Sur ce qui s’est passé lors de l’université d’été du PS à La Rochelle, voici une dépêche sans complaisance de l’Associated Press qui dit tout.
Bal des prétendants, tractations en coulisses, petites trahisons entre amis: le Parti socialiste a donné ce week-end à La Rochelle l'image d'un parti englué dans ses divisions et les manoeuvres d'appareils à deux mois et demi du congrès de Reims.
Les socialistes voulaient montrer lors de leur 15e université d'été leur capacité à incarner une "alternative crédible" à Nicolas Sarkozy. Si les quelque 3.000 militants présents ont studieusement travaillé dans les 21 ateliers, l'esprit n'était pas tout à fait le même parmi leurs dirigeants.
A trois semaines de la date-limite pour le dépôt des motions, qui départageront les prétendants à la succession de François Hollande, l'heure était aux grandes manoeuvres pour Ségolène Royal, Bertrand Delanoë, Martine Aubry ou Pierre Moscovici. Objectif: constituer une majorité dans un parti balkanisé. Au sortir de l'université d'été, la situation n'est pas plus claire. Aucun des prétendants ne paraît pour l'instant en mesure de réunir plus du quart du parti lors du vote sur les motions.
A ce petit jeu, Ségolène Royal se sera montrée la plus discrète. La finaliste de l'élection présidentielle de 2007, qui mise tout sur son aura parmi les militants, s'est contentée d'une apparition le premier jour, marquée par un appel quasi-mystique à "l'amour" entre socialistes et une rapide réunion de ses partisans. Samedi et dimanche, elle a préféré à La Rochelle la fête du Parti démocrate italien.
Son premier rival Bertrand Delanoë, qui avait officialisé sa candidature dans la semaine, a opté pour la stratégie inverse. Le maire de Paris et favori des sondages, arrivé dès jeudi à La Rochelle, y a passé tout son week-end, assistant au premier rang à la séance de clôture. Alors que Mme Royal entretient des relations tendues avec le parti, auquel elle reproche de ne pas l'avoir assez soutenue pendant la campagne présidentielle, M. Delanoë lui multiplie les déclarations d'amour. "Passer tous ces jours et ces soirées ensemble, c'est agréable", a osé le maire de Paris vendredi soir devant ses partisans.
Mais ce sont les "reconstructeurs", ensemble hétéroclite de ceux qui refusent l'alternative Royal-Delanoë, qui ont le plus alimenté la chronique par leurs difficultés à s'entendre. Les restaurants du port de La Rochelle ont été le théâtre de l'implosion des amis de Dominique Strauss-Kahn. Tandis qu'une partie des strauss-kahniens se rapprochait de Martine Aubry et de Laurent Fabius, l'autre, derrière Pierre Moscovici, concluait un accord avec les tenants de la "Ligne claire", ensemble de barons locaux emmenés par le maire de Lyon Gérard Collomb et le président du conseil général des Bouches-du-Rhône Jean-Noël Guérini. Les "reconstructeurs" ont donc toujours deux candidats au poste de Premier secrétaire: Martine Aubry, qui doit se déclarer dans la semaine, et Pierre Moscovici.
Les tractations ont même tourné au vaudeville lorsque M. Moscovici s'est retrouvé seul samedi à la table d'un restaurant pendant que ses "amis" déjeunaient en compagnie de Martine Aubry et Laurent Fabius.
Dans cette situation, l'appel à la "cohésion", à "l'unité" et à "l'esprit collectif" lancé dimanche par François Hollande, Premier secrétaire en bout de course, relevait largement du voeu pieu. D'autant que le futur ex-Premier secrétaire entend lui-même peser sur le congrès en favorisant l'émergence d'un "pôle central", sans doute derrière Bertrand Delanoë dont il s'est rapproché récemment.
Ces trois jours de festival socialiste à La Rochelle n'auront pas été de nature à améliorer dans l'opinion l'image d'un parti largement inaudible depuis sa défaite de 2007, la troisième consécutive à la présidentielle. Les divisions entre socialistes sur l'Europe ou l'Afghanistan ne les aident pas à se faire entendre. "On nous dit que le PS est inaudible, mais moi je l'entends trop!", a ironisé dimanche M. Hollande.