Saint Ambroise encadré des saints Gervais et Protais, dans la crypte de la basilique Saint-Ambroise de Milan.
La fête de ces martyrs a été supplantée en 1738 par celle de sainte Julienne Falconieri. Il n’en reste qu’une « mémoire », alors qu’elle a une messe propre.
La découverte des reliques des deux saints fut un grand événement à Milan en 386. La ville était alors la capitale de l’empire romain d’Occident. L’évêque était saint Ambroise. Il devait consacrer une nouvelle basilique, mais se désolait de ne pas avoir de reliques de martyrs de Milan. Il eut une inspiration divine qui le fit creuser dans la basilique des saints Félix et Nabor (qui étaient des martyrs venus de Maurétanie), et le 17 juin il découvrit les corps de saint Gervais et de saint Protais. Il le raconte avec une sobriété digne d’un rapport préfectoral dans une lettre à sa sœur :
« Lorsqu’en effet je m’occupais de dédier la basilique que vous savez, beaucoup se mirent à m’interpeller d’une seule voix, disant : Dédie-la comme la basilique Romaine. Je répondis : Je le ferai, si je trouve des reliques de martyrs. Et aussitôt m’envahit comme l’ardeur de quelque présage. Qu’ajouterai-je ? Le Seigneur a donné sa grâce. Malgré la crainte des clercs eux-mêmes, j’ordonnai de creuser la terre au lieu qui est devant la balustrade des saints Félix et Nabor. Je trouvai les signes voulus : on amena même des possédés auxquels nous devions imposer les mains, et il arriva qu’à la première apparition des saints martyrs, lorsque nous gardions encore le silence, une femme d’entre eux fut saisie et renversée à terre devant le saint tombeau. Nous y trouvâmes deux hommes d’une grandeur étonnante, comme dans les temps anciens, tous les ossements entiers, quantité de sang. Il y eut grand concours de peuple durant ces deux jours. A quoi bon les détails ? Les saints corps dans leur intégrité, disposés comme il était convenable, nous les avons transportés sur le soir à la basilique de Fausta ; là, veille toute la nuit, imposition des mains. Le jour suivant, translation à la basilique qu’ils appellent Ambrosienne ; pendant le trajet, guérison d’un aveugle. »
Les faits se déroulèrent en présence du peuple de Milan, de l’empereur en personne, et de saint Augustin qui les évoqua deux fois. Une fois largement dans ses Confessions :
« Alors toi, dans une vision, tu montras à l’évêque où étaient cachés les corps des martyrs Gervais et Protais, que tu avais, durant un si grand nombre d’années, conservés sans corruption dans le trésor de ton secret, pour les montrer au monde en temps opportun. Quand le lieu fut découvert et débarrassé des décombres, tandis que les corps saints, avec l’honneur convenable, étaient transportés en grand triomphe à la basilique ambrosienne, les possédés furent guéris, et, qui plus est, par leur bouche les démons confessaient ce qu’ils sont. Un homme qui depuis de longues années était aveugle, et que tous en ville connaissaient, apprit le motif de ces cris insolites du peuple en fête ; aussitôt il se leva d’un bond et pria celui qui le conduisait de le mener près du cercueil. Y étant arrivé, il obtint de faire toucher un linge aux corps de ceux dont la sainte mort fut précieuse, Seigneur, devant toi, et, ayant appliqué le linge sur ses yeux, il recouvra subitement la vue. »
Ambroise avait employé le mot « præsagium », sans préciser. Augustin parle de « visum », vision. Quand il évoque les faits plus tard dans La Cité de Dieu, il dit que ce fut « révélé dans un songe » (per somnium revelata). L’hagiographie développera la chose et montrera Ambroise voyant en songe les deux martyrs qui lui indiquent où se trouvent leurs corps. Conformément à l’hagiographie orientale qui connaît nombre de découvertes selon ce schéma, mais dont c’est le premier exemple en Occident.
Commentaires
Belle notice. Sans oublier qu'à Paris l'église dédiée à ces deux saints fondée au IVème s. fut la première paroisse rive droite, bâtie sur un "monceau", sorte de petit îlot au milieu du "marais" et qu'empruntait un chemin vers l'est.
De cette hauteur, témoignent les marches (Hausmann alignait tout y compris les élévations) du côté du bâtiment construit par Jacques Gabriel au XVIIIème, rue François Miron. A côté, un cimetière occupait l'espace tenu maintenant par la place Baudoyer. Quand le parking y fut creusé il y a une quarantaine d'années, beaucoup de sarcophages y fut découverts.
Le Vendredi Saint 1918 un obus allemand y tua 92 personnes pendant l'office de la Croix.