Le 16 octobre dernier, la « Haute Cour » de Lahore a confirmé la condamnation à mort d’Asia Bibi pour « blasphème envers le Prophète ».
Le texte écrit du jugement date du 5 novembre et a été envoyé à la Cour suprême le 6. Les juges Muhammad Anwaarul Haq et Syed Shahbaz Ali Rizvi ont rendu public ce texte (oui il est en anglais, qui est langue officielle et langue de l’administration), à la fin duquel ils déclarent qu’ils le font parvenir aussi au gouvernement, car ils considèrent que la loi sur le blasphème doit être modifiée.
A lire ce jugement, il semble que la « Haute Cour » de Lahore soit davantage une cour de cassation qu’une cour d’appel. En effet elle ne réexamine pas les faits, elle examine seulement le jugement de première instance. Pour conclure, comme on le sait hélas, que ce jugement est inattaquable en l’état actuel des lois du Pakistan.
La première chose que l’on constate est que les juges sont d’une très grande sévérité pour les avocats d’Asia Bibi au cours du procès en première instance. A propos du premier témoin à charge (l’une des deux femmes qui l’ont accusée de blasphème), ils déclarent trouver « stupéfiant » que les avocats n’aient mené aucun contre-interrogatoire du témoin. Et après avoir évoqué le second témoin, ils ajoutent qu’ils ont été « surpris que pas la moindre suggestion n’ait été faite pour réfuter cette partie de sa déclaration ».
On sait que le principal avocat d’Asia Bibi avait déjà déclaré qu’il n’avait pas contesté les témoignages parce qu’en reprenant les propos allégués il se serait rendu lui-même coupable de « blasphème ».
La cour conclut : « Il apparaît que la défense n’a pas défendu son affaire avec le sérieux requis, en ce que l’aspect le plus important de la poursuite est resté non réfuté. »
Or, c’est un principe constant et entériné par la Cour suprême que si un fait n’est pas sujet à contre-interrogatoire il est considéré comme admis.
Et ce blasphème ne peut être puni que par la peine de mort depuis que le Tribunal fédéral de la charia, en 1991, a fait supprimer la peine de prison à vie comme étant « contraire aux enseignements de l’islam tels qu’ils sont prescrits dans le Saint Coran et la Sunna par le Saint Prophète ».
Mais si les juges attirent l’attention du gouvernement, c’est sur un autre aspect de la question. Dont ils ont conscience depuis la manœuvre d’un des avocats d’Asia Bibi, qui avait tenté de faire déférer sa cliente devant un… tribunal islamique puisque la justice civile paraissait paralysée. Or cet avocat avait découvert que pour le crime de blasphème, qui ne peut être puni que par la peine de mort, le tribunal de la charia doit acquérir la certitude que le blasphème a réellement été commis. Et pour cela, notamment, il y a une procédure qui s’appelle tazkiyah al shuhud : le tribunal doit enquêter sur les témoins pour s’assurer de leur crédibilité, en examinant de façon précise leur piété, leur droiture et leur intégrité.
Les juges ne le disent pas, mais cela est évident au Pakistan : si les tribunaux de l’Etat appliquaient cette disposition, la condamnation à mort de Sawan Masih, en mars dernier, n’aurait pas été possible, puisque son accusateur était manifestement ivre.
Les juges pointent donc du doigt ce qui apparaît comme une faille dans la procédure des tribunaux de l’Etat, et dans la loi elle-même.
Et ce faisant ils donnent évidemment un argument à la Cour suprême qui soit statuer sur le sort d’Asia Bibi.
La président du Conseil des oulémas du Pakistan, Hafiz Tahir Ashrafi, défenseur acharné des lois sur le blasphème, s’est déclaré favorable à cette demande, car « dans tous les cas la preuve doit répondre aux normes prescrites dans la jurisprudence islamique »… Mais Ghulam Mustafa Chaudhry, conseil des accusatrices d’Asia Bibi, et président du mouvement d’avocats « Irrévocabilité de la Prophétie », a déclaré que « les lois anti-blasphème sont parfaitement bonnes, il n’y a aucune nécessité d’y introduire une modification de procédure. Ou alors il faut aussi nommer les juges selon les critères de l’islam. D’ailleurs la société tout entière doit fonctionner selon les principes islamiques, et ne pas chercher à grappiller des lois qui conviennent aux intérêts de certains »…
Commentaires
Quand François va-t-il réagir ? Sauriez vous quelles sont les interventions officielles de l’Église dans cette affaire ? Y en a-t-il eu ?
Il n'y a rien d'officiel.
Il n'y a rien d'officieux non plus.
« Quand François va-t-il réagir ? » : François jamais !
Je suis issu d'un collège de jésuite (en dehors de la France) pur jus donc je vous donne « ma version » de son raisonnement (mais je peux me tromper totalement !).
François parle de Rome où il est évêque (comme il aime le dire), donc il raisonne dans cette structure de pensée ; là les/ses périphériques existentiels ne sont pas des catholiques, mais des réfugiés économiques (pardon politique) en grande (en totale) majorité mahométane. Au Pakistan c'est l'inverse, le centre du cercle en totalité c'est les mahométans, le périphérique c'est Asia Bibi qui elle est chrétienne.
Là il y a un problème insoluble pour le raisonnement d'un étudiant issu des jésuites.
Il ne va pas « prêcher » contre SA « paroisse » !
Comment voulez-vous défendre « une chrétienne » que lui ne considère pas comme répondant à sa définition de périphérique existentiel qu'il définit comme « tout sauf des catholiques » ?
Et ce n'est pas la première fois qu'il reste indifférent à la souffrance de chrétiens vivant dans des pays à majorité mahométane.
Quand il m'a scandalisé en faisant venir pour la plantation d'un arbre (du malheur) au Vatican, un musulman et un juif (attention je n'ai rien contre ces personnes, j'insiste), il a tout simplement fait venir « ses » « périphériques » au centre.
La prochaine plantation je pense qu'il devrait la faire avec le secrétaire général de l’ONU et Scalfari & cie.
Et cet arbre-là ce sera l'arbre du « syncrétisme » et il aura la forme d'un serpent.
Ce n'est peut-être pas anodin l'éclair touchant la coupole de St Pierre le soir de l' élection de François ???
Pour confirmer mes pensées de ce Pape François, je me réfère à ses paroles et actions:
-A Lampédus: il affirme «la proximité de l'Église» aux «chers immigrés musulmans» en ce début de ramadan dont il espère de «bons fruits spirituels», afin de «rechercher une vie plus digne pour vous et vos familles».(Figaro)
- A Strasbourg: "S'exprimant en vue de ce voyage, le cardinal Pietro Parolin a aussi souligné vendredi l'importance de s'attaquer au «grand problème de l'Europe, le chômage qui touche tant de jeunes». Et de manifester une «plus grande solidarité» vers les plus faibles et vers «les migrants»."(Figaro)
De son mépris pour les Catholiques :
"Surtout, il ne prendra pas le temps d'une prière à la cathédrale de Strasbourg, qui célèbre pourtant son millénaire cette année. Un choix qui suscite beaucoup de déception dans le milieu catholique alsacien. Et beaucoup d'interrogations… Y compris à Rome: jamais un pape n'a encore osé exclure d'un déplacement un simple geste religieux."(Figaro)