La Commission européenne a décidé hier de déférer les 27 Etats membres de l'UE devant la Cour européenne de Justice, pour que celle-ci constate que leur décision de n'accorder que 1,85 % d'augmentation de salaires aux fonctionnaires européens est « illégale ». Les 27 avaient en effet jugé impossible d'accorder aux fonctionnaires l'augmentation de 3,7 % résultant de l'application automatique des mécanismes institutionnels alors que plusieurs pays ont gelé les salaires de leurs propres fonctionnaires en raison de la crise. « Nous parlons du respect des règles établies. Ce n'est pas quelque chose qui relève des politiques, nous parlons de la règle de la loi », a déclaré un porte-parole.
Ce sont donc les juges de Luxembourg, qui gagnent 240.000 € par an, qui vont décider de l'augmentation de salaires... dont ils vont eux-mêmes bénéficier... Et dont vont également bénéficier les commissaires, qui ont décidé à l'unanimité de déférer les 27 devant la CJE (ce qui fait pour la baronne rouge qui est à la tête de la diplomatie européenne une augmentation de son salaire annuel de... 1.000 euros tout ronds...)
Pendant ce temps, on apprend que le président et les vice-présidents du Parlement européen vont présenter un projet visant à augmenter de 8,6 % l'allocation versée aux députés européens pour leurs assistants parlementaires...
Commentaires
S'il n'y avait que les juges et les commissaires, je comprendrais votre ironie, mais les 45 000 autres agents des institutions européennes n'émargent pas au même tarif. La précarisation de l'emploi dans la fonction publique européenne, comme dans bon nombre de fonctions publiques nationales, est bien réelle désormais. Sur ces 45 000 agents, nombreux sont les intérimaires, les contractuels et les fonctionnaires de grades inférieurs qui ont pourtant dû prouver de multiples compétences, linguistiques notamment (pas de promotion si on n'est pas capable de travailler dans trois langues différentes), passer des concours très sélectifs pour avoir un statut et un emploi qui, certes, sont loins d'être les pires situations professionnelles, mais qui ne leur garantissent pas forcément, en particulier aux agents devant quitter leur pays d'origine avec leur famille, des revenus suffisants dans la mesure où le conjoint se retrouve bien souvent sans emploi à Bruxelles ou à Luxembourg. C'est une affaire de choix, c'est clair, mais les États membres se montrent particulièrement malhonnêtes dans ce dossier, car ils avaient eux-mêmes décidé et valider l'application d'une méthode d'ajustement des rémunérations (positif ou négatif selon les années, mais quand ça baisse, la presse se tait) qu'ils avaient inscrite dans les statuts de la fonction publique européenne, donc dans la loi, jusqu'en 2012, pour éviter justement tout conflit. Or, aujourd'hui, en vertu de quelque opportunisme politique de mauvais aloi, ceux qui ont fait le droit prétendent pouvoir le défaire avant l'expiration du "contrat" et font passer les agents européens pour de vilains gamins gâtés et capricieux, ce que ne manque pas de relayer avec entrain et maintes railleries l'ensemble de la presse. Comme souvent, la réalité est tronquée pour caresser dans le sens du poil une certaine opinion publique, attiser les jalousies et les frustrations des éternels grincheux afin de préparer tranquillement mais sûrement le nivellement par le bas de notre environnement social et professionnel dans son ensemble.
@Daniel Pélissier, certes on comprend la "précarisation" de la fonction publique européenne... Je pense à la lecture de votre descriptif qu'elle très relative au regard de ce qui se passe dans le privé. Quand aux augmentations mentionnées, elles sont sans nul équivalent aux pratiques des entreprises en 2009 et aux prévisions pour 2010. Il faut se le dire et le rappeler. Le taux de 1,85 % est important aujourd'hui.
Quand au nivellement par la bas de l'environnement social et professionnel dont vous faites mention, vous conviendrez que l'UE par le libre échange et ces politiques d'immigration (livre vert et livre blanc) en est en grande partie responsable.
Le point essentiel est celui-ci: le pouvoir politique a-t-il le droit ou non de modifier des conventions, quand les circonstances l'exigent?
La réponse, pour quiconque ne confond pas gouvernement et administration, est oui.
La réponse, pour un fonctionnaire qui ne connait que les "droits acquis", est non.
La réponse, pour les super-fonctionnaires de Bruxelles et de Luxembourg, est un super-non.
C'est une négation à la fois de la démocratie et du bien commun.
Cette affaire montre plusieurs choses :
- la commission qui s'en prend aux états et n'hésite pas les assigner en justice alors qu'elle est censée être à leur service
- la notion incompréhensible d'augmentation annuelle automatique d'une part, et d'autre part sans prise en compte du contexte économique
Je travaille dans le privé, je n'ai pas eu d'augmentation depuis 5 ans. Les seules augmentations reçues sont du coté des impôts. Notamment, la nouvelle règle de calcul qui fait qu'à salaire constant d'une année sur l'autre, les parts des enfants entrainent une réduction moindre désormais !
Et si en plus vous me dites qu'il va falloir donner plus d'argent pour Bruxelles et Luxembourg, sans compter les fonctionnaires nationaux et territoriaux, alors je m'offusque !
Parce qu'en contre-parti je n'ai droit à aucune aide.
Donc, oui, la commission se moque du monde et a largement tort dans sa démarche ! Au nom de quoi y aurait-il augmentation pour tous ces gens ? Sont-ils plus productifs qu'avant ? L'UE fonctionne-t-elle mieux ?
Non, pas que je sache.
Par contre, pour les 3 % du PIB, quand on ne peut plus les tenir, les règles, ils s'asseoient dessus.
J'imaginais qu'être fonctionnaire de UE c'était le "must", la crème de la crème du pouvoir, de la rémunération, des privilèges, et l'on apprend qu'ils sont mal payés, et presque honnêtes, zut alors!