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Sainte Thérèse (d’Avila)

La première leçon que Notre Seigneur nous donne pour bien prier, c'est, vous le savez, de nous retirer en particulier, ainsi qu'il l'a toujours pratiqué lui-même, non qu'il eût besoin de cette retraite, mais pour notre instruction. L'on ne peut, comme je vous l'ai dit, parler en même temps à Dieu et au monde : c'est pourtant ce que font ceux qui, au temps même où ils récitent des prières, écoutent ce qui se dit près d'eux ou arrêtent leur esprit à toutes les pensées qui leur viennent, sans retenue d'aucune sorte. A la vérité, ceci n'est point sans exception : une personne peut être souffrante de l'estomac surtout, ou de la tête, au point que tous ses efforts pour se recueillir soient inutiles. Dieu permet aussi, pour le bien de ceux qui le servent, qu'il y ait des jours de grandes tempêtes, de manière que ni soins ni peines ne peuvent parvenir à les calmer, incapables qu'ils sont soit de penser à ce qu'ils disent, soit de fixer sur un sujet quelconque le vagabondage et les folies de leur esprit.

Le déplaisir qu'ils en ressentiront leur fera connaître qu'il n'y a point de leur faute ; qu'ils s'épargnent donc le tourment, la fatigue de vouloir ramener à la sainte raison leur entendement malade ; ils ne le pourraient pas en ce moment, et ils ne feraient qu'accroître le mal. Qu'ils prient alors comme ils pourront, et même qu'ils ne prient point du tout, donnant ainsi à leur âme infirme un moment de repos. Ce temps doit être employé à d'autres actes de vertu. Telle est, à mon avis, la conduite à tenir par tous ceux qui sont soumis à cette épreuve, s'ils ont à coeur leur salut, et sont pénétrés de cette vérité, qu'on ne peut à la fois parler au monde et à Dieu.

Ce qui dépend de nous, c'est de tâcher d'être dans la solitude, lorsque nous voulons prier, et plaise à la divine bonté que cela suffise pour nous faire comprendre devant qui nous sommes, et ce qu'il répond aux demandes que nous lui adressons. Car pensez-vous qu'il se taise, encore que nous ne l'entendions pas ? Non certes, mais il parle à notre coeur toutes les fois que du fond du coeur nous le prions. Persuadez-vous, mes filles, que c'est pour chacune de nous en particulier que Notre Seigneur a fait cette prière, qu'il nous l'enseigne lui-même, et qu'un maître, quel qu'il soit, se tient tout près de son élève, et non pas à telle distance qu'il doive crier. Restez ainsi par la pensée auprès du divin Maître, quand vous récitez le Pater, et croyez que c'est un des meilleurs moyens de bien dire cette prière qu'il a daigné nous apprendre.

Vous me répondrez que prier ainsi c'est méditer, et que vous ne pouvez, et par conséquent ne désirez autre chose que faire des prières vocales. Hélas ! Il est des esprits si impatients, si amoureux de leur repos, que n'ayant ni l'habitude du recueillement, au commencement de la prière, ni aucune volonté de s'imposer la moindre contrainte, ils déclarent ne savoir et ne pouvoir faire autre chose que prier vocalement. Eh bien ! je l'avoue, ce que je viens de proposer c'est l'oraison mentale ; mais je déclare en même temps que je ne comprends pas comment on peut s'en dispenser, si l'on veut bien faire la prière vocale, si l'on comprend quel est celui à qui elle s'adresse et si l'on se rappelle qu'il y a obligation de prier avec attention. Plaise à Dieu qu'avec tous ces soins, nous parvenions à bien réciter le Pater et à le dire jusqu'au bout sans distraction ! Le moyen le plus sûr d'y parvenir, j'en ai maintes fois fait l'épreuve, c'est d'arrêter notre esprit, autant qu'il est en nous sur Celui à qui s'adressent les paroles. Soyez pour cela patientes et tâchez d'acquérir une habitude aussi nécessaire.

(le Chemin de la perfection, 24)

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