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16e dimanche après la Pentecôte

L’année dernière je disais que l’évangile de ce dimanche est en deux parties. En fait la première partie doit elle-même être divisée en deux, car elle comprend deux enseignements distincts : d’une part le miracle de la guérison de l’hydropique, d’autre part la guérison effectuée un jour de sabbat.

Il y a donc trois pôles dans cette péricope : le miracle, le sabbat, l’humilité.

Jean-Sébastien Bach a composé trois cantates pour ce dimanche, en 1723, 1724 et 1726. Du moins, c’est ce que nous avons. Pour 1725, grand cru pourtant, il ne nous reste curieusement aucune cantate entre fin août et Noël, hormis celle de la fête de la Réforme, le 31 octobre, comme on peut le constater dans le précieux Guide pratique des cantates de Bach, par Philippe et Gérard Zwang (qui ont établi le classement chronologique des cantates).

Or il se trouve que chacune de ces cantates fait allusion à l’un des aspects de l’évangile : le sabbat en 1723, l’hydropique en 1724, l’humilité en 1726, à savoir les cantates BWV 148, 114, 47, qui sont dans le catalogue Zwang les ZK 45, 90, 152.

La dernière est celle qui « commente » le plus l’évangile. « Quiconque s’élève sera abaissé, quiconque s’abaisse sera élevé » : le texte oblige quasiment à la mise en œuvre des procédés baroques, et Bach ne se prive pas de multiplier lignes ascendantes et lignes descendantes, sur fond d’affirmation appuyée (c’est l’enseignement de Dieu).

D’autre part et surtout, si l’on trouve dans cette cantate comme dans les autres des mots particulièrement illustrés, « mis en scène », par la musique, l’une de ces illustrations, et cela est très rare, est en elle-même un enseignement spirituel.

C’est dans l’air de soprano : « Demut stammt aus Jesu Reich ». L’humilité vient du royaume de Jésus. Stammt veut dire « est issu de », et quand on parle d’une personne, « descend de ». L’humilité vient du Ciel, donc elle descend, elle aussi. Or, à deux reprises, la soprano chante des vocalises ascendantes sur stammt, ce qui est parfaitement contraire au procédé habituel de Bach, qui illustre les mots non seulement selon leur sens mais aussi sans s’occuper du contexte (ainsi peut-il développer des vocalises joyeuses sur Freude même quand il est dit qu’il n’y a pas de joie.)

C’est donc doublement contraire, puisque non seulement stammt indique une descente, mais qu’il s’agit de l’humilité, qui donc doit se traduire par une ligne descendante.

Ces étonnantes vocalises sur stammt montrent que Bach était un véritable homme et de foi et de prière, et qu’il avait compris le sens profond de l’évangile. Car il exprime ainsi cette vérité que l’humilité est la vertu qui permet de s’élever à Dieu, qui permet, nous dit la musique, de nous envoler littéralement vers Dieu, et de nous épanouir en lui. Et l’orgue (ou le violon) volette autour de la voix comme des anges souriants qui accompagnent cette montée.

Commentaires

  • Très flatté d'être cité par Xavier Valla. En ennemi éternel de l'actuel mouvement baroquolatre, je me permettrai cependant de faire remarquer que les lignes musicales ascendantes ou descendantes ne sont pas l'apanage d'un quelconque "style compositionnel baroque", mais ont été utilisées de tout temps. En particulier par les classiques, dont Jean-Sébastien Bach est l'ARCHETYPE.

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