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Notules sur un concile (14) "Sacrosanctum concilium" (3)

Le chapitre II de Sacrosanctum concilium est intitulé « Le mystère sacrosaint de l’Eucharistie ». Mais le « sacrosaint » a disparu de la traduction française. Il s’agit en fait de ce qu’il faudra changer dans la messe. Ce qui donne lieu à un certain nombre de recommandations vagues et quelques répétitions. On lira au peuple « une partie plus importante des Saintes Ecritures » « dans un nombre d’années déterminé », on « rétablira » la « prière commune » ou « prière des fidèles », qu’on appelle finalement « prière universelle »… On se rapproche ainsi un peu de la liturgie byzantine avec ses litanies. Mais celles-ci sont immuables et répondent à tous les besoins de l’homme, alors que la « prière universelle » est laissée à la créativité du célébrant ou plutôt de l’équipe d’animation, pour des débordements politiques, sociaux, sentimentaux, une irruption de trivialité quotidienne dans l’action sacrée (ou ce qu’il en reste).

On reparle du latin. Le principe réaffirmé dans le chapitre précédent n’est pas rappelé ; on commence par dire qu’on « pourra donner la place qui convient (sic) à la langue du pays » : les lectures et la prière universelle, et davantage « selon les conditions locales ». Mais « on veillera à ce que les fidèles puissent dire ou chanter ensemble en langue latine » les chants de l’ordinaire de la messe. Toutefois il est possible que « semble opportun », « quelque part », un emploi plus large de la langue du pays…

On voit que tout est fait pour permettre la généralisation de la langue vulgaire. A condition d’oublier toutefois ce qui a été solennellement affirmé : « L’usage de la langue latine sera conservé dans les rites latins. »

Le texte évoque ensuite la communion sous les deux espèces, qui « peut être accordée, au jugement des évêques, dans les cas que le Siège apostolique précisera ». Là encore, on ouvre une porte sans définir de limites. Toutefois les « exemples » donnés sont très restreints : les nouveaux prêtres à leur messe d’ordination, les nouveaux religieux à leur messe de profession religieuse, les nouveaux baptisés à la messe qui suit leur baptême.

On remarque qu’il n’est pas fait la moindre mention d’une possibilité de faire donner la communion par des laïcs (ni par des religieuses).

Pour la concélébration, on commence par poser des limites précises : elle est étendue au Jeudi saint, aux messes des conciles, des synodes et assemblées épiscopales, à la messe de bénédiction d’un abbé. Puis on l’ouvre très largement en ajoutant que l’évêque peut la permettre à la messe conventuelle et à la messe principale des églises. Avec cette seule condition qui sera d’autant plus vite oubliée qu’elle paraît irréelle : « lorsque l’utilité des fidèles ne requiert pas que tous les prêtres présents célèbrent individuellement ».

Comme pour tant d’autres choses, on est passé d’un extrême à l’autre : de l’interdiction de la concélébration à l’obligation dès qu’il y a plusieurs prêtres. L’interdiction était illégitime, car il eût été normal de concélébrer avec l’évêque le Jeudi saint, comme à diverses réunions d’évêques et de prêtres afin de montrer l’unité et la communion de l’Eglise, et l’obligation est tout aussi illégitime, puisque chaque prêtre doit pouvoir dire « sa » messe même si c’est celle de toute l’Eglise. On est passé d’une vision comptable de la messe : il fallait multiplier les messes, en oubliant que chaque messe a une valeur infinie et qu’on ne peut pas multiplier l’infini, à une vision communautaire et « conviviale » qui évacue trop souvent la transcendance ou tout au moins la perception de la transcendance. Dans les deux cas, c’est un défaut de vision surnaturelle.

Le chapitre III évoque les autres sacrements et les sacramentaux, en termes très vagues : il faudra les réformer selon les principes déjà évoqués. Ce qui permettra par exemple de détruire la liturgie du baptême, et particulièrement le baptême des petits enfants (ce qui a toujours fait bondir le cardinal Ratzinger), de façon plus ou moins spectaculaire selon les pays (puisque bien sûr une grande partie, comme pour tout, est ad libitum…). La liturgie traditionnelle du baptême était un admirable enseignement, et par souci didactique on le jette à la poubelle de l’histoire. Dans le rituel traditionnel, le prêtre demande à l’enfant : « Que demandes-tu à l’Eglise de Dieu ? », et le parrain et la marraine répondent, au nom de l’enfant : « La foi. » « Et que te procure la foi ? — La vie éternelle. » Dans le nouveau rituel, le prêtre demande aux parents : « Que demandez-vous à l’Eglise de Dieu ? », et ceux-ci répondent qu’ils demandent « le baptême » pour leur enfant. Et c’est tout. La perspective est totalement différente. Le mystère est évacué. Et le nouveau dialogue est d’une telle nullité qu’en réalité désormais le parrain et la marraine répondent ce qu’ils veulent… J’ai vu une fiche de préparation au baptême où il y avait 14 réponses, plus ou moins longues, certaines ne faisant du reste aucune allusion au baptême ou à ce qu’il opère ; ni même allusion à l’Eglise (puisque le plus souvent désormais le baptême, pourtant sacrement de la mort et de la résurrection, est réduit à « l’entrée dans la communauté chrétienne »). Ce n’est pas « le concile » qui a fait cela, mais c’est l’application du concile, qui était plus ou moins permise par le texte du concile.

 

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