Sainte Scholastique est cette femme qui obligea saint Benoît à désobéir à sa propre règle, par amour de Dieu… Et saint Grégoire le Grand, lui-même disciple de saint Benoît, ne craint pas d’affirmer que Scolastique obtint le miracle qu’elle souhaitait parce qu’elle aimait Dieu davantage que ne le faisait saint Benoît…
J’ai reproduit le texte si émouvant de saint Grégoire en 2010. Voici la présentation qu’en fait dom Guéranger dans son Année liturgique :
La vie de Scholastique s’est écoulée ici-bas, sans laisser d’autre trace que le gracieux souvenir de cette colombe qui, se dirigeant vers le ciel d’un vol innocent et rapide, avertit le frère que la sœur le devançait de quelques jours dans l’asile de l’éternelle félicité. C’est à peu près tout ce qui nous reste sur cette admirable Épouse du Sauveur, avec le touchant récit dans lequel saint Grégoire le Grand nous a retracé l’ineffable débat qui s’éleva entre le frère et la sœur, trois jours avant que celle-ci fût conviée aux noces du ciel. Mais que de merveilles cette scène incomparable ne nous révèle-t-elle pas! Qui ne comprendra tout aussitôt l’âme de Scholastique à la tendre naïveté de ses désirs, à sa douce et ferme confiance envers Dieu, à l’aimable facilité avec laquelle elle triomphe de son frère, en appelant Dieu même à son secours? Les anciens vantaient la mélodie des accents du cygne à sa dernière heure; la colombe du cloître bénédictin, prête à s’envoler de cette terre, ne l’emporte-t-elle pas sur le cygne en charme et en douceur ?
Mais où donc la timide vierge puisa-t-elle cette force qui la rendit capable de résister au vœu de son frère, en qui elle révérait son maître et son oracle? qui donc l’avertit que sa prière n’était pas téméraire, et qu’il pouvait y avoir en ce moment quelque chose de meilleur que la sévère fidélité de Benoît à la Règle sainte qu’il avait donnée, et qu’il devait soutenir par son exemple ? Saint Grégoire nous répondra. Ne nous étonnons pas, dit ce grand Docteur, qu’une sœur qui désirait voir plus longtemps son frère, ait eu en ce moment plus de pouvoir que lui-même sur le cœur de Dieu ; car, selon la parole de saint Jean, Dieu est amour, et il était juste que celle qui aimait davantage se montrât plus puissante que celui qui se trouva aimer moins.