Nocte surgentes vigilemus omnes,
Semper in psalmis meditemur, atque
Viribus totis Domino canamus
Dulciter hymnos,
Ut, pio regi pariter canentes,
Cum suis sanctis mereamur aulam
Ingredi cæli, simul et beatam
Ducere vitam.
Præstet hoc nobis Deitas beata
Patris ac Nati, pariterque Sancti
Spiritus, cujus reboat in omni
Gloria mundum. Amen.
Levons-nous dans la nuit, coupons-la par nos veilles,
Faisons-la résonner de nos plus doux accords ;
Et pour chanter d’un Dieu les plus hautes merveilles,
Unissons nos efforts.
Joignons aux voix des saints une sainte harmonie,
Qui mérite une entrée en ces brillants palais
Où l’on goûte avec eux le bonheur d’une vie
Qui ne finit jamais.
Daigne nous l’accorder la sagesse profonde
De cette essence unique en trois divins suppôts,
Dont la gloire remplit de l’un et l’autre monde
Les plus vastes enclos.
Hymne des matines du dimanche, traduction-adaptation de Pierre Corneille.
Commentaires
"suppôts" n'est pas heureux.
Corneille a utilisé le terme technique de théologie qui correspond au grec hypostase. Aujourd'hui, dans le langage courant, suppôt ne s'utilise plus guère que pour dire "suppôt de Satan", ce qui rend même incompréhensible le vers de Corneille. Mais à son époque le mot suppôt était utilisé dans le langage courant dans un sens proche du sens théologique, si j'en crois le dictionnaire de l'Académie française:
"se disait de celui qui était attaché à un corps, à une compagnie, et qui remplissait certaines fonctions pour ce corps, cette compagnie: anciennement les imprimeurs et les libraires étaient suppôts de l'université."
Suppôt a pris un sens presque exclusivement péjoratif, il n'en n'était pas ainsi au XVIIème siècle.
Littré dit à propos de "suppôt", troisième acception :
"Terme de philosophie. Ce qui sert de fondement, de soutien, de sujet. En termes de l'école, on dit que l'humanité est le suppôt de l'homme. "Un homme est un suppôt : mais, si on l'anatomise, sera-ce la tête, le coeur, l'estomac... ?" [Pascal, Pensées"
http://littre.reverso.net/dictionnaire-francais/definition/supp%C3%B4t
Il semble Corneille a pris ce sens. Ce qui signifierait, si mon hypothèse est la bonne, que les trois personnes divines sont les trois sujets d'une unique substance. Dans ce cadre, le suppôt n'est à entendre qu'analogiquement avec le sens qu'il prend dans cet aphorisme selon lequel "L'humanité est le suppôt de l'homme." Le concept "homme" s'incarne dans la diverse humanité.
Si vous êtes d'une autre opinion, n'hésitez pas à la donner.