Les hymnes du temps de la Passion sont Pange lingua, Lustris sex et Vexilla Regis, toutes trois de Venance Fortunat (composées pour l'accueil à Poitiers de la relique de la Sainte Croix que sainte Radegonde avait obtenue de l'empereur Justin II). En fait les deux premières forment une seule hymne, qui est divisée en deux parties. Ce Pange lingua a servi de modèle pour l'hymne composée par saint Thomas d'Aquin en l'honneur du Saint Sacrement.
Voici par morceaux ces hymnes de la Passion, et leur belle traduction-adaptation par Pierre Corneille.
Pange lingua gloriósi
Prælium certáminis,
Et super Crucis trophæum
Dic triúmphum nóbilem,
Qualiter Redémptor orbis
Immolátus vícerit.
Sers de pinceau, ma langue, et peins avec éclat
Ce noble et glorieux combat
Par qui la croix s'élève un trophée adorable :
Peins comme le sauveur de ce vaste univers
Par un amour incomparable
Se laissant immoler, triomphe des enfers.
De paréntis Protoplásti
Fraude Factor cóndolens,
Quando pomi noxiális
Mors(u) in mortem córruit,
Ipse lignum tunc notávit
Damna lign(i) ut sólveret.
Peins comme la bonté de son père éternel,
Dès que l'homme devint mortel,
Eut pitié de le voir perdu par une pomme ;
Fais voir comme dès lors son amoureux décret
Voulut que par un nouvel homme
Un arbre réparât ce qu'un arbre avait fait.
Hoc opus nostræ salútis
Ordo depopóscerat :
Multifórmis proditóris
Ars ut artem fálleret,
Et medélam ferret inde,
Hostis unde læserat.
Il cacha son dessein, et pour rusé que fût
L'ennemi de notre salut,
Ce trompeur fut trompé par la ruse céleste ;
Et quelques yeux qu'ouvrît ce lion infernal,
Sans que rien lui fût manifeste,
Le remède partit d'où procédait le mal.
Commentaires
Très beau!