Les manifestations de la dévotion dans le cours des siècles se ramènent à deux types que l’on peut appeler l’un, dévotion objective, et l’autre, subjective. La religion et la dévotion établissent un lien entre Dieu et sa créature. Selon que l’on insiste sur le côté humain ou le côté divin, la dévotion est subjective ou objective. On peut dire, d’une façon générale, que l’Orient aime plutôt la piété objective et plus passive, c’est-à-dire, qu’il se laisse conduire et porter par Dieu, le rôle de l’homme restant à l’arrière-plan. L’Occident est à la fois actif et subjectif. Il veut travailler avec sa volonté, il veut laisser la parole à l’homme, au service du Seigneur. Il faut que l’individu intervienne avec ses émotions. L’Église d’autrefois, pouvons-nous dire encore, aimait la piété objective, tandis qu’actuellement nos tendances vont de plus en plus au subjectivisme. Ignace de Loyola est un des porte-parole de cette piété mettant l’homme en valeur qui prévaut dans la vie intérieure de la plupart des chrétiens aujourd’hui. Assurément nous devons être reconnaissants à saint Ignace de nous montrer les énergies puissantes qui sommeillent en nous, de nous révéler des voies qui épurent et approfondissent notre vie intérieure. Reconnaissons pourtant que la piété liturgique suit d’autres sentiers ; elle insiste davantage sur l’élément divin, social, cultuel, créant ainsi un salutaire équilibre. L’objectif et le subjectif, la société et l’individu, l’activité et la passivité, la grâce et la volonté, tout cela réparti, équilibré et dosé comme il convient, constitue l’idéal vers lequel nous devons tendre. Saint Ignace le résume lui-même fort bien ainsi : « Dans toutes vos entreprises appuyez-vous sur Dieu, comme s’il devait, seul, tout accomplir sans vous ; et travaillez, néanmoins, avec autant de zèle que si tout le résultat dépendait uniquement de vous »