La prise de contrôle de l’Irak par les Iraniens reste un sujet largement tabou mais commence à inquiéter sérieusement les Américains, qui en sont évidemment responsables mais n’imaginaient pas non plus en arriver là… Le sujet devient brûlant avec les perspectives de retrait de l’armée américaine, qui consacrerait la domination chiite (voulue par les Américains au nom de la démocratie…).
« L’Arabie saoudite a fait savoir à l’administration Bush qu’en cas de retrait des troupes américaines le royaume pourrait apporter un soutien financier aux sunnites en Irak dans n’importe quel conflit qui les opposerait aux chiites », écrit le New York Times, citant diverses sources diplomatiques. L’ancien ambassadeur américain en Arabie saoudite Chas Freeman est plus direct : « Nous pourrions être à la veille d’une intervention saoudienne en Irak au nom de leurs frères sunnites. Nous pourrions être au bord d’une guerre par procuration » (entre l’Arabie saoudite et l’Iran). Car « l’Arabie saoudite et, sur ce point, la Jordanie aussi, ne sont pas prêtes à admettre ce qu’elles considéreraient comme une domination iranienne en Irak ou la destruction de leurs coreligionnaires ».
Voilà qui pourrait ne pas être sans lien avec la démission surprise de l’ambassadeur saoudien à Washington, le prince Turki al-Faiçal, qui a regagné son pays sans rien dire. Mais l’un de ses proches conseillers, Nawaf Obaid, a ouvertement déclaré : « Fermer les yeux sur les massacres de sunnites irakiens serait abandonner les principes sur lesquels le royaume a été fondé. Il est certain qu’un engagement saoudien en Irak serait un facteur de risques immenses et pourrait conduire à une guerre au niveau régional. Mais les conséquences de l’inaction seraient pires encore. »
Non seulement cela sonnerait le glas du prétendu remodelage du grand Moyen Orient dont rêvent les Américains (un rêve déjà transformé en cauchemar), mais en outre un engagement de l’Arabie saoudite en Irak aurait pour conséquence une rupture avec les Etats-Unis, qui ne pourraient plus utiliser le royaume pour l’Irak, ni pour l’Afghanistan. A moins de l’envahir… Etc.
Commentaires
Monsieur Daoudal,
Excellente analyse prospective.
Peu de personnes en Europe et en France le ressentent ainsi malheureusement !
Néanmoins, l'Arabie Saoudite n'a-t-elle pas favorisé cette situation en déversant ses pétro-dollars (considérés comme des "deniers du culte") et en augmentant ainsi tous ces risques à ses frontières