Modestus s’étrangle de rage : « Personne jusqu’ici n’a osé me parler de cette façon ! »
« Sans doute n’as-tu jamais rencontré d’évêque ! » ironise Basile.
Entre le préfet Modestus, l’émissaire particulier de l’empereur Valens et Basile, l’évêque de Césarée, l’échange est particulièrement rude. Il faut dire que Basile, qui a déjà affronté l’empereur lui-même, ne va pas courber l’échine devant un vulgaire fonctionnaire. Dans l’épreuve de force qui l’oppose à l’empereur, arien convaincu, Basile ne cède pas un pouce.
La doctrine du prêtre Arius a été condamnée sans appel par le concile de Nicée, ses tenants ont été déclarés hérétiques. Les colères de l’empereur ou de ses sbires n’y pourront rien changer ni aujourd’hui, ni jamais. Basile n’a qu’un Credo, celui que Nicée a proclamé. Et, au nom de cette foi, Basile est prêt, s’il le faut, à donner sa vie. À bout d’arguments, Modestus se retire, jurant qu’il reviendra et qu’alors le fer parlera. Il se trompe. La farouche résistance de Basile a ébranlé l’empereur lui-même. Et tandis que les persécutions se déchaînent un peu partout, la Cappadoce est épargnée. Le métropolitain de Césarée conservera le libre gouvernement de son église durant les neuf années de son épiscopat, et ses évêques ne seront pas inquiétés.
Cette fermeté dans la foi et cette liberté face aux grands sont sans doute à l’origine de l’extraordinaire rayonnement de l’imposante figure de Basile. Celui que l’Eglise appela très tôt Basile le Grand, son frère Grégoire de Nysse et son ami de toujours Grégoire de Nazianze sont les trois grands Cappadociens qui marquèrent l’Eglise d’Orient par la justesse de leur théologie.
(Le Livre des merveilles)