Les voies par lesquelles le Seigneur conduit les âmes sont très diverses ; l’une pourra être plus parfaite que l’autre, mais chacune a la sienne propre par quoi elle doit se sanctifier. La grâce ne violente pas la nature, mais la perfectionne ; aussi, quoique saint Jean nous dise que Jésus aimait Lazare, Marie et Marthe, les deux sœurs conservent toujours dans l’Évangile leur caractère respectif. Marie a plus de sensibilité ; dès lors, si elle est ordinairement plus adonnée au recueillement, elle est aussi la femme aux initiatives hardies et géniales, aux attitudes plus courageuses. Dilexit multum, et comme il n’a pas de mesure, ainsi l’amour ne connaît-il pas de difficultés.
La vertu de Marthe est moins exceptionnelle et plus accessible. La sœur aînée de Lazare est une bonne ménagère, diligente, affectionnée et condescendante jusqu’à tolérer ce surplus de travail que lui vaut le caractère différent de Marie. Dans l’accomplissement de ses devoirs, elle regarde les choses surtout du côté pratique. Cependant le Sauveur l’aime beaucoup, parce que si Marie, insatiable, reçoit de lui l’aliment spirituel, Marthe, au contraire, est une tendre mère pour lui et pour ses disciples considérés, à Béthanie, comme faisant partie de la maison.
Donc malgré la différence de caractère de Marie, de Marthe et de Lazare, Jésus les aimait tendrement parce que — et cela est toujours essentiel dans l’Église en une si grande variété de vocations — il était sincèrement aimé par eux en retour.