Certains ne comprennent pas ce que je veux dire quand je parle d’une politique efficace d’accueil de la vie. Le mieux est de donner un exemple précis, que certains connaissent, et d’autres manifestement pas. Il s’agit de la toute petite association SOS Mamans de Winfried Wuermeling. Voici l’interview que nous avions publiée dans Reconquête (n° 228). Si l’Etat donnait des moyens à des associations comme celle-là, il y aurait déjà une chute des avortements, et la publicité faite à de telles actions aurait d’autre part un fort impact sur le public. Comme préparation à un changement législatif, dont je répète, tant qu’on ne m’aura pas donné le moindre indice du contraire, qu’il est tout simplement impossible à court terme.
SOS Mamans : une association qui lutte concrètement contre l'avortement
Winfried Wuermeling est un homme de multiples initiatives. Fondateur de l'UNEC (Union des nations de l'Europe chrétienne) et de sa "mini agence de presse RU" qui diffuse un bulletin hebdomadaire, et de Radio Silence (www.radio-silence.tv), organisateur de colloques sur la Sainte Tunique d'Argenteuil, militant de tous les combats pro-vie, il a constitué une structure intitulée SOS Mamans qui vient en aide, concrètement, aux futures mères en détresse. L'action de cette association (où le nom de Wuermeling n'apparaît jamais) est particulièrement admirable, car animée par le plus pur esprit évangélique : c'est l'amour de Dieu au service de la vie sans aucune autre considération.
— Comment est née l'idée de SOS Mamans ?
— Pendant six ans nous avons été une association pro-vie "standard" : manifestations et tractages contre l'avortement, lettres aux députés, articles dans les journaux amis, pèlerinages, collectes de signatures... Jusqu'au jour où nous nous sommes rendu compte que nous tournions autour de notre petit nombril. Que tout cela ne faisait pas baisser d'un seul le nombre des avortements, ce désastre pour la France, cette offense majeure contre le Créateur, ce suicide collectif "remboursé". Et nous avons décidé d'oublier "le haut" (les députés, les lois, les autorités de toute sorte, y compris religieuses), et de travailler comme le Bon Samaritain de l'Evangile, qui est descendu de son âne et est venu au secours du pauvre diable jeté dans le ravin. Il fallait s'occuper directement des mamans en détresse, les secourir, les sauver : n'est-ce pas le message de l'Evangile ?
— Depuis combien de temps existez-vous ?
— Notre association-mère l'UNEC existe depuis 1989, et nous étions un groupe pro-vie à l'intérieur de l'UNEC depuis le début. Notre "conversion" stratégique, pour ainsi dire, a eu lieu en 1995. Depuis, notre groupe s'appelle SOS Mamans, toujours à l'intérieur de l'UNEC qui seule est déclarée en association selon la loi de 1901.
— Quel est le profil des jeunes filles dont on dit qu'elles sont "contraintes" d'avorter ?
— Eh bien, on peut franchement dire que nous n'avons jamais rencontré une maman qui voulait avorter sans s'y sentir contrainte. Par les circonstances, par le manque de ressources, de place, mais surtout par l'attitude de refus de l'entourage. Combien de fois n'avons-nous pas entendu : « Vous êtes les seuls à me soutenir, à m'encourager, à m'aider ; tous les autres, y compris ma meilleure copine, me poussent à avorter ; pire, mes parents m'ont chassée, et mon copain, géniteur du bébé, m'a donné des coups violents quand je lui ai annoncé la bonne nouvelle... » Voici donc le profil : le ventre légèrement bombé, le visage tuméfié, les larmes à peine cachées. Voilà la réalité que nous autres chrétiens ne voulons pas voir, en évitant la rencontre, comme Jésus l'a dit du prêtre et du diacre qui ont simplement "évité" le pauvre diable laissé pour mort dans le ravin.
— Y a-t-il des différences de comportement entre ces jeunes filles selon leur origine ?
— Non. Toutes ont besoin d'aide. Parfois morale, presque toujours financière. En plus, certaines sont à reloger le soir même, pour sauver leur bébé. Cela pose naturellement plus de problèmes avec des mamans vivant illégalement en France, les immigrées, les colorées, les mineures... Mais, même si l'on a tous des préférences — comme le Bon Dieu en a en abondance Lui-même, il reste vrai que face à la VIE nous ne faisons aucune différence. Un bébé est toujours à sauver, au risque de notre propre vie, n'importe sa couleur ou condition. Est-ce qu'un pompier, du haut de son échelle et face aux flammes, prêt à déclencher le jet de sa lance, demande d'abord s'il y a des noirs ou des clandestins dans l'immeuble ? Non, il éteint le feu. C'est ce que nous faisons. Nous sauvons la vie, la vie des enfants de Dieu en danger, en un mot : la vie de nos petits frères et sœurs. Sans parler de la vie des mamans que nous sauvons parfois en même temps, surtout dans le cas des prostituées, esclaves, suicidaires, comme cela nous est arrivé des dizaines de fois. Là on peut dire que grâce au bébé la vie de la maman a été sauvée. C'est d'ailleurs la règle générale : ce n'est pas le bébé qui pose problème, non, ce sont les problèmes des adultes que le bébé résout. Combien de mamans, surtout jeunes, ont grâce au bébé changé de vie, renoncé à leurs mauvais copains, structuré leur vie, abandonné la drogue, l'alcool, appris un métier, retrouvé Dieu ? Le vrai missionnaire envoyé par Dieu, c'est le bébé lui-même. Nous avons d'ailleurs pu amener au baptême une douzaine des bébés sauvés ; c'est chaque fois une grande fête. Il faut bien se mettre d'abord dans la tête que le bébé n'est pas un problème, mais une JOIE, un cadeau tombé du Ciel. Pour bien marquer le coup — devons-nous le dire ? — nous buvons dans le café le plus proche une coupe de Champagne pour célébrer l'arrivée d'une nouvelle maman, c'est-à-dire d'un nouveau bébé. Cela met les pendules à l'heure. C'est un petit luxe de 6 euros que nous payons de nos propres deniers. Après cela seulement, on commence à réfléchir avec la maman sur la façon de résoudre les problèmes parfois terribles qui surgissent, de faire face aux dangers immédiats. Toutes nos mamans sont, à ce moment-là, nos meilleures alliées, partenaires, avocates, amies, en parfaite connivence. Il n'y a pas à argumenter, elles s'envolent et sont d'accord dès qu'on leur parle de la VIE.
— Combien de personnes participent-elles aux sauvetages ?
— Nos groupes — il en existe déjà sept en France et deux à l'étranger — comprennent normalement trois personnes, parfois quatre. Pas plus. Une « fourmi de quartier » (ou « avion renifleur ») qui n'a peur de rien et qui dans sa vie "en a vu d'autres". Un ou une comptable qui, patiemment, construit un réseau de donateurs autour du groupe — nous en avons 700. Ensuite un responsable qui supervise, juge les problèmes à froid, garde le lien avec les donateurs et reste en liaison avec notre groupe à Paris pour s'en sortir ensemble quand des cas extrêmes, voire dangereux, se présentent. La quatrième personne peut arriver plus tard, c'est "Monsieur SOS", généralement un retraité disposant d'une voiture pour aider lors du déménagement d'une maman, ce qui arrive souvent, et surtout d'un coin dans son garage pour stocker quelques vêtements de bébé, landaus, lits d'enfant, etc. La première personne — la fourmi de quartier — est nécessairement une femme. Une femme peut trouver, comprendre, consoler et sauver une nouvelle maman en profonde détresse. Les hommes ont quitté la scène depuis des lustres — la révolution industrielle ? — et l'arène de la VIE. Y font front aujourd'hui seules les femmes, surtout quand ça va mal. C'est normal quand on pense que Dieu les a choisies comme co-créatrices : à chaque conception et naissance la Création continue, Dieu ne délaisse pas l'humanité, Il recommence chaque fois à zéro, et cela chez la maman. Sans les femmes, il n'y aurait pas d'humanité : cela en dit long.
— Combien de sauvetages faites-vous ?
— Au début nous n'en réalisions que deux ou trois par an. Nous avions plus d'argent que de mamans à aider. Nos yeux étaient encore fermés. Il fallait, petit à petit, les ouvrir, sortir de notre tour d'ivoire, de nos cages d'ivoire bien protégées. Aujourd'hui c'est le contraire : il y a plus de bébés à sauver que d'argent pour aider. Nous vivons ainsi une catastrophe financière presque chaque fin du mois. Mais quand rien ne va plus, Dieu nous envoie de l'aide. Par exemple la semaine dernière un homme voulait nous parler « d'une question administrative ». Nous avons fixé, non sans difficultés, un rendez-vous avec lui. Il a sorti un chèque de 3000 euros. Cadeau de Dieu ! Au total nous avons sauvé jusqu'ici 275 bébés, dont 48 encore à naître. La plupart par notre groupe à Paris, mais aussi 22 par notre groupe en Normandie, 10 par celui de Lituanie, 28 par celui de Géorgie-Caucase où nous avons acquis en 2005 une maison d'accueil, la « Maison Verte » à Zougdidi. D'autres groupes en France, notamment en Auvergne, Paca, Toulouse, Lyon, Dijon, quoique existant pour certains déjà depuis plus d'un an, n'ont pas encore trouvé une seule maman à sauver. Ils s'y préparent, en essayant d'enlever les poutres de leurs yeux dont parle Jésus dans l'Evangile, et aussi en utilisant ce temps "vide" pour établir leurs réseaux de bienfaiteurs et de donateurs.
— Peut-on évoquer un “taux de réussite” ?
— Mais oui ! Et il est de près de 100 % ! Il y a un avortement à signaler en Géorgie où notre groupe avoue qu'une femme est revenue pour dire qu'elle a avorté. Et en France nous en avons eu deux. Imaginez la raison ? « Des charismatiques m'ont harcelée de façon insupportable par des coups de téléphone répétés disant qu'elles sont à genoux pour moi, etc. C'était trop ! » Triste témoignage. Agir avec amour ne veut pas dire faire n'importe quoi. Le sauvetage est un métier chrétien qui s'apprend, avec beaucoup de désintéressement, de patience et surtout de délicatesse. N'intervenons-nous pas dans l'un des domaines les plus intimes de la femme ? Un seul mot, un seul geste déplacé, et tout est perdu. Un peu comme chez les pompiers !
— Est-ce que vous suivez les mamans après la naissance ?
— Oui, normalement nous les suivons au total pendant 10 à 12 mois, surtout financièrement : la période avant la naissance de leur bébé, jusque trois mois après. Mais parfois nous les logeons aussi : les majeures en les plaçant dans un des quatre studios que notre association loue en région parisienne, les mineures chez des familles d'accueil dans toute la France. Ainsi nous logeons en permanence 15 à 20 mamans. Plus les futures pensionnaires de notre Maison Verte en Géorgie actuellement en réfection. En un cas nous avons suivi une maman pendant trois ans, logée dans un de nos studios parisiens, jusqu'à ce qu'elle ait trouvé un appartement HLM.
— Quel est le budget de votre association ?
— N'en parlons pas : c'est un peu la trésorerie du Bon Dieu. Juste pour vous donner une idée : en moyenne un bébé sauvé nous coûte 1000 euros. C'est peu par rapport à la valeur inestimable de la vie humaine. « Une âme vaut l'univers », dit sainte Thérèse d'Avila. Et l'argent est fort répandu sur terre. Il suffit de le redistribuer un peu.
— Comment repérez-vous les jeunes filles en difficulté ?
— Surtout pas en attendant derrière le téléphone ou l'ordinateur. Non ! Mais en sortant, c'est-à-dire en allant sur les trottoirs, dans les cafés, pharmacies, métros, et surtout vers les bancs dans les parcs publics. Nous n'attendons pas les mamans, nous allons vers elles. Comme le Bon Samaritain dans l'Evangile.
— Avez-vous des détracteurs ?
— Personne pour l'instant. Car nous travaillons sans bruit, sans publicité, sans affiches, sans revue, sans bureau, sans salaires. Bref, d'homme à homme, ou plutôt de femme à femme. Par contre nous avons des ennemis : les députés qui maintiennent l'avortement, les autorités de l'Etat qui le gère et le rembourse, les médecins qui le pratiquent, les pharmaciens qui vendent les pilules abortives, voire les autorités religieuses qui laissent passer ce crime des crimes comme si c'était un problème parmi d'autres. Ce sont les femmes qui aboliront l'avortement, pas les hommes. Nous n'attendons surtout rien des gens haut placés. Nous travaillons seuls, en partant du bas vers le haut. S'il y avait 1000 groupes de ce genre en France, il y aurait peut-être encore des lois d'avortement, mais plus d'avortements. Que les païens fassent des lois païennes, rien d'étonnant. Mais que les chrétiens ne se réveillent pas pour sauver les vies, stopper le génocide, arrêter l'horreur, ce n'est pas normal. C'est donc un problème entre catholiques. Oui, l'avortement est un problème catholique ! Il nous provoque et nous défie. Ou nous venons au secours, ou ce sera fini pour tous, y compris nous-mêmes. Quel enjeu !
— Comment vous aider?
— Faites partie de nos sauveteurs par vos prières, vos colis postaux avec des layettes modernes, c'est-à-dire au goût du jour. Nous ne pouvons plus accepter les lainages tricotés à la main, bleus pour les garçons, roses pour les filles… Les mamans sont souvent très jeunes et considèrent qu'elles ne peuvent pas habiller leur bébé avec des vêtements qu'elles jugent ringards. Et comme elles savent que cela a été fait avec amour, elles en sont très gênées. Nous ne sommes là ni pour compliquer leur vie, ni pour leur imposer quelque goût que ce soit. Vous pouvez surtout nous aider par vos dons, soit ponctuels soit par virement bancaire mensuel (entre 10 et 50 euros par mois, formulaire disponible). Nos coordonnées : SOS Mamans (UNEC), BP 70114, 95210 Saint-Gratien, T/F 01 34 12 02 68, unec@wanadoo.fr, www.radio-silence.tv (rubrique SOS MAMANS).