BICHKEK (Reuters) - Le Kirghizistan, maillon faible de l'Asie centrale, est un terrain de choix pour les extrémistes islamistes, estime le chef des services de sécurité, assurant que certains étaient impliqués dans les troubles qui ont éclaté récemment.
"Depuis 20 ans, le Kirghizistan est dans un état permanent de crise économique et sociale. De ce fait, le Kirghizistan est le maillon le plus faible pour les organisations terroristes qui veulent commettre des attentats", a déclaré Kenechbek Douchebaïev lors d'une conférence de presse.
La situation s'est considérablement dégradée depuis le soulèvement populaire d'avril, qui a entraîné le départ en exil du chef de l'Etat Kourmanbek Bakiev et la mise sur pied d'un gouvernement intérimaire dirigé par Roza Otounbaïeva.
Les récents affrontements entre communautés kirghize et ouzbèke, qui ont fait officiellement 250 morts et 400.000 déplacés, ont suscité une vive inquiétude, notamment aux Etats-Unis et en Russie, qui disposent de bases militaires au Kirghizistan.
La communauté internationale redoute que l'instabilité ne favorise l'enracinement d'une guérilla islamiste sur l'une des principales voies d'acheminement de la drogue produite en Afghanistan.
"Des organisations terroristes cherchent depuis longtemps à instaurer un califat islamique en Asie centrale. Tous les problèmes que nous avons dans le Sud offrent un terrain fertile pour mener de telles attaques", a poursuivi Kenechbek Douchebaïev, montrant à la presse des armes et des documents de propagande islamiste saisis selon lui cette semaine dans la communauté ouzbèke.
Les cinq Etats d'Asie centrale, tous laïques, sont en proie à un activisme islamiste croissant qui se nourrit autant de la guerre en Afghanistan que de la pauvreté endémique ou de la nature des régimes locaux.
La lutte antiterroriste, dont les mouvements de défense des droits de l'homme dénoncent les dérives, a justifié des milliers d'arrestations qui alimentent un ressentiment propice au recrutement du Mouvement islamique d'Ouzbékistan (Mio) et du Hizb-ut-Tahrir, les deux groupes les plus visibles de la région.
Outre les mouvements islamistes, Kenechbek Douchebaïev met en cause les partisans du président déchu, bien implantés dans le Sud. "Leur fierté en a pris un coup. Ils veulent retrouver leurs biens et leur pouvoir", a-t-il affirmé.
Kourmanbek Bakiek, désormais exilé à Minsk, nie toute implication. Le président déchu a jugé inutile mercredi de chercher les responsabilités tant qu'une enquête internationale n'aura pas été menée.
"Jusqu'ici, on m'a seulement dit que l'étincelle était une simple querelle entre membres de deux groupes ethniques", a-t-il dit, sans exclure l'implication de narcotrafiquants ou d'extrémistes islamistes.
Maria Golovnina
Jean-Philippe Lefief pour le service français, édité par Gilles Trequesser