Du moment que le Seigneur accordait à beaucoup des guérisons de diverses sortes, ni temps ni lieu ne purent contenir l'empressement de la foule à se faire guérir. Le soir tombait, ils le suivaient ; le lac était là, ils le pressaient. C'est pourquoi II monte dans la barque de Pierre. C'est la barque qu'en S. Matthieu nous voyons encore agitée, en S. Luc remplie de poissions : vous reconnaîtrez ainsi et les débuts agités de l'Église et, plus tard, sa fécondité ; car les poissons représentent ceux qui se meuvent dans la vie. Là le Christ dort encore chez les disciples, ici II commande : II dort chez ceux qui tremblent, II est éveillé chez les parfaits. (…) Nulle agitation pour la barque où la prudence conduit, d'où est absente la perfidie, que pousse la foi. Comment pouvait-elle être agitée, ayant pour pilote celui sur qui est fondée l'Eglise ? Il y a donc agitation quand la foi est faible ; sécurité quand l’amour est parfait. Aussi bien, si l'on commande aux autres de jeter leurs filets, on ne dit qu'au seul Pierre : « Mène au large », c'est-à-dire dans la haute mer des controverses. Y a-t-il profondeur comparable à la vue des profondes richesses, à la connaissance du Fils de Dieu, à la proclamation de sa génération divine ? Celle-ci, l'esprit humain ne peut certainement la saisir et pleinement sonder par la raison ; mais la plénitude de la foi l'atteint. Car s'il ne m'est pas permis de savoir comment II est né, il ne m'est pas permis d'ignorer qu'il est né ; j'ignore le mode de sa génération, mais je reconnais le principe de sa génération. Nous n'étions pas là quand le Fils de Dieu est né du Père ; mais nous étions là quand le Père l'a déclaré Fils de Dieu. Si nous ne croyons pas Dieu, qui allons-nous croire ? Tout ce que nous croyons, nous le croyons comme vu ou entendu : la vue se trompe souvent, l'ouïe fait foi (« in fide est »).
Saint Ambroise