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Premier dimanche de Carême

« Frères, nous vous exhortons à ne pas recevoir en vain la grâce de Dieu. Car il dit: Au temps favorable Je t'ai exaucé, et au jour du salut Je t'ai secouru. Voici maintenant le temps favorable; voici maintenant le jour du salut. »

Tel est le début de l’épître du premier dimanche de Carême. Il y a ici un mot clef de l’Ecriture, et l’explication de ce mot, par Isaïe, par saint Paul, et par son insertion dans la liturgie en ce jour.

C’est le mot grec kairos, traduit par temps dans l’épître. Ce mot veut dire moment opportun, opportunité, occasion, et aussi temps présent. C’est le moment qui est actuellement favorable pour faire ceci ou cela. Dans l’antiquité on pouvait consulter les haruspices ou autres oracles pour savoir quand était ce moment favorable : ce sont les dieux qui me disaient quand était ce moment favorable, dans la succession du temps.

Kairos devient ainsi un des trois mots grecs désignant le temps. Il y a aion, qui est l’éternité, chronos, le temps qui passe (celui qu’on mesure avec un chronomètre), et kairos, qui est en quelque sorte le pont entre les deux. Ce que l’on appelle « l’instant de grâce », par exemple, quand on se trouve en communion avec la beauté d’une œuvre d’art. Il s’agit bien de cela. Il s’agit de cet instant où la grâce nous pénètre, où l’éternité se fait présente. Par un de ces éclairs sur l’au-delà, pour reprendre le titre de la dernière grande œuvre de Messiaen.

Les traductions disent généralement : le temps favorable. Or kairos veut déjà dire temps favorable. Il y a une redondance, pour souligner dans quel sens est employé le mot. Dans la citation d’Isaïe, le mot qui suit kairos est dekto, ce qui signifie acceptable, que l’on admet bien. Mais dans son commentaire, saint Paul utilise un autre mot, qui insiste encore davantage sur le sens de kairos : evprosdektos : que l’on reçoit favorablement, que l’on accepte avec empressement.

Ce temps que nous devons accepter avec enthousiasme, que nous devons vivre pleinement, c’est maintenant, car c’est maintenant le temps du salut, c’est l’aujourd’hui de Dieu, l’éclair de l’éternité qui éblouit et fait exploser le temps-chronos ; c’est aujourd’hui le « kairos » qui nous relie dès maintenant à l’éternité, en ce premier dimanche d’un carême qui doit être tout entier un kairos car il va nous conduire à la Résurrection, qui est la plus stupéfiante manifestation de la rencontre entre l’éternité et le chronos : le kairos qui se fait corps glorieux, et eucharistie.

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