Son père, engagé dans l'hérésie d'Arius, employa les menaces et les promesses, la persuasion et la terreur, pour le replonger dans les ténèbres de l'hérésie. Il répondit avec une constance inébranlable qu'il ne pourrait jamais quitter la vraie foi, après l'avoir une fois connue. Lévigilde, irrité, lui ôta la couronne et le dépouilla de tous ses biens. Un traitement si dur ne put faire fléchir son courage ; son père inhumain le fit jeter dans une étroite prison, et charger de fers au cou et aux mains. Alors le jeune roi Herménigilde se prit à mépriser les royaumes de la terre pour aspirer de tout l'élan de son âme au céleste royaume. Couvert d'un cilice, accablé de chaînes et gisant à terre, il conjurait avec ferveur le Dieu tout-puissant de fortifier son courage ; plus il avait reconnu dans sa prison le néant des biens qui se peuvent ravir, plus il se sentait un généreux dédain pour la gloire d'un monde qui passe.

La solennité de Pâques étant arrivée, le perfide Lévigilde députa vers son fils, dans le silence d'une nuit profonde, un évêque arien, chargé de lui donner la sainte communion de sa main sacrilège, et de lui faire acheter à ce prix les bonnes grâces de son père. Mais, tout dévoué au Seigneur, le jeune confesseur accabla l'évêque arien de reproches justement mérités, et repoussa ses insinuations perfides ; car, s'il était couché sous le poids de ses fers, intérieurement il se tenait debout, tel qu'une colonne, dans le calme d'une sécurité profonde. Lorsque l'évêque arien fut de retour, Lévigilde se livra à de violents transports, et aussitôt il envoya ses appariteurs pour tuer dans sa prison le généreux confesseur de la foi ; ses ordres furent accomplis. A peine les satellites furent-ils entrés, qu'ils lui fendirent la tête à coups de hache et tranchèrent le fil de ses jours. Ils ne purent lui enlever, après tout, que ce que l'héroïque victime avait constamment méprisé en sa personne.

Mais, pour manifester sa véritable gloire, le Ciel fit éclater plus d'un miracle. Auprès du corps de ce roi immolé pour sa foi, et d'autant plus véritablement roi qu'il avait obtenu la couronne du martyre, on entendit dans le silence de la nuit retentir le chant sacré des psaumes. On rapporte aussi que dans ce même moment on vit des lampes allumées. C'était pour montrer que ses mortelles dépouilles, telles que les reliques d'un martyr, devaient être à juste titre l'objet de la vénération des fidèles. Son impie et parricide père fut touché de repentir ; il déplora son crime ; mais ses remords ne suffirent pas pour lui obtenir la grâce du salut. Il reconnut la vérité de la foi catholique ; mais comme il redoutait de froisser sa nation par une profession ouverte, il ne mérita pas de l'embrasser. Les chagrins et la maladie l'ayant conduit au terme de sa carrière, il manda l’évêque Léandre, qu'il avait auparavant persécuté avec tant de rigueur, et lui recommanda instamment son fils Récarède, qu'il laissait plongé dans l'hérésie, afin que les exhortations du saint prélat opérassent en lui l'heureux changement qu'elles avaient produit dans son frère. Après cette recommandation il mourut. Alors, au lieu de suivre les égarements du roi son père, Récarède marcha sur les traces du roi martyr son frère, renonça aux coupables erreurs de l'hérésie arienne, convertit à la vraie foi toute la nation des Visigoths, et refusa de recevoir sous ses étendards, dans toute l'étendue de son royaume, ceux qui ne craignaient pas de se constituer les ennemis de Dieu en restant infectés du venin de l'hérésie. Il ne faut pas s'étonner que le frère d'un martyr soit devenu le prédicateur de la vraie foi : les mérites du second obtinrent au premier la grâce de ramener dans le sein de Dieu une foule de personnes. Il importe de nous convaincre qu'une si belle entreprise n'eût pu se réaliser si le roi Herménigilde n'eût versé son sang pour la vérité ; car il est écrit : Si le grain de blé tombé en terre ne vient à mourir, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit. Nous voyons se renouveler dans les membres ce qui a lieu dans notre chef. Parmi la nation des Visigoths, un homme est mort pour procurer la vie à une multitude. Un seul grain tombé dans une terre fidèle a fait surgir une riche moisson d'âmes qui ont obtenu la foi. (Traduction de l’abbé Henry, 1851. Texte latin ici, avec la traduction grecque réalisée par le pape Zacharie.)

[En même temps qu’il faisait tuer son fils, le roi Lévigilde envoyait l'évêque Léandre en exil. Il se retrouva à Constantinople où il se lia d’amitié avec Grégoire, qui était alors ambassadeur du pape. De retour dans son pays, il convertit l’Espagne à la foi catholique grâce au roi Récarède. Son frère, le célèbre saint Isidore, docteur de l’Eglise, lui succéda sur le siège de Séville.]

Commentaires

  • C'est la haine de la reine Goswinthe, deuxième épouse de Léovigilde (et grand-mère de Ingonde, fille de Brunehaut et Sigebert, épouse catholique d'Herménégilde), arienne fanatique qui alimenta l'intransigeance du roi envers son fils Herménegilde et sa belle fille Ingonde, tous deux catholiques.
    Quand Récarède renonça à l'ariasnisme (concile de Tolède 589), sa marâtre Goswinthe fomenta des rébellions pour revenir à l'arianisme, sans succès.
    Et en 711 , l'Espagne inaugura les 8 siècles de domination musulmane....

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