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14e dimanche après la Pentecôte

Ce dimanche est selon la façon traditionnelle de compter (hélas abandonnée en 1960) le 4e dimanche d’août. Dans le bréviaire monastique, comme avant 1960 dans le bréviaire romain, il y a au deuxième nocturne des matines une lecture qui est le début de l’exposition du « sens moral » du livre de Job par saint Grégoire le Grand. Voici ce texte dans la traduction du « sieur de Laval », pseudonyme de Louis-Charles d’Albert, duc de Luynes (1666).

Il y avait dans la terre d’Hus un homme qui s’appelait Job. Puisque le nom de Job signifie : plein de douleur, et celui de Hus : plein de conseil, c’est avec raison qu’ils figurent l’un et l’autre chacun des élus ; d’autant que celui qui, ressentant de la douleur des choses présentes, aspire continuellement aux éternelles, habite sans doute dans une âme qui prend un salutaire conseil. Car il y a des personnes qui négligent de telle sorte le règlement de leur vie, que, ne recherchant que les seuls biens passagers et ne pensant pas seulement aux éternels ou les méprisant lorsqu’ils y pensent, ils n’en ressentent pas la moindre douleur et sont incapables de prendre quelque bon conseil et de former aucun dessein qui soit salutaire. Ils ne font nulle attention sur les biens célestes qu’ils ont perdus, et, misérables qu’ils sont en un état si funeste, ils s’estiment bienheureux dans la possession des biens de la terre. Ils n’élèvent jamais les yeux de leur âme vers la lumière de la vérité, pour laquelle la Bonté de Dieu les avait formés. Ils n’aspirent point par les élans de leurs désirs vers les joies ineffables de la céleste patrie, mais s’oubliant malheureusement eux-mêmes dans la jouissance de ces choses basses auxquelles ils se sont abandonnés, ils aiment ce lieu d’exil où ils ont été relégués comme si c’était leur véritable patrie, et se réjouissent dans les ténèbres de leur aveuglement déplorable, comme s’ils étaient éclairés de la plus brillante lumière.

Les élus, au contraire, voyant que tout ce qui est passager n’est rien, n’aspirent qu’au bonheur pour lequel ils ont été mis au monde. Et comme hors de Dieu, rien n’est capable de les satisfaire, après s’être inutilement lassés dans la vaine recherche des biens périssables, toutes leurs pensées vont se reposer dans l’espérance et la contemplation de leur Créateur. Ils brûlent du désir d’être associés à la bienheureuse compagnie des célestes citoyens. Quoiqu’ils soient encore en ce monde, ils sortent néanmoins en esprit comme hors du monde. Ils déplorent continuellement le malheureux exil auquel ils sont relégués, et ils s’élèvent sans cesse par les élans de leur amour vers la sublime patrie.

De sorte que, considérant avec douleur que ce qu’ils ont perdu est éternel, ils forment le conseil si salutaire de mépriser tout ce qui, étant sujet au temps, ne fait que passer ; et plus la lumière de ce divin conseil éclaire leur âme, pour lui faire abandonner les biens périssables, plus la douleur, dont ils sont touchés, s’accroît de ce que cette lumière et cette sagesse ne sont pas encore arrivées au comble de leur dernière perfection. Et c’est ce qui fait dire à Salomon : Celui qui augmente sa science augmente sa douleur (Eccl. 1,18) puisqu’il ressent d’autant plus de douleur d’être retenu dans les choses basses et terrestres qu’il connaît plus clairement les biens sublimes qu’il ne possède pas encore. C’est donc avec beaucoup de raison qu’il est dit ici que Job habitait dans la terre d’Hus ; puisque, ainsi que nous venons de le faire voir, l’esprit affligé de chaque élu est rempli d’un sage conseil et d’une science salutaire.

Il faut aussi remarquer qu’il n’y a nulle peine et nulle douleur d’esprit dans les actions inconsidérées et imprudentes. Car ceux qui agissent sans conseil et sans prévoyance, et qui s’abandonnent aveuglément à la fortune et au hasard des événements, ne sont nullement tourmentés par l’inquiétude et par toutes ces différentes pensées qui fatiguent un esprit qui délibère. Mais celui qui fixe solidement son esprit par la maturité du conseil et de la raison s’observe avec circonspection et avec prudence dans toutes ses actions ; et de peur qu’il ne soit surpris par quelque événement inopiné et quelque obstacle imprévu, il examine d’abord la chose, en la sondant doucement par sa prévoyance, et comme avec le pied de sa pensée, afin que, lorsqu’il lui faudra agir, la crainte ne le retienne pas ; que lorsqu’il lui faudra différer, l’inconsidération ne le précipite point ; que dans le mal, la concupiscence ne le surmonte point à guerre ouverte et que la vaine gloire ne le fasse tomber dans des pièges secrets et cachés. Il est donc vrai de dire que Job habite dans la terre d’Hus lorsque l’esprit d’un élu est d’autant plus fatigué par le travail de marcher dans la voie étroite qu’il fait plus d’efforts pour se conduire en toutes ses actions avec conseil, avec prudence.

Commentaires

  • "comme avant 1911 dans le bréviaire romain" : où voyez-vous que les leçons du IV° dimanche d'août ont changé en 1911 ?

    J'ai consulté des bréviaires romains de 1905 et 1957, et ce sont exactement les mêmes leçons, au second nocturne de ce IV° dimanche d'août...

    P. S. : En 1996, Le Barroux suivait encore les règles pour le compte des dimanches des mois d'août à novembre. Cela n'avait qu'un inconvénient : quand le 29, 30 ou 31 août tombaient un dimanche, les quatre-temps d'automne s'y faisaient une semaine plutôt que partout ailleurs (ou presque) !

  • Je m'y perds dans toutes ces réformes. Vous avez raison. C'est en 1960 que les matines ont été sévèrement raccourcies.

  • Je comprends que vous vous emmêliez les pinceaux, tant il y a eu de réformes en ce XX° siècle !

    Pour résumer, la réforme de 1911 a 'seulement' modifié de fond en comble la distribution hebdomadaire du Psautier, et opéré quelques changements dans les laudes de l'office des défunts et du Triduum ainsi que pour quelques antiennes du Temporal (dimanches de Carême) du fait de la suppression des psaumes 66, 149 et 150 des laudes dominicales.

    La réforme de 1960, entrée en vigueur en 1961, a notamment réduit les matines des dimanches du Temporal de 9 à 3 leçons :
    . la leçon 1 = leçon 1 d'avant la réforme
    . leçon 2 = la 2 et la 3 d'avant la réforme réunies en une
    . leçon 3 = ancienne leçon 7 (début de l'homélie)

    Au psautier, elle a opéré aussi quelques petits changements dont le raccourcissement assez sévère du cantique du Deutéronome (samedi à laudes II) :
    . avant la réforme : versets 1 à 43
    . en 1961 : vv. 1 à 18.
    (Saint Benoît ayant prescrit de suivre l'Eglise de Rome pour les cantiques de laudes, le Bréviaire Monastique de 1963 a suivi cet allègement)

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